Justice VD Deux ans avec sursis pour un médecin vaudois

ATS

30.9.2019 - 20:24

Le médecin était jugé à Vevey à la suite du décès d'une de ses patientes en fin de vie, à laquelle il avait fait une injection létale (photo d'illustration).
Le médecin était jugé à Vevey à la suite du décès d'une de ses patientes en fin de vie, à laquelle il avait fait une injection létale (photo d'illustration).
Source: KEYSTONE/ADRIEN PERRITAZ

Un généraliste vaudois, accusé d’avoir fait une injection létale à une patiente de 86 ans semblant en fin de vie en 2015, a écopé lundi à Vevey (VD) d’une peine de deux ans de prison avec sursis. Le médecin de 44 ans, son avocat et ses proches sont soulagés.

Le Tribunal correctionnel d’arrondissement de l’Est vaudois est d’avis que, pour agir, le médecin «s’est convaincu que sa patiente était en fin de vie». Et ce, en se basant seulement sur la vision subjective du mari de celle-ci. Cet octogénaire jugeait en effet que son épouse était victime d’acharnement thérapeutique dans le centre universitaire de traitement et réadaptation de Sylvana, où elle était soignée depuis une chute.

Cette conviction ne correspond pas aux éléments médicaux fournis par les médecins de la disparue, a rappelé le Tribunal. Les juges pensent que c’est «principalement sinon exclusivement» pour euthanasier sa patiente que le médecin avait commandé le curare létal. Et non pas parce qu'il était amené à soigner des patients en fin de vie comme l’accusé l’avait avancé.

«Motifs honorables»

Le Tribunal a toutefois précisé qu’il existe trop de doutes pour affirmer que cette euthanasie active était planifiée. Les juges estiment que le prévenu a agi seul de manière assez présomptueuse et avec sentiment de supériorité, mais de manière à atténuer les souffrances de sa patiente.

«Il a franchi la ligne rouge séparant l’euthanasie active indirecte et directe», a relevé la présidente. Laquelle a jugé le risque de récidive inexistant et estimé que l’accusé avait agi «pour des motifs honorables «. C’est grâce à cela que la peine minimale de cinq ans d’emprisonnement prévue en cas de meurtre a pu être contournée.

Le prévenu n’a pas pris de renseignements auprès de ses collègues médecins avant de se décider, a encore relevé le Tribunal. Il aurait aussi agi sans aviser ni le mari, ni le fils, ni les médecins de sa victime. Il a de plus pris pour un consentement le fait que sa patiente lui aurait péniblement répondu «non Docteur» lorsqu’il lui avait proposé d’appeler le 144. Il lui avait ensuite injecté la drogue, puis signalé cette mort comme naturelle.

En 2012, la disparue avait signé une «directive anticipée» désignant son médecin et son fils comme personnes de confiance. Ce document précisait aussi qu’elle était contre tout acharnement thérapeutique. L’octogénaire n’était en revanche pas membre de l’organisation d’aide au suicide Exit. Au cours de son procès, l’accusé avait admis l’euthanasie active directe.

Verdict satisfaisant

Bien qu'il ait requis cinq ans de prison ferme contre le prévenu, le Procureur général Eric Cottier s'est dit satisfait du verdict. Il le juge «équitable et remettant l’église au milieu du village».

L'avocat du médecin, Me Stefan Disch, s’est de son côté félicité de ce «verdict avant tout humain et qui peut apaiser». Et de regretter que «notre législation n’est pas prête à une certaine évolution de la société face à des actes controversés qui peuvent choquer, mais dont certains ont besoin».

Il a encore souligné qu’à l’étranger, les choses avançaient sur l’euthanasie, comme par exemple en Hollande et en Belgique. «Dans une dizaine d’années, les lignes auront bougé et ce procès ne se serait pas terminé de cette façon», a-t-il pronostiqué.

Le généraliste, officiant à Pully (VD), s’est quant à lui dit soulagé à la sortie du Tribunal. Il a remercié la centaine de proches et de patients venus le soutenir lors de son procès, sans cependant vouloir en dire plus. Ces derniers, très émus, l’ont applaudi. Certains ont même pleuré.

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