Des Kirghizes portent le chapeau traditionnel, lors de la Journée nationale du Ak-Kalpak à Bichkek, le 5 mars 2018
Des Kirghizes portent le chapeau traditionnel, lors de la Journée nationale du Ak-Kalpak à Bichkek, le 5 mars 2018
Défilé pour célébrer la fête nationale à Bichkek, le 5 mars 2018
Le chapeau a été au centre de festivités annuelles dans le pays
Au Kirghizstan, le chapeau, le chien et le président
Des Kirghizes portent le chapeau traditionnel, lors de la Journée nationale du Ak-Kalpak à Bichkek, le 5 mars 2018
Des Kirghizes portent le chapeau traditionnel, lors de la Journée nationale du Ak-Kalpak à Bichkek, le 5 mars 2018
Défilé pour célébrer la fête nationale à Bichkek, le 5 mars 2018
Le chapeau a été au centre de festivités annuelles dans le pays
Avec fierté, Toptchubek Tourgounaliev montre son couvre-chef en feutre blanc aux motifs noirs brodés, l'Ak-Kalpak, chapeau traditionnel du Kirghizstan qui déclenche aujourd'hui les passions dans ce pays d'Asie centrale... après avoir été porté par un chien.
"C'est un chapeau si simple et pourtant si parfait", assure à l'AFP M. Tourgounaliev, ancien conseiller présidentiel et désormais à la tête d'une association pour la préservation du patrimoine national. "Il protège à la fois du soleil et du froid".
L'Ak-Kalpak est constitué de quatre morceaux de feutre cousus entre eux dans une forme conique avec un rebord recourbé souvent de couleur noire. Il représente "les pics des magnifiques montagnes kirghizes, toujours couverts de neiges éternelles", affirme M. Tourgounaliev.
Ce chapeau, que les Kirghizes portent en ville comme à la campagne, en voiture comme à cheval, a été au centre de festivités annuelles lundi, notamment dans la capitale Bichkek.
Mais cette année, la Journée nationale du Ak-Kalpak a été assombrie par la volonté de certains parlementaires de voter une loi pénalisant tout "manque de respect" à ce couvre-chef traditionnel.
Ce texte, qui doit être discuté dans les mois à venir, obligerait les représentants des autorités, dont le président, à porter le chapeau lors des rencontres diplomatiques.
- Demain un porc ? -
Depuis qu'un chien a défilé coiffé du chapeau traditionnel lors d'un spectacle canin en décembre, le pays musulman peine à se remettre de l'émoi causé par ce scandale devenu national.
"Ils ont transformé un chien en Kirghiz et les Kirghizes en chien", avait alors lancé le député Ryskeldi Mombekov du parti social-démocrate au pouvoir, avant de fulminer: "Demain, un porc portera un Ak-Kalpak et le drapeau national servira de litière pour chat".
Pour Daniar Mourzaliev, organisateur d'un défilé lundi en l'honneur du chapeau, une loi est nécessaire pour éviter que ce type d'incidents "se reproduisent".
Il a cependant plaidé la clémence envers le chien et sa maîtresse, issue d'une minorité ethnique: "Bien sûr, c'était déplacé pour cette femme non-Kirghize de mettre un Kalpak sur un chien, mais je ne crois pas qu'elle voulait blesser qui que ce soit".
- La patrie "abandonnée" ? -
Si elle est adoptée dans sa version actuelle, la loi proposée par les députés donnerait à l'Ak-Kalpak le même statut qu'au drapeau et à l'hymne national.
Les amendes pour toute personne manquant de respect au chapeau irait jusqu'à 10.000 som kirghizes (120 euros), une somme importante pour la population de ce pays parmi les plus pauvres d'Asie centrale.
Les députés voudraient également restreindre voire interdire la vente d'Ak-Kalpak importés de Chine et ailleurs, ce qui pourrait fragiliser de nombreux commerçants.
Depuis son indépendance après la fin de l'URSS, le pays a connu deux révolutions et plusieurs épisodes de violences ethniques, ce qui a poussé les hommes politiques à porter une attention accrue aux questions d'identité nationale et de culture traditionnelle.
L'Ak-Kalpak est ainsi devenu de facto un symbole national en 2011, un an après la dernière révolte populaire ayant conduit à la destitution du chef d'Etat d'alors, Kourmanbek Bakiev, et à des affrontements ethniques provoquant la mort de centaines de personnes dans le sud du pays.
Le nouveau président Sooronbaï Jeenbekov --le premier élu dans ce pays à l'issue d'une transition pacifique-- a plusieurs fois porté en public l'Ak-Kalpak lors de sa campagne. Mais le couvre-chef est demeuré invisible depuis sa prise de fonction à l'automne.
Le président n'a pas commenté le projet de loi qui, sauf s'il est soutenu par deux tiers des députés, nécessitera sa signature pour être appliqué.
De son côté, M. Tourgounaliev espère que les députés "fassent ce pas en avant, cela signifiera qu'ils n'ont pas tous abandonné leur patrie".
D'autres, comme la députée du parti au pouvoir Aïnourou Altibaïeva, promettent déjà de voter contre cette loi.
"Faire pression sur les gens pour qu'ils respectent l'Ak-Kalpak est une mauvaise idée", a-t-elle déclaré à l'AFP: le respect du couvre-chef traditionnel doit simplement "faire partie de l'éducation de chaque enfant" kirghiz.
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