Le skieur Beat Feuz fait désormais partie de l'histoire. Avec la retraite du Bernois de 35 ans, ce n'est pas seulement un grand sportif qui se retire.
Sa 16e place n'avait pas d'importance. Pour sa dernière apparition en tant que skieur, samedi en descente à Kitzbühel, Beat Feuz avait mis d'autres valeurs au premier plan. Il voulait arriver sain et sauf à l'arrivée au pied du Hahnenkamm, profiter encore une fois de tout ce qui l'entoure, vivre en toute conscience les dernières heures de sa carrière. «S'imprégner», comme il l'a dit.
C'était un jour de course, mais pas comme les autres, bien sûr. «Quand j'ai quitté l'hôtel, c'était déjà différent de d'habitude», a-t-il raconté. Il a serré beaucoup de mains. Des entraîneurs, des coureurs et des membres du comité d'organisation local se sont approchés de lui – ainsi que de nombreuses célébrités, dont le plus éminent des invités, Arnold Schwarzenegger.
Impossible de s'isoler
Beat Feuz était préparé à l'engouement autour de sa personne. «Je n'ai pas pris le départ avec l'idée de m'isoler», a-t-il souligné. Mais il fallait tout de même se concentrer sur la course, sa dernière en Coupe du monde. «Sinon, ça devient vite dangereux, surtout sur la Streif».
Le professionnel s'est exprimé une dernière fois, avec un numéro de dossard 217 en référence au nombre de courses de Coupe du monde qu'il a disputées. Cela aurait pu être le numéro 59 pour le nombre de podiums. Ou le numéro 16 pour le nombre de victoires en Coupe du monde.
Cette journée s'est déroulée comme il l'avait imaginé, comme il l'avait espéré après sa décision d'annoncer sa retraite anticipée. Trois jours avant Noël, il avait rendu public ce qui est devenu un fait un mois plus tard. Tout le monde était au courant, il n'a pas eu à éviter les questions et à réagir aux spéculations.
Une sortie cohérente
«Ça me fait du bien. C'est tellement vrai pour moi», a déclaré Beat Feuz samedi. D'abord sa semaine réussie à Wengen, maintenant ses derniers jours en tant qu'athlète à Kitzbühel – dans les lieux auxquels il accordait le plus de valeur, qui avaient une signification centrale pour lui en tant que skieur.
Les victoires au Lauberhorn (trois) et sur la Streif (trois également) ont il est vrai constitué pour l'Emmentalois le summum de l'émotion. Il a même du mal à mettre l'or olympique et l'or des championnats du monde au même niveau.
Beat Feuz était satisfait de lui-même, et d'un monde qui sera très différent à l'avenir. Il se réjouit d'une vie sans agenda imposé, d'un quotidien avec plus de liberté, d'une nouvelle phase avec plus de temps pour sa famille, pour sa compagne Katrin Triendl et pour leurs filles Clea et Luisa.
Pas (encore) de sentimentalisme
Cette joie n'a pas laissé place au sentimentalisme, du moins dans l'aire d'arrivée à Kitzbühel. Au contraire, on pouvait lire chez Beat Feuz une profonde satisfaction et un soulagement d'avoir tourné la page du ski de compétition et, avec lui, de la «vie à la limite».
Il clôt ce chapitre en tant que l'un des plus grands descendeurs de l'histoire, avec notamment 47 podiums dans la discipline (un record) et quatre Globes de cristal. Mais cette vie d'athlète lui a aussi demandé beaucoup d'efforts en raison de son dossier médical très complet, où la plupart des entrées concernent le genou gauche.
Ce genou problématique est tout aussi marquant pour la carrière de Beat Feuz que les nombreux succès qu'il a pu fêter malgré les innombrables revers physiques. Ce mélange de blessures et de grandes victoires et de titres rend sa carrière bien particulière.
Le Bernois ne s'est jamais laissé abattre et s'est toujours battu pour revenir après chaque coup dur, en s'appuyant bien sûr sur un immense potentiel. Sans son grand talent, ce parcours d'équilibriste entre les pistes de ski et les salles d'opération aurait pris fin bien plus tôt.
Le grand vide
Mais ce n'est pas seulement sa carrière qui est particulière, mais aussi Beat Feuz lui-même. C'est aussi un grand homme qui se retire, un homme droit et terre à terre, apprécié et respecté dans tout le Cirque blanc. Le vide qu'il laisse derrière lui est immense.
Le ski alpin perd une figure de proue et d'intégration, le ski suisse perd un garant de succès. Ses désormais ex-coéquipiers perdent pour leur part un très bon collègue et ami, un leader et un conseiller qui était à l'écoute de tout et de tous.
Pour l'instant, Beat Feuz ne sait pas encore ce que l'avenir lui réserve. Pour l'instant, il va vivre une période de calme. Il se réjouit de tout ce qui va suivre: «Que nous ayons la paix, pour ainsi dire». Au plus tard après son retour dans sa maison d'Oberperfuss, près d'Innsbruck, le skieur sera définitivement de l'histoire ancienne. Et la 16e place de samedi de toute façon.