L'équipe de Suisse masculine tutoie les meilleures formations mondiales depuis plusieurs années. Les Jeux de Tokyo doivent constituer l'apogée pour cette génération brillante.
«J'ai toujours encore le sentiment que nous sommes un peu des gamins», s'esclaffe Eddy Yusof. Le Zurichois et ses coéquipiers mettent leurs derniers exercices au point dans la salle dédiée de Macolin avant de s'envoler pour Tokyo. Ils ont toujours l'impression d'avoir vingt ans, l'époque de leur première qualification pour des Championnats du monde.
Un long parcours
«Aujourd'hui, nous sommes des gymnastes d'expérience, des routiniers en somme», s'accordent-ils à dire. Leur entente semble excellente. «Quand nous avons quelque chose à nous dire, nous sommes honnêtes les uns envers les autres.»
Christian Baumann (26 ans), Pablo Brägger (28 ans), Benjamin Gischard (25 ans) et Eddy Yusof (26 ans) ont parcouru un long chemin. Brägger était déjà de la partie aux Mondiaux 2011 à Tokyo, à une époque où les Suisses échouaient toujours à se qualifier pour les Jeux.
L'équipe n'y est parvenue qu'à la suite de l'arrivée des de Baumann, Gischard et Yusof. La 7e place par équipe aux Mondiaux 2014 à Nanning a marqué le début de la montée en puissance.
Quatre fois consécutivement, les Suisses se sont classés parmi les sept premières équipes aux Mondiaux, une performance collective qui, plus qu'une autre, témoigne de la force gymnique d'un pays.
Seules les grandes nations de la discipline comme la Chine, la Russie, le Japon, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis ont fait mieux en termes de régularité.
Le déclic à domicile
Le couronnement de ces efforts est venu aux Championnats d'Europe de Berne, en 2016, avec la médaille de bronze par équipe, une performance historique pour la gymnastique suisse.
Mais aux Jeux, la sélection nationale doit encore faire ses preuves. Très attendue à Rio en 2016 après la conquête de leur médaille européenne, les Suisses ont manqué la finale des huit meilleurs. Ils ont échoué à la 9e place des qualifications, à 1,3 point des Allemands, 8es. Un crève-coeur, même si Eddy Yusof, avec sa 12e place en finale du concours général, a apporté un peu de couleur au bilan.
«Nous avons été comme écrasés par l'importance de l'événement», se souvient Pablo Brägger, dont les yeux étaient alors tout écarquillés en voyant Djovak Djokovic s'entraîner sous ses fenêtres du Village olympique, comme il le rappelle.
La finale à tout prix
A Tokyo, la finale sera l'horizon à atteindre, comme le souligne Christian Baumann. L'Argovien, l'homme tranquille du quatuor, est le plus décoré de l'équipe, avec une médaille d'argent et deux de bronze à son palmarès aux Championnats d'Europe. Il est notamment monté sur la troisième marche du podium aux Européens ce printemps à Bâle, aux barres parallèles, son appareil de prédilection.
«Nous sommes une équipe très homogène, nous avons disputé beaucoup de compétitions ensemble», souligne-t-il.
Le plus extraverti du groupe, Benjamin Gischard, met en avant la complémentarité des caractères des quatre gymnastes. «Malgré nos différences et le fait que nous nous côtoyions aussi souvent, il n'y a presque jamais de tensions entre nous», se félicite le médaillé d'argent (au sol) des derniers Européens.
Fidèle équipier
Eddy Yusof est le seul à n'avoir jamais glané de médaille internationale. Mais par équipe, ce spécialiste des barres parallèles et du saut déploie toutes ses qualités, ne déçoit jamais. «Je sais montrer les crocs quand les affaires deviennent sérieuses», dit celui qui avait remporté l'argent par équipe aux côtés notamment de Brägger aux Championnats d'Europe juniors en 2010.
«Eddy est très explosif, puissant et rapide», loue Pablo Brägger. «Et c'est quelqu'un de très positif.»
Pour Brägger, ces Jeux constitueront l'aboutissement d'une longue carrière, couronnée par l'or européen en 2017 en Roumanie, à la barre fixe. Pour l'équipe, pour sa génération, ce sont bien ces JO de Tokyo qui représenteront l'apothéose.