Faute de grand favori, le Giro présente de multiples énigmes au départ samedi à Turin, où le premier maillot rose reviendra à un rouleur. La dernière étape de montagne, prévue à la veille de l'arrivée à Milan avec une longue incursion en Suisse, pourrait bien s'avérer décisive dans cette 104e édition.
Le parcours, au long des 3479,9 km, avantage les grimpeurs, tels Simon Yates et Egan Bernal. Mais, s'ils ont déjà gagné un grand tour, le Britannique (Vuelta 2018) et le Colombien (Tour de France 2019) sont loin de présenter toutes les garanties pour conquérir le trophée remis au lauréat le 30 mai devant le Duomo de Milan.
L'incroyable défi d'Evenepoel
Que dire alors de Remco Evenepoel ? Le phénomène belge, qui a ridiculisé l'opposition jusqu'à sa chute du Tour de Lombardie le 15 août dernier, reprend la compétition au Giro, le premier grand tour de sa carrière. Avec, probablement, un appétit de cannibale bien qu'il assure être axé avant tout sur les JO de Tokyo.
Au-delà du discours rodé, qui désigne son coéquipier français Rémi Cavagna et le champion du monde italien Filippo Ganna pour favoris du contre-la-montre d'ouverture de 8,6 km le long du Pô, Evenepoel transpire la confiance. "On n'avait pas le temps et ce n'était pas nécessaire", affirmait mercredi le jeune Belge (21 ans) pour expliquer l'absence de course de préparation dans son programme.
Huit arrivées en altitude
Lancé dans un incroyable défi mais sans pression négative sur lui, Evenepoel fait équipe chez Deceuninck avec Joao Almeida. Porteur du maillot rose pendant 15 jours l'an passé, le Portugais est un candidat évident au podium. Tout comme le duo de grimpeurs de l'équipe DSM, Jai Hindley (2e en 2020) et Romain Bardet.
Tous, même Vincenzo Nibali rétabli in extremis, ont rendez-vous avec la montagne dans cette édition riche de huit arrivées en côte ou au sommet. Mais, avant d'attaquer le Zoncolan (14e étape) et les grands cols des Dolomites (16e étape), le parcours sillonne la péninsule, même s'il néglige cette fois le talon de la botte.
Le tracé comporte aussi 36 km de "sterrato", avant le "chrono" final de 30 km qui s'était avéré décisif l'an dernier au profit de Tao Geoghegan Hart, absent à Turin. Victorieuse de deux des trois dernières éditions, son équipe Ineos accorde sa confiance au joyau Egan Bernal. Le Colombien découvre le Giro deux ans après son forfait tardif et par contre-coup sa victoire dans le Tour.
La course de tous les possibles
"Tout dépendra de la façon dont répondra mon dos", avance prudemment Egan Bernal, sans excès de confiance mais avec un optimisme raisonnable. "J'ai pu bien m'entraîner en altitude en Colombie", poursuit le porteur du dossard numéro un, qui n'a plus couru depuis la mi-mars.
A l'inverse, Simon Yates a dominé le récent Tour des Alpes, qui fait office de course de préparation. Assez pour être désigné premier favori ? "Nous abordons le Giro avec encore plus d'ambition après notre malheureuse exclusion de 2020", reconnaît son patron Brent Copeland, par référence à l'abandon collectif en octobre dernier en raison du coronavirus.
Mais le Britannique de l'équipe australienne BikeExchange a payé suffisamment cher lors de ses trois précédentes tentatives pour ne surtout pas négliger l'adversité. Notamment l'Espagnol Mikel Landa, à la tête d'une forte équipe Bahrain dans laquelle figure notamment l'espoir bernois Gino Mäder.
Les trois dernières éditions, déroutantes à l'exemple du renversement de situation réussi par Chris Froome en 2018, rappellent que tout est possible dans le Giro toujours en prise avec l'histoire. Cette année, la course rose fête le 160e anniversaire de l'unité italienne en partant de Turin, la première capitale du pays.
Avec six Suisses
Six Suisses prendront par ailleurs le départ samedi à Turin. Le grimpeur valaisan Sébastien Reichenbach (Groupama-FDJ) aura carte blanche en l'absence de son leader habituel Thibaut Pinot, tout comme son équipier Matteo Badilatti. Simon Pellaud (Androni Giocattoli), Mauro Schmid, Kilian Frankiny (tous deux chez Qhubeka) et Gino Mäder sont avant tout là pour jouer les équipiers.