Trente ans jour pour jour après la mort d'Ayrton Senna, le Brésil a rendu hommage mercredi à l'une de ses plus grandes idoles, fierté nationale dont l'aura est comparable à celle du «Roi» Pelé.
Des fans du triple champion du monde du Formule 1 (1988, 1989 et 1991) ont afflué devant sa tombe dans un cimetière de Sao Paulo (sud-est), sa ville natale, où il a été enterré en 1994, à 34 ans, après son accident tragique sur le circuit italien d'Imola.
Des centaines de personnes ont déposé des fleurs, des photos et des drapeaux brésiliens sur son caveau, sous un arbre gigantesque, a constaté l'AFP.
Comme chaque année depuis sa mort, une course à pied est organisée sur le circuit d'Interlagos, également à Sao Paulo, où il s'est imposé à deux reprises en fin de carrière, en 1991 et en 1993.
A Imola, une cérémonie s'est tenue en sa mémoire et celle de l'Autrichien Roland Ratzenberger, décédé un jour avant le Brésilien dans un autre accident, en présence des ministres des Affaires étrangères du Brésil, d'Autriche et d'Italie.
L'ancien patron de la F1 Bernie Ecclestone a jugé lors d'un entretien avec l'AFP qu'Ayrton Senna «était l'un des meilleurs de son temps, probablement le meilleur». «C'était un pilote flamboyant et attirant», a-t-il estimé.
Des émissions rendant hommage à celui qui donne son nom à de nombreuses rues au Brésil se sont multipliées ces derniers jours sur les télévisions locales.
Une exposition itinérante intitulée «Moi, Ayrton Senna da Silva - 30 ans» a ouvert ses portes mercredi à Rio de Janeiro, après être passée par plusieurs autres métropoles brésiliennes.
Dans cette exposition, les visiteurs peuvent entendre la voix du pilote retracer les moments marquants de sa vie et de sa carrière grâce à l'intelligence artificielle.
Sur la splendide plage de Copacabana, site emblématique de Rio, de nombreux promeneurs se font comme à l'accoutumée prendre en photo devant la statue de bronze du pilote, qui l'immortalise bras levés et brandissant un drapeau du Brésil.
Parmi eux, Joao Paulo Bertoloni, 30 ans, qui était un bébé quand Senna est mort. «Je n'ai pas pu le voir en direct, mais ma famille a toujours été fan de lui. Mon père, mes grands-parents... Tout le monde me parlait de Senna. A l'époque, le Brésil s'arrêtait le dimanche pour assister à ses courses», raconte ce chef d'entreprise.
«Un gars comme nous»
Marilane Mattos, 66 ans, se souvient parfaitement du moment où elle a vu l'accident d'Imola en direct à la télévision, le 1er mai 1994. «C'était horrible, ça me rend triste encore aujourd'hui. Mais je préfère me souvenir des bons moments (...). C'était un type simple, un gars comme nous», confie-t-elle, après un selfie devant la statue à Copacabana.
Au-delà des exploits sportifs, l'héritage du grand rival d'Alain Prost reste vivant au Brésil à travers l'institut Ayrton Senna, qui a été reconnu en 2004 par l'Unesco pour ses projets éducatifs destinés aux enfants de quartiers défavorisés.
«Ayrton disait toujours que si on voulait changer les choses, il fallait commencer par l'éducation», déclare Viviane Senna, soeur d'Ayrton et présidente de l'institut, dans une vidéo publiée récemment sur les réseaux sociaux.
Fondé six mois après la mort du pilote, l'institut dit avoir bénéficié à quelque 36 millions d'élèves de 3.000 villes brésiliennes.
Pour l'écrivain brésilien Ernesto Rodrigues, auteur de la biographie «Ayrton, le héros révélé», Senna a marqué les esprits car il a «redonné de l'estime de soi aux Brésiliens» à une époque marquée par des crises politiques et économiques.
Quand il a remporté ses titres mondiaux, le Brésil sortait tout juste d'une dictature militaire et vivait une période d'hyperinflation.
«Son héritage a été largement préservé. Il a donné son nom à des avenues importantes dans tout le pays. À chaque fois que son nom est cité, il donne beaucoup de fierté aux Brésiliens», conclut le biographe.