Longtemps considéré comme l'héritier de Yannick Noah, Jo-Wilfried Tsonga va ranger définitivement ses raquettes après Roland-Garros, à 37 ans, à l'issue d'une carrière faite de nombreux coups d'éclats et de blessures à répétition.
«Je joue, bien ou pas, je râle, je crie, je hurle de joie. Mon tennis, c’est la vie», résumait Tsonga il y a quelques années, lucide sur sa carrière faite de hauts et de bas.
Fort de 18 titres, dont deux Masters 1000, le Manceau est le deuxième Français le plus sacré derrière Yannick Noah dans l'ère professionnelle. Il a souvent tutoyé les étoiles en Grand Chelem, mais sans réussir à devenir le premier Français à remporter un titre majeur depuis le sacre de Noah à Roland-Garros en 1983.
2008 comme dans un rêve
Pour Tsonga, tout a commencé à Melbourne. En janvier 2008, ce jeune inconnu de 22 ans a tout renversé sur son passage pour atteindre la finale de l'Open d'Australie.
«Je n’étais pas dans mon monde. Je passais du mec qui est 300e mondial, à qui on donnerait presque un petit morceau de pain pour manger, au gars qui est là, devant 15.000 personnes qui crient son nom !», se remémorera des années plus tard le Français, comparé par la presse australienne au boxeur Mohammed Ali pour sa gestuelle, sa manière de s'encourager et une certaine ressemblance physique.
N'empêche que le petit Frenchy, fils d'un ancien handballeur d'origine congolaise et d'une mère enseignante, a marqué les esprits: il a éliminé Andy Murray (9e) mais surtout Rafael Nadal, N.2 mondial et alors triple vainqueur de Roland-Garros, balayé en trois sets en demi-finale.
Seul Novak Djokovic l'arrête. Mais qu'importe cette finale perdue: le tennis français tient son nouveau Mousquetaire !
Armé de son service et de son coup droit ravageurs, Tsonga enchaîne en remportant son premier titre à Bangkok, puis son premier Masters 1000, à Bercy. Fin 2008, il est 6e mondial.
Colosse aux pieds d'argile
Mais l'ombre des blessures rôde. Ce printemps-là, le colosse (1,88 m, 91 kg) s'est fait opérer du genou, restant éloigné des courts plusieurs mois.
Un scénario qui le poursuivra pendant toute une carrière qui avait failli ne jamais débuter, à cause de multiples pépins physiques dès ses années de junior.
En 2010, une déchirure abdominale le prive de Roland-Garros et un genou douloureux de la finale de Coupe Davis perdue en Serbie. Suivront des blessures au tendon rotulien (2013), à l'avant-bras (2015), aux adducteurs (2016) ou encore aux ischios (2018). A chaque fois, Tsonga revient.
«Danse des pouces»
En 2011, il est demi-finaliste à Wimbledon, après un quart spectaculaire remporté face à Federer. S'ensuivent une finale à Bercy et au Masters.
L'année suivante, c'est le retour de la «danse des pouces» avec laquelle il célèbre ses victoires: il se hisse jusqu'en quarts à Roland-Garros, devenant le premier Français de l'ère Open à atteindre ce niveau dans les quatre «Majeurs». Il accède ensuite au dernier carré à Wimbledon et termine l'année 5e mondial, son meilleur classement. En tout, Tsonga aura passé 260 semaines dans le Top 10.
Mais son grand regret restera sans doute la demi-finale perdue à Roland-Garros 2013. Trente ans après Noah, l'histoire lui tend les bras. Après avoir maîtrisé Federer, alors 3e mondial, en quarts, David Ferrer semble à sa portée. Mais, paralysé par l'enjeu, Tsonga manque son grand rendez-vous.
Après le match, «j'avais envie de tout casser, de me mutiler», déclarera-t-il, frustré de n'avoir pu montrer son meilleur niveau devant «son» public. Car, au-delà de son palmarès, riche d'un autre Masters 1000 à Toronto en 2014, Tsonga restera, avec Gaël Monfils, l'un des chouchous des fans tricolores.
«En France, le public a toujours été extrêmement bienveillant à mon égard (...) C’est une source de motivation très puissante. La moindre des choses, c’est de lui rendre ce soutien, de l’honorer en mouillant le maillot».
Membre fondateur de la All In Tennis Academy, une nouvelle structure française de formation, Tsonga, marié et père d'un petit garçon, souhaite désormais «aider le tennis français».