Toujours plus de buts et de records: porté par une ambition et un égo démesurés, l'adulé et décrié Cristiano Ronaldo a couru toute sa vie derrière les récompenses, à 20 ans comme à 36 à l'heure de retourner à Manchester United.
Avec cinq Ballons d'Or, le Portugais, toujours affamé après trois saisons mitigées à la Juventus, n'est devancé au palmarès que par son éternel rival, Lionel Messi, qui en a gagné six. A un âge où les footballeurs sont parfois déjà dans leur vie d'après et consultants de luxe sur les plateaux télévisés, il continue à sculpter ses pectoraux de jeune homme et surtout à empiler les buts.
CR7 a terminé meilleur buteur de Serie A la saison dernière (29 réalisations), réussissant ainsi le pari d'avoir été le meilleur canonnier dans trois des cinq grands championnats européens (Angleterre avec ManU, Espagne avec Real Madrid, Italie). Il quitte la Juve avec un palmarès enrichi de deux titres de champion d'Italie, une Coupe d'Italie et deux Supercoupes d'Italie.
En Ligue des champions, malgré les éliminations précoces saison après saison avec les Bianconeri, il a conforté sa place de meilleur buteur de l'histoire de la C1 (134 buts à ce jour, contre 120 pour Messi, son premier poursuivant). Il aura l'occasion d'améliorer cet impressionnant total cette saison, notamment face à Young Boys en phase de poules.
Carapace de muscles
Avec 783 buts (109 avec le Portugal) chez les pros, Ronaldo a dépassé le mythique total attribué au «roi» Pelé (767) et lorgne les 805 du Tchèque Josef Bican. Être le premier, tout en haut, au risque de s'attirer les critiques pour la jouer «perso» dans un sport collectif, tel a toujours été le but de cet éphèbe bling-bling protégé par une inaltérable carapace de muscles et d'assurance.
La seule fois où elle s'est, un peu, fendillée, ce fut face aux accusations de viol qui l'ont visé à l'été 2018, avant que la justice américaine décide de ne pas le poursuivre faute de preuves.
Pour devenir «CR7», ce surnom dont il a fait une marque, il fallait une sacrée ambition, presque «anormale», selon les mots de Zinédine Zidane, son ancien entraîneur au Real Madrid. C'est cette aspiration qui l'a mené de la petite île de Madère, dans l'océan Atlantique, jusqu'à Lisbonne, où il a débarqué seul à 12 ans. Un déracinement très difficile à vivre pour le frêle gamin, raillé par ses camarades du Sporting Portugal en raison de son fort accent insulaire.
«Il se mettait en colère et se bagarrait souvent. J'essayais de le protéger, mais il arrivait qu'il revienne à la résidence en pleurs», a raconté José Semedo, lui aussi devenu footballeur et resté l'un de ses meilleurs amis.
Ce caractère à fleur de peau a valu à Ronaldo une douzaine de cartons rouges dans sa carrière et de fréquents gestes d'humeur sur les terrains. Admiré de tous mais aimé par moins, Ronaldo a construit sa carrière comme il a travaillé son corps, par le travail et la discipline, indispensables compagnons de son talent naturel.
Ascétisme
Mais l'ascétisme dans le travail n'empêche pas l'emphase dans l'auto-célébration et Ronaldo ne fait pas semblant de cacher tout le bien qu'il pense de lui-même. «Parce que je suis riche, je suis beau, je suis un grand joueur, les gens me jalousent», déclarait aussi le Portugais en 2011.
Son opulence, ce dieu du stade aux cheveux gominés, au salaire annuel de 31 millions d'euros à Turin et aux boucles d'oreilles en diamants l'affiche d'ailleurs volontiers sur les réseaux sociaux: train de vie fastueux, bolides rutilants, jet privé.
Mais ces dernières années, sa vie de famille avec la mannequin espagnole Georgina Rodriguez et ses quatre enfants prend une place de plus en plus importante sur les photos qu'il donne à voir à ses plus de 330 millions d'abonnés sur Instagram, réseau sur lequel il est la personnalité la plus suivie au monde.
Avec l'âge, le Portugais semble tenter de gommer ses aspects les plus clivants, même s'il lui arrive encore d'allumer quelques polémiques. Comme lorsqu'il fustige durant le dernier Euro une marque de boisson gazeuse, sponsor de l'événement. Ou lorsqu'il a posté à l'automne 2020 un message qualifiant de «conneries» le test PCR pour le coronavirus, déçu de devoir manquer un match contre le FC Barcelone de son rival Messi pour cause de tests positifs.
Message très vite retiré car Cristiano Ronaldo doit aussi prendre soin du business «CR7»: son image s'est déclinée sous la forme d'une ligne de sous-vêtements, d'un parfum, d'une chaîne d'hôtels, ainsi que d'un musée à sa gloire à Madère, là où a débuté un parcours hors normes qui va le ramener vers Manchester, le club avec qui il a soulevé sa première Ligue des champions.