Un journaliste de 20 Minutes a été auditionné mardi par le Tribunal de police de Neuchâtel pour insoumission à une injonction de la justice, dans l’affaire du double assassinat des Verrières. Un huis clos partiel avait été prononcé pour protéger une victime.
«Cette affaire peut paraître banale mais il s'agit de juger la question de la censure de la presse», a déclaré Me Kevin Guillet, avocat du journaliste de 20 Minutes lors de sa plaidoirie. L'injonction de la présidente du tribunal, demandant aux journalistes de ne pas révéler une information, ne repose «sur aucune base légale».
Lors de l'audience de mars du Tribunal criminel du Littoral et du Val-de-Travers à Boudry (NE), la présidente de la Cour, Estelle Mathis Zwygart avait ordonné un huis clos partiel et demandé aux médias – les seuls autorisés à assister aux débats – de pas dévoiler un élément de contexte familial pour protéger une victime. Pour le journaliste, cet aspect était au contraire pertinent pour comprendre la gravité des faits.
Avec retenue
Selon lui, cette information était nécessaire car elle a pesé sur le verdict de 20 ans de prison ferme et la qualification d'assassinat. De plus, le journaliste estime avoir écrit avec retenue et en conformité avec la déontologie. «Les faits étaient sordides et dignes d'un film d'horreur et je suis resté sobre», a-t-il déclaré.
Cité comme comme témoin, le président du Conseil suisse de la presse, Dominique von Burg, est du même avis. «Le journaliste a agi de manière proportionnée et sobre. Il n'a pas mis en avant cet aspect de contexte familial mais l'a simplement mentionné en bas de l'article».
Devoir d'information accru
Selon Dominique von Burg, la déontologie oblige à faire une pesée d'intérêts entre le droit à l'information et la protection des victimes. «On ne souhaite pas qu'un journaliste fasse étalage de tout ce qui est sordide, mais dans ce cas, la valeur informative l'emportait sur la protection de la victime».
Le président du Conseil suisse de la presse a rappelé que «rendre la justice de manière publique est fondamentale pour la démocratie. Les restrictions doivent être très rares et répondre à un intérêt public très important». Lors d'un huis clos partiel, «le rôle du journaliste est encore plus important et son devoir d'information est accru».
Lors de l'audience, l'accusé s'est aussi étonné que l'avocat de la famille de la victime n'ait pas demandé de retirer ou de corriger l'article en ligne. «Aucune mesure judiciaire dans ce sens n'a été prise», a rappelé Me Kevin Guillet. Le verdict de ce procès sera publié le 17 décembre à 11h00.
L'affaire du double assassinat des Verrières sera de nouveau traitée par la justice prochainement puisque le Ministère public et le prévenu ont fait appel. En première instance, l'accusé avait écopé de 20 ans ferme pour avoir tué son ex-compagne et le nouvel ami de celle-ci.
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