Henri Leconte est dithyrambique lorsqu'il parle de la Laver Cup, une compétition imaginée par Roger Federer. Ancien numéro 5 mondial, le Français se dit conquis par la formule... et profite de tacler Gerard Piqué et sa réforme de la Coupe Davis. Interview.
Henri Leconte, quel est votre avis sur cette nouvelle compétition qu'est la Laver Cup?
"Il s'agit d'un concept incroyable. Roger Federer a eu une idée extraordinaire en voulant créer en quelque sorte la Ryder Cup du tennis. C'est fabuleux cet engouement et cette démonstration de force qu'il a eu pour mettre sur pied cet événement à Prague, à Chicago et maintenant ici à Genève. En créant un événement sur trois jours, la Laver Cup démontre aussi que le tennis peut se jouer d'une autre façon. Ce sport peut également être dynamique et beaucoup plus rapide que sur les tournois du Grand Chelem. Cela donne une autre vision du tennis mondial. Je trouve cela extraordinaire."
L'ATP a d'ailleurs décidé d'intégrer la Laver Cup à son calendrier. Est-ce une bonne chose?
"Oui, complètement. Au début, il s'agissait d'une exhibition. Cela s'est toutefois vite transformé en un événement important du calendrier de l'ATP. Mais la Laver Cup reste aussi totalement différente des Grand Chelem ou des tournois classiques organisés par l'ATP étant donné qu'elle se joue en équipe. A l'image de Rafa et de Roger, vous vous retrouvez d'un coup à faire équipe avec votre plus grand rival. C'est cela qui est beau, qui donne une dimension totalement différente à cet événement. Au départ, le tennis était un sport individuel. Ici, à la Laver Cup, il se transforme en sport collectif. Je trouve cela vraiment fabuleux. J'aurais bien voulu jouer à cette époque-là!"
Sur le papier, la Team Europe semble favorite. Que pensez-vous des forces en présence?
"L'équipe du reste du monde, les Américains en tête, sont surtout des 'shotmakers'. C'est-à-dire qu'ils sont puissants, que ce sont des serveurs-volleyeurs qui misent sur 2-3 coups de raquette pour faire le point. Ça va donc être rapide et intéressant. Sur le papier, il est vrai qu'il y a un déséquilibre. Vous avez d'un côté Roger et Rafa, mais de l'autre - attention - il y a des joueurs capables de les battre. J'espère donc qu'il y aura un vrai combat. De toute manière, au tennis, tant qu'on n'a pas mis la dernière balle, on ne sait jamais. On l'a encore vu avec Roger à Wimbledon..."
Federer, justement, dit se méfier des doubles. La Team Monde a-t-elle spécifiquement un coup à jouer lors de ces matches?
"Il est vrai qu'ils possèdent des joueurs un peu plus spécialisés dans le double, à l'image de Jack Sock. Ils n'ont toutefois pas une 'vraie' équipe de double, qui joue ensemble toute l'année. Ils vont donc aussi devoir s'adapter. L'un des critères importants sera aussi la capacité à récupérer des simples."
Selon vous, peut-on s'attendre à voir des joueurs qui donnent tout, qui se battent comme lors d'un Grand Chelem?
"Bien-sûr qu'ils donneront tout. Cette atmosphère, cette ambiance qui attend les joueurs sera vraiment quelque chose de fort. Ce ne sera toutefois pas comme un tournoi du Grand Chelem puisque les Majeurs sont des compétitions individuelles. Mais l'envie de gagner sera évidemment présente car les joueurs défendent les couleurs de l'Europe ou du Monde. Nous aurons le droit à des matches spectaculaires et fabulueux."
Finalement, un mot sur cette abondance de compétitions d'équipe. Avec encore la Coupe Davis et l'ATP Cup - dont la première édition à lieu en janvier 2020 en Australie -, n'y en a-t-il tout simplement pas trop?
"C'est clair que la Laver Cup fait de l'ombre à la Coupe Davis. Mais cette dernière a perdu de son âme en changeant son format - M. Piqué a fait une terrible erreur - et s'est en quelque sorte écartée de l'ATP. C'est d'ailleurs à ce moment précis que Roger a saisi l'opportunité d'inscrire la Laver Cup au calendrier ATP. Lorsque la Coupe Davis existait encore dans son format historique, la Laver Cup n'était, en effet, qu'une exhibition. Quant à l'ATP Cup, c'est autre chose. Tout d'abord, elle remplace la Hopman Cup. Ensuite, elle se déroule en début d'année en Australie, où les joueurs se rendent de toute manière pour l'Open d'Australie. Cela affecte donc moins le calendrier. Finalement, la sélection est faite via le classement ATP."