La compétition olympique de kumite, le combat conventionnel du karaté, sera une occasion unique pour Elena Quirici de démontrer à Tokyo ses talents au monde entier. Ce sport disparaîtra du programme aux JO de Paris 2024.
L'Argovienne de 27 ans, passée professionnelle en 2019, a mis toutes les chances de son côté pour ne pas rater cette opportunité. Le karaté est présent cette année pour la première fois aux JO, à la demande des Japonais, et sera biffé aussitôt après.
Elena Quirici, chez les plus de 61 kg, a des chances de médaille. Jour après jour, à l'entraînement dans un fitness de Windisch, elle encaisse les coups avec bravoure face à son sparring partner, entre quelques ajustements de son «tape» enroulé autour des orteils et de courtes pauses pour reprendre son souffle et ménager son genou endolori.
Savoir encaisser
«Bien sûr, il faut savoir endurer les attaques. Mais je ne repars quand même pas à chaque fois avec un oeil au beurre noir ou la lèvre ouverte», s'esclaffe-t-elle. En karaté, les coups sont contrôlés, les poings et les pieds placés dans des coussinets qui amortissent les chocs.
«C'est un mélange de souffrance et de joie. Je ressens des frissons en pensant à ces Jeux mais j'ai encore quelques entraînements corsés devant moi», glisse l'athlète, entre deux stages en Grèce et à la Grande Canarie.
L'approche de ces Jeux s'est apparentée aux montagnes russes. Elena Quirici avait rempli tous les critères de sélection l'an dernier, avant que le Covid provoque le report des JO. Il lui a fallu tout recommencer. «Il y a eu beaucoup de frustration, j'ai dû me battre mentalement aussi. Mais à la fin, la joie de m'être qualifiée une deuxième fois l'a emporté.»
L'Argovienne est issue d'une famille de sportifs. Son père jouait au hockey sur glace, sa mère enseignait le karaté, discipline pratiquée aussi par ses deux frères aînés.
Déclic à domicile
Après quelques succès en juniors, la karatéka a eu le grand déclic lors des Championnats d'Europe élite 2011, organisés en Suisse: c'est elle qui remettait les médailles, et cela a décuplé sa motivation. «Dès ce moment-là, j'ai su que je voulais vraiment pratiquer ce sport.»
L'appui de sponsors privés et de l'Aide sportive lui permet de se consacrer entièrement à son art depuis deux ans, après des études d'employée de commerce et son passage à l'armée comme sportive d'élite.
Elle a recours aussi au financement participatif: sur la plateforme «I Believe In You», elle n'a eu besoin que de quelques jours pour recueillir les 15'000 francs nécessaires à son stage aux Canaries.
Le choix de cet archipel a été fait pour se rapprocher au mieux des conditions très chaudes et humides attendues à Tokyo. Les origines ibériques de son ami Raul ont aussi pesé dans cette option.
Double championne d'Europe
Le huis clos des Jeux ne dérange pas trop Elena Quirici. «Comme je n'ai encore jamais été aux JO, je n'ai pas de point de comparaison. C'est déjà bien qu'ils aient lieu.»
Elle ne se cache pas derrière son petit doigt. «Je n'y vais pas juste pour participer. Chacune d'entre nous se rend aux Jeux pour gagner. C'est aussi mon cas.»
Après tout, elle est double championne d'Europe. Et le fait qu'elle ait décroché son sésame au dernier moment, en gagnant le tournoi de qualification de Paris le mois dernier, a fini de démontrer sa force mentale.