Faits divers A Sainte-Féréole, le boucher Louis raconte son «copain» Jacques Chirac

AFP

27.9.2019 - 11:15

«Quand j'étais à la boucherie, il venait couper sa viande lui-même»: dans le village de Corrèze où Jacques Chirac a passé ses vacances, l'ancien boucher Louis Jaubert, 93 ans, se souvient avec émotion de son grand ami au large appétit, un «phénomène».

A entendre M. Jaubert, c'est grâce à lui que la légende autour du plat fétiche de l'ancien président a démarré. «C'était au début des années 60 et Jacques venait d'être élu au conseil municipal de Sainte-Féréole. Il m'avait donné carte blanche pour le repas. J'ai fait de la tête de veau».

Assis dans sa petite cuisine, à la table même où Chirac «a mangé 50 fois», Louis Jaubert -la poigne encore ferme et le pas plutôt assuré- raconte son Chirac: le bon vivant, le fidèle, le Corrézien.

Sa maison jouxte le bistrot tenu par son fils Gérard. A moins de dix mètres de là, sur la place Pierre-Chaumeil, la demeure de famille des Chirac, en mauvais état, fait pâle figure dans ce joli village très minéral, premier fief corrézien de Jacques Chirac.

«J'ai perdu un copain», regrette Louis Jaubert, les yeux rougis, en feuilletant des articles de presse et des photos souvenirs. Là une pleine page d'un numéro de septembre 1976 d'Ici Paris qui titre: «Il va enfin retourner à la pêche avec son copain le boucher!«. C'était juste après sa démission du poste de Premier ministre de Valéry Giscard d'Estaing.

«Jeunes, on allait à la pêche à l'écrevisse pendant la nuit», avoue M. Jaubert. «C'était pas permis mais il y en avait tellement!»

Il y a aussi cette photo de 2001, quand Chirac avait détourné son convoi présidentiel depuis Tulle pour venir serrer la main à son copain de jeunesse: «Toute cette smala de bagnoles pour moi!»

«Quand il passait me voir, il s'arrêtait boire une bière, et même deux, il n'était pas avare de ça», souligne encore le nonagénaire.

- «Un farceur» -

Des jeunes années, Louis se souvient qu'il conduisait Jacques Chirac, de sept ans son cadet, au cinéma: «Il voulait aller voir Brigitte Bardot».

Puis quand il s'est piqué de politique, «Loulou» est devenu son «premier chauffeur officiel», s'amuse son fils Gérard, qui reste à ses cotés pour l'aider à reconstituer des souvenirs désormais lointains.

Et quand en 1967, le «grand Jacques» a voulu partir à l'assaut d'Ussel et devenir député de cette «ville rouge», Louis le boucher lui a carrément prêté sa voiture afin de faire campagne.

Boucher, Louis l'est resté jusqu'à ses 85 ans: «J'achetais les bêtes, je les tuais, je les découpais, je faisais ma charcuterie, je faisais mes tournées, je faisais tout, tout seul». Avec un oeil en moins, perdu pendant sa longue déportation par les Allemands en Yougoslavie, où l'armée de Tito l'a libéré.

De son ami, Louis Jaubert garde de le souvenir d'un «beau gars» et d'un homme «combatif», «curieux» et qui «s'adaptait à tout». «Un farceur qui aimait la rigolade», aussi.

«Ce qui faisait sa force, c'était sa façon d'apprendre le nom des gens et de les appeler par leur prénom», glisse-t-il. «Il avait une mémoire impressionnante».

«On voyait qu'il était humain» mais, pour autant, «s'il voulait vous dire merde, il vous le disait. Il ne faisait pas de ronds de jambes».

Son fils Gérard, ami d'enfance de Laurence, la fille aînée des Chirac décédée en 2016, évoque lui «un homme droit, intègre, sincère».

«Il a été un bon président», juge-t-il. «Il a marqué la France de son empreinte».

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