Voile «Mes heures étaient comptées» - Il survit 16h dans l’eau

AFP

4.8.2022

Une nuit en pleine mer, coincé sous son bateau renversé: le skipper français Laurent Camprubi a été secouru in extremis au large des côtes du nord de l'Espagne après avoir passé 16 heures sous la coque de son voilier, dans une poche d'air de 30 centimètres.

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«Un sauvetage à la limite de l'impossible». Voilà comment «Salvamento Maritimo», le service espagnol de secours en mer, a décrit sur Facebook le sauvetage mardi du navigateur, dont le bateau a chaviré dans l'Atlantique en plein parcours qualificatif pour la Route du Rhum 2022.

Le Marseillais de 62 ans, habitué des grandes courses au large, se trouvait à 14 milles (22 kilomètres) du petit archipel des Sisargas, au large de la Galice (nord-ouest de l'Espagne), quand il a déclenché sa balise de détresse lundi à 20h30 (18h30 GMT).

«La mer était agitée, difficile, avec un vent d'une trentaine de noeuds, mais le bateau marchait bien. J'étais au repos dans le cockpit quand j'ai tapé violemment sur l'eau. Le bateau a commencé à s'incliner et j'ai compris que j'avais perdu la quille», a-t-il raconté à l'AFP.

«En quelques secondes, je me suis retrouvé à l'envers. Le bateau a commencé à s'enfoncer et l'eau rentrait. Je me suis dit: ‹là on n'est pas bien›», a poursuivi le navigateur, qui dit s'être «mis dans un coin, accroupi», en attendant les secours. «Mes heures étaient comptées» car l'espace libre «diminuait petit à petit».

«Il fallait tenir»

Mobilisés à bord d'un navire, épaulé par trois hélicoptères, les secours espagnols parviennent à localiser le voilier deux heures environ après son accident. Il était «la quille à l'envers» dans l'obscurité, balloté par de hautes vagues, explique le Salvamento Maritimo.

Déposé à l'aide d'un hélicoptère sur le bateau, l'un des secouristes frappe alors sur la coque. Il perçoit des «coups en retour» qui lui font comprendre «qu'il y a une personne coincée à l'intérieur», raconte le service de secours en mer, qui assure que l'émotion est alors «montée en flèche».

A cet instant, la mer est houleuse. Et l'accès au cockpit, quasiment impossible. Les secouristes décident donc d'installer des bouées de renflouement pour empêcher le bateau de couler. Il a fallu travailler de façon «frénétique» pour sécuriser le navire, assure le patron du navire de secours, Rodrigo Piñeiro.

Au petit matin, des plongeurs munis de lampes torche parviennent finalement à pénétrer sous la coque, où ils aperçoivent une botte rouge. «La réaction immédiate a été de la toucher et le pied s'est retiré instantanément», expliquent les sauveteurs, qui ont alors tendu une perche que Laurent Camprubi a aussitôt attrapée.

Pour ce dernier, c'est la délivrance. «Je savais qu'ils étaient là, mais il fallait tenir», confie le navigateur, qui s'est alors jeté à l'eau: «j'ai pris ma respiration et je suis sorti en apnée: il y avait deux mètres à faire pour passer sous la porte, puis quatre pour sortir du cockpit».

«A peine 30 centimètres d'air»

Il est alors 12h00 (10h00 GMT) et Laurent Camprubi vient de passer près de 16 heures «dans à peine 30 centimètres d'air», selon les sauveteurs espagnols. En état de choc, mais indemne, le navigateur est évacué par hélicoptère vers un hôpital de La Corogne, en Galice.

Là-bas, «j'ai passé une série d'examens. J’étais à 34,5 degrés et très déshydraté, mais ça va mieux maintenant», confie le skipper, resté à La Corogne pour superviser le renflouage de son bateau, mais qui s'apprête à rentrer en France pour retrouver sa femme et ses enfants.

«Je vais mettre en pause mon projet de Route du Rhum (...) Je vais continuer à naviguer» mais «j'ai eu peur pour mes proches et je ne veux plus que cela arrive», confie le navigateur, qui possède a son palmarès plusieurs victoires à des régates, notamment sur la Rolex Giraglia, en Méditerranée.

Dans un communiqué, les services de secours espagnols ont salué le courage du navigateur ainsi que ses «connaissances», «qui lui ont permis d'attendre calmement» l'arrivée des secours. «Chaque vie sauvée est notre plus belle récompense», ont-ils tweeté. Le Marseillais a rendu hommage de son côté aux plongeurs qui l'ont sauvé. «Ce sont des moments que je ne vais jamais oublier», assure-t-il.