Dans un entretien accordé à «L’Equipe», Stan Wawrinka a remis en question la gouvernance du tennis mondial. Pour le Vaudois, les joueurs doivent être «à la table des décisions» pour faire bouger les lignes de son sport. Extraits.
La saison 2023 de Stan Wawrinka a pris fin de manière abrupt début novembre en 8es de finale du tournoi de Metz. Blessé à une cheville, le Vaudois a été victime d’une fracture de la malléole et s’est désormais engagé dans une course contre-la-montre pour être apte au service à l’Open d’Australie (du 14 au 28 janvier prochain).
Mais en attendant d’être relâché dans l’arène, «Stanimal» s’est défoulé sur les instances dirigeantes de son sport dans une interview accordée à «L’Equipe». Abordant notamment les problèmes liés aux sessions de nuit à rallonge (comme au Masters 1000 de Paris-Bercy), aux balles (la qualité est souvent critiquée) ou encore à la redistribution des revenus, le Suisse de 38 ans n’a, comme à son habitude, pas mâché ses mots.
«Ça fait vingt ans que je suis sur le circuit et on parle des mêmes problèmes, encore et encore», a ainsi pesté Wawrinka dans les colonnes du journal sportif français. «Le problème du tennis, c'est qu'il y a trop de gouvernances, trop d'entités différentes (ndlr : l’ITF, les tournois du Grand Chelem, l’ATP ou encore la WTA) qui ne regardent que leur propre intérêt. Aujourd'hui, le vrai problème du tennis, ce sont les Grands Chelems», a estimé le triple lauréat en Majeur.
Avant d’étayer ses propos sur les quatre principaux tournois de l’année : «Ils ne redistribuent pas assez au tennis par rapport aux revenus qu'ils génèrent. Et ils ont beaucoup trop de pouvoir, parce qu'ils font de l'argent. C'est là où s'écrit l'histoire du tennis... Ce sont les Fédérations les plus riches qui ne redistribuent pas grand-chose. (...) Le revenu des Grands Chelems aujourd'hui est très important et le pourcentage reversé aux joueurs est ridicule. Il n'a pratiquement pas augmenté.»
Pour le natif de Saint-Barthélemy, les tournois du Grand Chelem «ne sont pas intouchables» et, pour que la situation évolue favorablement, «il faut que toutes les entités s'assoient à une table et discutent des problèmes concrets. Tout le monde veut tout sans rien donner. Aujourd'hui, on est bloqués jusqu'au jour où les joueurs disent stop.»
«Ils parlent entre eux, ils vont prendre leurs décisions, et on verra. C'est inadmissible»
sur la Coupe Davis
S’ajoute à cela, les problèmes récurrents que Wawrinka rencontre dans son quotidien durant une saison. «Je suis un des plus anciens sur le circuit et je vois que les choses n'évoluent pas. On est un sport parfois amateur au niveau des infrastructures. On est un sport mondial, qui rapporte des milliards dans le monde, et on se bat sur beaucoup de tournois au niveau des infrastructures...», a-t-il notamment relevé.
«Stan the Man» regrette également le manque de considération des tournois et des instances dirigeantes envers les joueurs, dont l’avis n’est pas assez pris en compte selon lui. «De l'extérieur, tu te dis que ce n'est pas normal ! Ça veut dire qu'on ne travaille pas ensemble», s’est-il révolté, en prenant en exemple la Coupe Davis.
La compétition ne fait plus l’unanimité depuis le changement radical de formule adoptée en 2018. Pourtant, et malgré les nombreuses critiques, la Fédération international de tennis (ITF) ne semble pas pressée de faire marche arrière. «J'ai demandé des news depuis février, à mon président de Fédération (ndlr : René Stammbach), à l'ITF et rien, rien. Ils parlent entre eux, ils vont prendre leurs décisions, et on verra. C'est inadmissible», a expliqué Wawrinka.
Un syndicat des joueurs ? Pas la solution
Ce dernier estime que la solution globale ne sera pas apportée par un syndicat. «Il ne faut pas un syndicat des joueurs, il faut des joueurs sur les tables de décision», a avancé le champion olympique de 2008 en double avec Roger Federer.
Avant de remettre en cause la pertinence d’une association de tennisman comme la PTPA, lancée par Novak Djokovic et Vasek Pospisil : «Qu'est-ce qu'elle a fait ? Pour l'instant pas grand-chose. Je vous demande, moi je ne sais pas. Pour l'instant, ils n'ont rien lancé de concret. Donc ce n'est pas un sujet».
Pour Stan Wawrinka, le changement n’est possible que d’une seule manière : inclure les acteurs du circuit ATP dans le processus de décision. «Je ne dis pas que les joueurs doivent décider. Ce n'est pas à eux de le faire. Mais ils doivent faire partie des décisions, ou des votes. Avoir des représentants aux tables de discussion», a-t-il conclu.