Rafael Nadal fêtera ses 35 ans le 3 juin pendant Roland-Garros où il est de nouveau le grand favori pour décrocher un 14e titre et ainsi porter à 21 le record de titres du Grand Chelem remporté par un seul joueur. Mais, prévient-il dans un entretien avec l'AFP, "personne n'est invicible, nulle part".
Vous n'avez perdu que deux matchs à Roland-Garros depuis votre première participation en 2005. Que doivent faire vos adversaires pour vous battre à Paris: inventer un style de jeu, jouer comme vous mais en mieux, attendre votre retraite ?
"Pourvu que ce soit la dernière (ndlr: réponse, rires) ! Malheureusement, ce n'est pas comme ça que ça se passe, personne n'est invincible, nulle part. Cette année, j'ai perdu à Monte-Carlo et à Madrid. J'espère ne pas perdre ici à Roland-Garros. Que faire pour me battre ? Je ne vais pas donner des indices à mes adversaires. Moi, je dois me préoccuper de ce que j'ai à faire pour qu'ils ne me battent pas. Et eux doivent en faire autant de leur côté."
En abordant Roland-Garros, vous pensez d'abord à y remporter votre 101e match, votre 14e Coupe des Mousquetaires, ou votre 21e titre du Grand Chelem, qui serait un record ?
"Je viens d'arriver à Paris et je ne pense qu'à une chose, m'entraîner, me familiariser au mieux avec les courts, retrouver de bonnes sensations et mes habitudes pour être compétitif quand je vais débuter mon tournoi. Les objectifs ici sont toujours au plus haut, mais pour y parvenir, c'est un travail quotidien afin de s'améliorer constamment. J'espère pouvoir me battre pour quelque chose de grand."
Vous allez fêter vos 35 ans à Paris où vous êtes de nouveau le grand favori. L'auriez-vous imaginé il y a quelques années ?
"Il y a dix ans, non. Mais si vous m'aviez posé la question il y a deux ans, peut-être que j'aurais répondu oui. Il y a dix ans, j'avais tellement de pépins physiques qu'il m'était difficile d'imaginer que ma carrière dure aussi longtemps. J'ai gardé l'espoir, la passion, et mon physique, malgré des problèmes de temps en temps, m'a permis de continuer. Et me voilà, aujourd'hui, avec des ambitions à Roland-Garros qui est un endroit très spécial pour moi. Favori ou pas, ce n'est pas la question: mon objectif est d'être celui qui joue le mieux."
De vos treize titres à Roland-Garros, y en a-t-il un plus important que les autres ?
"C'est très difficile d'en choisir un. Chacun a eu une résonance particulière dans ma carrière. Une fois parce que c'était le premier, une autre parce que je revenais d'une grave blessure, une autre parce que j'avais perdu l'année d'avant, une autre parce que c'était la dixième, une autre parce que ça m'a permis d'égaler (Roger Federer) avec 20 titres du Grand Chelem... Je ne saurais lequel choisir."
Et vos pires souvenirs ?
"Sans aucun doute 2009 et la défaite contre (Robin) Söderling, mais aussi 2016, quand j'ai dû renoncer en raison d'une blessure au poignet. Quant aux meilleurs, je ne sais pas. Il y en a tellement qu'il est difficile d'en choisir un."
Vous êtes-vous senti immédiatement à l'aise sur la terre battue de Roland-Garros ?
"Au début, je crois que je jouais mieux à Monte-Carlo ou à Rome. Il est plus difficile d'avoir de bonnes sensations à Roland-Garros, le court est très grand et ce sont des sensations différentes de celles des autres tournois. Bien sûr que je me suis senti bien, la terre battue est une surface que je connais bien, sur laquelle je me sens à l'aise et en confiance. Roland-Garros est la cathédrale de la terre battue, je n'y ai jamais eu de mauvaises sensations, mais c'est vrai aussi que j'en ai eu de très bonnes dans d'autres tournois sur cette surface."
En quoi la terre battue de Roland-Garros est-elle particulière ?
"Chaque lieu a ses particularités. Le court de Rome ne peut pas être le même que celui de Barcelone, et celui de Barcelone le même que celui de Monte-Carlo. La terre n'est pas nécessairement la même. Celle de Monte-Carlo ressemble toujours un peu plus à celle de Roland-Garros. Après, selon le climat, les courts plus ou moins grands, les sensations sont très différentes."
Pensez-vous que le tennis doive faire évoluer ses formats, par exemple écourter les matchs ?
"Je ne sais pas, je suis trop vieux pour tout ça (sourire). Nous, les joueurs, nous n'avons pas les éléments suffisants pour avoir un avis sur ce genre de choses. C'est au public, aux fans, aux instances de dire ce qui est le mieux pour que le tennis continue d'être un sport majeur. Nous, les joueurs, nous devons jouer au tennis et accepter qu'il y a des gens mieux formés que nous sur la gestion du sport, et plus intelligents que nous pour prendre les bonnes décisions pour qu'à l'avenir notre sport reste un sport de référence mondiale."
L'avenir du tennis, est-ce que ça pourrait être un joueur qui ne jouerait que des coups droits en changeant sa raquette de main ?
"Si quelqu'un est capable de faire ça de manière complètement naturelle, et de le faire très bien, c'est sûr que c'est mieux d'avoir deux coups droits qu'un coup droit et un revers. En théorie en tout cas. Mais si personne ne l'a jamais fait, dans un sport qui a une longue histoire... Inventer des choses, c'est très difficile. Moi, je n'ai rien inventé, j'ai copié des choses de beaucoup de joueurs, et j'en ai amélioré certaines peut-être. Je dis toujours qu'il faut s'inspirer des meilleurs. Et en cherchant des modèles, chercher son propre style."
Et vous, enfant, lesquels vous ont inspiré ?
"C'était Carlos Moya, Juan Carlos Ferrero, Pete Sampras, Andre Agassi, Thomas Muster, Boris Becker, (Richard) Krajicek, (Michael) Stich... Je les suivais à la télévision."