Faits divers En Sibérie, la tournée de la factrice en «monster truck» à travers la taïga

AFP

22.8.2019 - 18:24

Seulement six personnes vivent à Pikhtovoïé, le petit village russe de Galina Ermolova, séparé du reste du monde par des kilomètres de taïga et de marécages.

Alors chaque semaine, la factrice grimpe sur son 4x4 géant et file à travers la forêt sibérienne en direction du bureau de poste le plus proche, pour récupérer le courrier de ses voisins, percevoir leurs retraites et faire leurs courses.

«On avait l'habitude d'y aller en tracteur. Cela nous prenait trois heures pour faire le trajet de 16 kilomètres», raconte la quinquagénaire, qui vit à Pikhtovoïé avec son mari.

Sa vie a changé il y a quelques mois. Le fils du couple leur a offert un tout-terrain transformé par un ami en quasi «monster truck» de compétition avec ses roues surdimensionnées.

Depuis, ils filent à travers la forêt sans crainte des ornières ou des énormes flaques de boue parsemant la route, en fait un chemin de terre s'enfonçant à travers les arbres.

Avec son mari au volant, cheveux au vent, Galina n'a plus besoin que d'une heure pour rejoindre Imchégal, une localité plus importante avec ses 100 habitants.

Les vaches errent autour du bureau de poste, l'un des seuls bâtiments en dur de ce village aux isbas de bois. Dans ce local servant aussi d'épicerie, Galina achète du sucre, de la lessive ou du shampoing qu'elle distribue à ses voisins une fois rentrée.

Dans les années 1980, environ 450 personnes vivaient encore à Pikhtovoïé, situé environ 300 kilomètres au nord d'Omsk, la principale ville de cette région de Sibérie occidentale.

Mais l'école a fermé durant la décennie suivante, et de fil en aiguille seuls les anciens sont restés.

Galina a successivement été institutrice, bibliothécaire puis vendeuse. «Quand tous ses métiers ont cessé d'exister, j'ai dû rejoindre le bureau de poste», se souvient-elle.

Galina et son mari, qui travaille dans l'industrie forestière, sont les seuls habitants de Pikhtovoïé ayant un travail: «Nous ne sommes que six ici. Pour moi, ce travail sert à parler à des gens».

Pour ses voisins, Galina Ermolova est bien plus qu'une factrice. A chaque trajet, elle rapporte en plus du courrier et des courses quelque chose de primordial: les nouvelles des alentours.

«Galia (le diminutif de Galina) se renseigne sur les nouvelles des villages voisins, sur ce qu'il s'est passé», précise Vladimir Negoïev, 58 ans, perché cigarette à la main sur une meule de foin. «Sinon, comment pourrait-on le savoir? On a la télé avec 120 chaînes, mais comment saurait-on ce qui se passe ici?»

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