Ils veulent siéger au Capitole «L'Etat de l'ombre m'a arraché des bras de ma femme et de mes enfants»

AFP

24.4.2024

Le 6 janvier 2021, Derrick Evans participait à l'assaut du Capitole à Washington avec des centaines de partisans de Donald Trump n'acceptant pas sa défaite à la présidentielle. Trois ans plus tard, il est aujourd'hui candidat pour siéger dans l'institution même qu'il a assiégée.

Des émeutiers du Capitole veulent aujourd'hui s'y faire élire.
Des émeutiers du Capitole veulent aujourd'hui s'y faire élire.
ats

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Comme lui, ils sont près d'une dizaine à travers les Etats-Unis à briguer un mandat électoral en 2024, après avoir pris part à cet événement qui a ébranlé la démocratie américaine.

Le Capitole, siège du Congrès américain, avait été envahi il y a trois ans par des partisans de Donald Trump afin de tenter d'y empêcher la certification de la victoire de son adversaire démocrate Joe Biden. Le président républicain répétait alors à l'envi, sans preuves, que l'élection lui avait été «volée».

Ce jour-là Derrick Evans, qui est alors élu de l'assemblée de l'Etat de Virginie-Occidentale, se filme - casque sur la tête - entrant dans le bâtiment du Congrès et scandant «liberté».

Des actes qui amèneront ce trentenaire à être poursuivi pour troubles à l'ordre public, et condamné à trois mois de prison après avoir plaidé coupable.

Aujourd'hui candidat aux primaires républicaines en Virginie-Occidentale, Etat minier et très conservateur de l'est du pays, Derrick Evans a fait de l'événement une pièce maitresse de sa campagne.

«Chasseurs»

En arrivant sur son site, la couleur est ainsi annoncée d'emblée: «Prisonnier du 6-Janvier candidat au Congrès». Tout comme sur sa page de levée de fonds: «Quand je siégerai au Congrès, nous inverserons les rôles et les chasseurs deviendront les chassés.»

Lors d'une interview à l'AFP, le candidat n'hésite pas à se décrire comme un «prisonnier politique». «L'Etat de l'ombre est venu chez moi et m'a arraché des bras de ma femme et de mes quatre enfants», affirme cet investisseur en immobilier, en référence à la théorie du complot qu'il existerait une administration souterraine détenant le pouvoir décisionnel sur la société américaine. Derrick Evans n'est pas le seul à utiliser l'assaut du Capitole comme argument de campagne.

Candidat aux primaires républicaines du New Hampshire (nord-est) pour un poste au Congrès, Jason Riddle affirme également être «un prisonnier politique du 6-Janvier», «récemment libéré et avec un message d'espoir».

Donald Trump lui-même en a fait un élément central dans sa tentative de retourner à la Maison Blanche, promettant notamment d'amnistier certains de ses partisans emprisonnés s'il revenait au pouvoir.

Comme un moyen de se réapproprier l'événement dans le but de dénoncer une «persécution politique», à l'instar de celle dont il dit faire l'objet avec ses procès pénaux.

«Deux options»

Lorsque l'on demande à Derrick Evans pourquoi il a choisi de mettre en avant son implication dans l'assaut du Capitole, il répond: «Ce n'est pas moi (qui l'ai choisi). Ce sont les médias +fake news+». «J'avais deux options», ajoute-t-il, «je pouvais soit éviter le sujet, soit m'en emparer; j'ai choisi de m'en emparer».

Son seul regret, «c'est d'avoir cru que nous avions des droits naturels donnés par Dieu de liberté d'expression, et que nous avions toujours une constitution dans ce pays».

Selon le candidat, les électeurs de Virginie-Occidentale qu'il rencontre n'ont cure de sa condamnation. « Quand ils découvrent que je suis l'élu arrêté pour le 6-Janvier, ils me serrent la main, me remercient, et me disent qu'ils vont voter pour moi.

Aux primaires républicaines pour la première circonscription de Virginie-Occidentale le 14 mai, il fera face à l'élue sortante Carol Miller, également pro-Trump.

Derrick Evans a déjà reçu le soutien de plusieurs responsables conservateurs, dont l'élu au Congrès Bob Good, mais aussi d'anciens conseillers de Donald Trump comme Roger Stone ou le général Michael Flynn.

A un mois du scrutin, il dit s'attendre à un résultat serré. Et pour la présidentielle de novembre, Derrick Evans envisage avec difficulté une défaite de Donald Trump. «Si Joe Biden est à nouveau choisi et remis à la Maison Blanche, alors je vais apprendre à ma famille comment vivre comme des Amish», à l'écart de la civilisation moderne, «et à se préparer pour l'effondrement du pays», assène-t-il.