«Spectacle médiatique pathétique»C'était une fake news: aucune «liste noire» ne fait trembler Cannes
Red/AFP
14.5.2024
La rumeur émanait des réseaux sociaux et a pris une incroyable ampleur. La soi-disant «liste noire» du cinéma français n'existe pas. Mediapart dément fermement et condamne le fait que des médias, «y compris sérieux», aient relayé la fausse information sans la vérifier.
Red/AFP
14.05.2024, 10:39
14.05.2024, 10:41
Valérie Passello
Le Festival de Cannes tout comme le site d'investigation Mediapart ont démenti les rumeurs persistantes d'une «liste» de personnalités du cinéma mises en cause pour le type de faits dénoncés par la vague #MeToo.
Précisions de la rédaction de blue News
Nous souhaitons apporter une clarification concernant un article récent de notre rédaction sur cette soi-disant liste. Des rapports ont incorrectement suggéré que Mediapart s'apprêtait à publier une «liste» nominative d'auteurs présumés de violences sexuelles. En réalité, nous avons publié des rumeurs relatives à des allégations de violences sexuelles, tout en omettant délibérément de divulguer toute identité, conformément à nos principes éthiques et à notre engagement envers la protection de la vie privée.
Comme précisé dans l'article publié par blue News hier, il s'agissait d'une rumeur. Un site complotiste a allégué sur X (anciennement Twitter) que le média indépendant Mediapart s'apprêtait à publier une liste de dix noms de personnalités du cinéma impliquée dans des violences sexistes et sexuelles.
Or, il s'agit d'une fake news. «C’est faux, évidemment. Disons-le d’emblée : Mediapart ne publie pas de 'liste'», indique le média.
Mediapart souligne encore qu'en cas de publication de telles révélations, il s'agit du résultat d'enquêtes de longue haleine, reposant sur des faits recoupés. «Nous avons longuement hésité avant de rappeler ces évidences. Répondre à la rumeur, c’est prendre le risque de contribuer à lui donner de l’épaisseur et d’alimenter la machine à clics et à buzz qui pourrit le débat public et le champ médiatique» , commente encore le média indépendant.
«Paresse journalistique»
Mediapart revient en outre sur la manière dont la désinformation s'est répandue dans différents médias, déplorant la «paresse journalistique» et l'ampleur du «délire collectif». «À la veille de l’ouverture du Festival de Cannes, le spectacle médiatique est pathétique», juge le média d'investigation.
«Tout cela pourrait prêter à sourire. Simplement, en propageant cette rumeur, la presse contribue à se disqualifier», déplore la rédaction. Pis encore, l'affaire contribue, selon Mediapart, à décrédibiliser la vague #MeToo.
Or, le sujet des violences sexuelles est présent comme rarement dans tous les espris à l'ouverture de ce 77ème Festival de Cannes, sept ans après la chute du producteur américain Harvey Weinstein, et cinq mois après la prise de parole, en France, de Judith Godrèche.
La comédienne, qui a accusé les réalisateurs français Benoît Jacquot et Jacques Doillon de viols dans son adolescence, présentera mercredi un court métrage «Moi aussi», réalisé en hommage aux victimes.
«Son combat à Judith Godrèche, elle en fait un geste cinématographique, (...) pas un combat personnel», a souligné mardi le délégué général du Festival, Thierry Frémaux, sur la radio publique France Inter.
Un temps fort, au moment où 100 personnalités, dont de nombreuses actrices (Isabelle Adjani, Emmanuelle Béart, Juliette Binoche...) appellent à une loi intégrale contre les violences sexuelles en France.
«Ne pas oublier les remises en question profondes»
A Cannes, la maîtresse de cérémonie Camille Cottin a promis à l'AFP de ne pas oublier «les remises en question profondes» du métier.
«Il va y avoir des prises de paroles de personnalités fortes, puissantes, des femmes puissantes qui vont, elles aussi, porter une parole et qui sont des invitées importantes de cette cérémonie».
Si aucune des personnalités invitées n'a fait l'objet de mises en cause publiques, neuf femmes ont accusé, la plupart anonymement, le producteur français Alain Sarde, qui a produit des films de Bertrand Tavernier ou Jean-Luc Godard, de les avoir violées ou agressées sexuellement, révélait le magazine Elle lundi.
«Il n'y a pas deux choses séparées, le festival d'un côté et tout ce qui se passe autour», a estimé Camille Cottin, faisant également référence au mouvement social des petites mains du Festival de Cannes, qui demandent moins de précarité et protestent contre le durcissement du régime d'assurance chômage.