Cargèse Funérailles de l'indépendantiste corse Yvan Colonna

ATS

25.3.2022 - 20:16

Des centaines de personnes sont venues dire adieu vendredi à Yvan Colonna dans le village corse de Cargèse (ouest). Le militant indépendantiste a été mortellement agressé par un codétenu dans la prison où il purgeait sa peine pour l'assassinat du préfet Erignac.

La Corse enterre Yvan Colonna, l'enfant du pays condamné pour l'assassinat d'un préfet

La Corse enterre Yvan Colonna, l'enfant du pays condamné pour l'assassinat d'un préfet

Des centaines de personnes sont venues dire adieu, vendredi, à Yvan Colonna, l'enfant du pays, mortellement agressé par un codétenu dans la prison où il purgeait sa peine pour l'assassinat du préfet Claude Erignac.

25.03.2022

Parmi la foule figuraient plusieurs personnalités politiques de l'île, dont le président autonomiste du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, l'ex-président indépendantiste de l'assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, ou encore Charles Pieri, ex-leader présumé du Front de libération nationale de la Corse (FLNC), un mouvement qui a récemment menacé de reprendre la lutte armée.

Yvan Colonna a été inhumé après une cérémonie religieuse dans le minuscule cimetière à l'entrée de Cargèse, dédié aux «familles Colonna», comme l'indique une plaque de marbre gris à l'entrée.

Juste avant l'inhumation, la foule rassemblée sur le chemin d'accès au caveau, à quelques mètres de la famille, a entonné le «Dio vi salvi Regina», l'hymne corse, puis des chants indépendantistes.

Un homme a regretté que «des chants de guerre» soient prononcés «devant un mort», mais la plupart des personnes présentes ont applaudi, répondant par des flots de «Viva Yvan!»

Parmi les 2000 à 3000 personnes réunies au plus fort de la journée, massées devant l'église et dans les ruelles du village, nombreux brandissaient des «banderas», le drapeau corse frappé de la tête de Maure. Le bleu-blanc-rouge était par contre invisible, «il est persona non grata», a expliqué un homme au crâne rasé.

Rapatriement refusé

Détenu à Arles, Yvan Colonna a été violemment agressé le 2 mars par un codétenu djihadiste condamné notamment pour terrorisme. Il est mort lundi à 61 ans dans un hôpital de Marseille après presque trois semaines de coma.

L'ancien berger avait été condamné par trois fois à la perpétuité pour l'exécution par balles du préfet Claude Erignac, en février 1998 à Ajaccio. Ce crime, qu'il a toujours nié, a été commis alors qu'une insurrection indépendantiste armée multipliait les actes de violence dans l'île.

Yvan Colonna demandait depuis des années à purger sa peine en Corse, mais se heurtait à une fin de non-recevoir de l'Etat. Son agression a soulevé une vague de colère en Corse. Des heurts violents entre manifestants et forces de l'ordre ont fait des dizaines de blessés.

Beaucoup de Corses estiment qu'en refusant cette demande, l'Etat a une part de responsabilité. D'où le slogan «Etat français assassin» largement présent dans les manifestations des dernières semaines.

«Qu'on le laisse tranquille»

«Yvan, il voulait vraiment revenir dans son île, pour que son île vive, soit respectée. Il voulait revenir dans sa bergerie et qu'on le laisse tranquille», explique Christine Flori, une visiteuse de prison de 69 ans, qui tenait à être là pour dire adieu à celui qu'elle a rencontré une fois par mois pendant 12 ans, et qu'elle considère comme innocent.

En témoignage de «solidarité», un parti autonomiste avait appelé à mettre tous les drapeaux en berne et à observer une minute de silence à 15h00. La mise en berne mardi par la collectivité de Corse des trois drapeaux – corse, français et européen – ornant sa façade avait pourtant été dénoncée comme «une faute» par le président Emmanuel Macron.

Jeudi, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin y avait vu lui «une sorte d'insulte pour la famille Erignac, pour l'Etat français, pour les représentants de l'Etat».

La mort d'Yvan Colonna a aussi fait ressurgir la question de l'autonomie, évoquée par le gouvernement français, pour cette île-région de 340'000 habitants. Depuis l'annonce du décès d'Yvan Colonna, c'est toutefois le recueillement qui a prédominé sur l'île.