Pep Guardiola Pep Guardiola : "La Super League ? Ce n'est pas du sport"

ATS

20.4.2021

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20.4.2021

La Super League, "ce n'est pas du sport": à l'image de Pep Guardiola, le football européen a vivement protesté mardi face au projet de compétition privée voulue par 12 clubs dissidents.

Pep Guardiola est contre la "Super League".
Pep Guardiola est contre la "Super League".
Keystone

Ceux-ci ont à nouveau été menacés d'exclusion par la FIFA, mais sans représailles concrètes pour l'heure.

L'une des opinions les plus virulentes est venue du camp même des frondeurs, par la bouche de Guardiola - ancien double vainqueur de la Ligue des champions, épreuve phare de l'UEFA que la Super League entend supplanter - et actuel entraîneur-vedette de Manchester City, club qui fait partie des fondateurs de la Super League.

Pour le Catalan, cette nouvelle coupe d'Europe quasi fermée, où 15 des 20 clubs seraient membres de droit, perturbe l'idée même de compétition. "Le sport n'est pas du sport quand il n'existe pas de relation entre effort et récompense. Ce n'est pas du sport si le succès est garanti ou si perdre n'a aucune importance", a asséné Guardiola, alors que Jürgen Klopp, entraîneur de Liverpool - autre club frondeur -, s'était lui-même montré réservé lundi.

Leur homologue du Real Madrid Zinédine Zidane a lui refusé de s'exprimer, alors que son président Florentino Pérez est l'un des principaux promoteurs de ce projet controversé et dirige la nouvelle société commerciale créée à cet effet: "J'ai mon avis, mais je ne vais pas vous le donner", a lancé le Français, renvoyant la balle vers Pérez: "C'est une question pour une personne: le président."



Ces déclarations résument la profonde ligne de fracture entre les 12 clubs rebelles, le Real, Liverpool ou la Juventus Turin en tête, et la large majorité des autres clubs, supporters, instances et même responsables politiques. Au Royaume-Uni, berceau du sport roi en Europe, le Premier ministre Boris Johnson a assuré mardi qu'"aucune mesure (n'était) écartée" par le gouvernement pour stopper le projet, "y compris l'option législative".

Représailles

Mais pour l'heure, les représailles tardent à prendre forme. Réunis en congrès à Montreux, les représentants des 55 associations membres de l'UEFA ont adopté à l'unamité une déclaration condamnant "fortement" la Super League. Ils ont aussi écouté le président de la FIFA Gianni Infantino réaffirmer l'opposition de la fédération internationale à ce projet de "club fermé".

"Soit vous êtes dedans, soit vous êtes dehors", a ajouté le Valaisan, agitant à nouveau, à l'unisson de l'UEFA, la menace d'exclure les clubs dissidents et leurs joueurs de toutes les compétitions nationales et internationales... sans néanmoins citer de mesures concrètes ni de délai.



Le football européen aura besoin de la FIFA pour bannir les clubs frondeurs et leurs joueurs des compétitions internationales avec leurs sélections, comme l'Euro ou la Coupe du monde, une option discutée juridiquement. La question se pose en particulier pour l'édition actuelle de la Ligue des champions, où trois clubs mutins sont qualifiés pour les demi-finales la semaine prochaine (Manchester City, Chelsea et le Real Madrid).

Jesper Moller, membre du Comité exécutif de l'UEFA, a dit s'attendre à une exclusion de ces clubs vendredi lors d'une réunion de cet organe décisionnaire. Et en Allemagne, la Fédération a réclamé officiellement l'exclusion des frondeurs. Mais Florentino Pérez a assuré ne pas y croire.

"Je ne veux pas détailler les motifs légaux, mais ça n'arrivera pas, c'est impossible", a jugé le patron du Real. Selon Antoine Duval, spécialiste de droit européen du sport à l'institut Asser de La Haye, une telle exclusion "exposerait l'UEFA à des actions en dommages et intérêts par les chaînes détentrices des droits TV".

Appétit financier

Face aux douze clubs rebelles - six clubs anglais, trois espagnols et trois italiens -, le patron de l'UEFA Aleksander Ceferin a néanmoins ouvert la porte à une réconciliation en déclarant qu'il était "encore temps de changer d'avis".

"Toute proposition sans le soutien de l'UEFA (...) ne résout pas les problèmes", a estimé de son côté Nasser Al-Khelaïfi, patron du Paris SG, qui n'a pas suivi les dissidents et a promis mardi de "rester avec les gens qui aiment le football".

Malgré tout, les fondateurs de la Super League semblent déterminés. Ils ont déjà prévenu l'UEFA et la FIFA, dans une lettre consultée par l'AFP, qu'ils avaient lancé préventivement des procédures judiciaires pour garantir la naissance de leur projet. Ils prétendent instaurer une ligue quasi fermée comparable aux championnats nord-américains de NBA, NFL ou NHL.

La Super League prévoit une saison régulière opposant 20 clubs, puis des play-off, avec quinze membres de droit (les 12 "clubs fondateurs" et trois autres à déterminer) et cinq autres équipes choisies "sur leur performance de la saison précédente". La nouvelle compétition, selon ses promoteurs, est vouée à "générer des ressources supplémentaires pour toute la pyramide du football".

Les 15 clubs fondateurs recevront "un versement en une fois de l'ordre de 3,5 milliards d'euros". A titre de comparaison, l'UEFA avait perçu 3,2 milliards d'euros de recettes pour ses compétitions de clubs en 2018-2019, avant la pandémie, redistribués aux plus de 80 clubs participants à la C1 et à la C3.

Pour l'UEFA, une Super Ligue est donc inconcevable: l'instance européenne a au contraire adopté lundi une réforme de sa Ligue des champions à l'horizon 2024, censée d'ailleurs contenter l'appétit financier des plus gros clubs en proposant plus de matches et un nouveau format de "mini-championnat" au lieu de la phase de groupes.