Genève
Un ex-responsable de la fédération guatémaltèque a été condamné mercredi par une juge fédérale new-yorkaise à huit mois de prison. Il s'agit de la première peine prononcée dans la scandale de corruption de la FIFA.
Hector Trujillo (64 ans), qui fut secrétaire général de la fédération du Guatemala de 2009 à 2015, avait plaidé coupable de prise de pots-de-vin dans cette affaire. Il devrait commencer à purger sa peine le 20 novembre en Floride, où il était jusqu'ici en liberté sous caution. Il a accueilli la sentence tête baissée, en séchant ses larmes.
C'est la première peine fixée par la juge Pamela Chen, qui officie à Brooklyn sur l'ensemble du dossier FIFA aux Etats-Unis. Une quarantaine de personnes au total ont été mises en cause dans ce scandale apparu au grand jour en mai 2015, faisant vaciller le football mondial et poussant au départ l'ancien président de la FIFA Sepp Blatter. Seules trois personnes ont plaidé non coupable. Leur procès doit commencer le 6 novembre à New York et devrait durer plusieurs semaines.
Arrêté en décembre 2015 alors qu'il était en croisière en Floride, brièvement emprisonné avant d'être remis en liberté sous caution, M. Trujillo avait plaidé coupable en juin dernier. Il avait alors reconnu avoir accepté, avec d'autres responsables, quelque 400'000 dollars de pots-de-vin de la société de marketing sportif Media World, basée à Miami, en échange des droits médias et marketing sur les matches joués à domicile par l'équipe guatémaltèque pour les qualifications aux Coupes du monde 2018 et 2022. Les pots-de-vin ont été versés sur plusieurs années par Media World, transitant par des banques américaines avant que M. Trujillo n'en reçoive sa part sur un compte au Guatemala, selon le procureur.
Dans le cadre de l'accord passé avec le procureur, M. Trujillo s'était reconnu coupable de fraude bancaire et de prise de pots-de-vin, deux des huit chefs d'inculpation initialement portés contre lui, avec l'espoir que cela lui vaille une certaine clémence, comme c'est généralement le cas avec de tels accords aux Etats-Unis. L'accusation avait plaidé pour une sentence beaucoup plus lourde, réclamant une peine minimale d'un peu plus de trois ans (41 mois) de prison.
Mais M. Trujillo, un ancien avocat qui fut juge de la Cour constitutionnelle du Guatemala, a imploré de son côté la magistrate d'avoir pitié de lui, invoquant tour à tour sa mère malade, sa fille enceinte et sa petite-fille de cinq ans hospitalisée. Et assurant avoir été une personne honnête 60 ans durant, à l'exception d'un moment de faiblesse.
"Qu'est ce qui s'est passé?"
"Qu'est ce qui s'est passé? Pourquoi ai-je accepté cet argent?", s'est-il interrogé dans une longue tirade mercredi. "En regardant en arrière, je crois que j'étais aveugle (...) J'ai pensé que c'était différent de la corruption que j'avais combattue pendant des années (...) c'était facile de le voir comme une récompense pour le travail et les efforts que j'avais faits comme secrétaire général", a-t-il expliqué, habillé en costume et cravate.
La juge Chen a souligné avoir tenu compte de l'âge du condamné - qui s'appuyait au tribunal sur sa canne - son mauvais état de santé, et sa quasi-assignation à résidence en Floride depuis près de deux ans. Elle a néanmoins longuement reproché à M. Trujillo d'avoir "fini par voler" l'organisation qu'il prétendait aider et trahi la confiance des citoyens de son pays.
"Je suis certaine que vous saviez que c'était mal (...) Vous avez d'une certaine façon détruit votre pays. Le football, c'est la passion nationale, une quête patriotique", a-t-elle ajouté. Elle l'a aussi condamné à rembourser quelque 415'000 dollars à la fédération guatémaltèque, correspondant au montant dont elle a été lésée avec les pots-de-vin acceptés par Trujillo et deux autres accusés, Brayan Jimenez et Rafael Salgueiro. Hector Trujillo devra également payer 175'000 dollars au gouvernement américain au titre de sa reconnaissance de culpabilité. Il devrait être renvoyé au Guatemala à sa libération.
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