Plus de 100 morts A Gaza, une distribution d'aide alimentaire tourne au cauchemar

AFP

29.2.2024

Une population affamée, de l'aide enfin livrée et des soldats «menacés»: plus d'une centaine de personnes ont perdu la vie jeudi, selon le Hamas, dans une distribution d'aide alimentaire qui a tourné au cauchemar à Gaza, entre piétinements et tirs à balles réelles.

Après bientôt cinq mois de guerre entre Israël et le mouvement islamiste, l'ONU estime que 2,2 millions de personnes, soit l'immense majorité de la population, sont menacées de famine (image d'illustration).
Après bientôt cinq mois de guerre entre Israël et le mouvement islamiste, l'ONU estime que 2,2 millions de personnes, soit l'immense majorité de la population, sont menacées de famine (image d'illustration).
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29.2.2024

Jeudi à l'aube, des milliers de personnes s'agglutinaient sur la rue al-Rashid, près du «rond-point de Naplouse», dans l'ouest de Gaza, principale ville du nord de la bande de Gaza, où des Palestiniens ont raconté avoir été forcés ces derniers jours à manger du fourrage animal ou à abattre des animaux de trait, pour se nourrir.

Selon des témoins et les services de santé de Gaza, les militaires israéliens postés à proximité pour protéger le convoi d'aide ont ouvert le feu sur cette foule qui se précipitait sur les camions, une trentaine selon l'armée israélienne, à leur arrivée sur place.

Précipitation et bousculades

«Alors que le convoi (parti du sud de Gaza) est entré dans le nord, des milliers de personnes se sont précipitées sur les camions, ce qui a provoqué une bousculade dans laquelle des dizaines de Gazaouis ont été blessés et tués, certains d'entre eux renversés par des camions», a indiqué un responsable de l'armée.

Puis, une partie du convoi a poursuivi son chemin, mais des «dizaines» de civils ont foncé sur les camions, et se sont rendus à proximité des forces israéliennes sur place qui ont tiré des «coups de semonce» avant «d'ouvrir le feu», a poursuivi ce responsable militaire.

«Il s'agissait de tirs restreints (...), il ne s'agissait pas d'un événement massif de notre point de vue», a-t-il ajouté. L'armée a fait état de «dizaines de morts et de blessés», bousculés ou piétinés par la foule qui a «encerclé les camions et pillés» les cargaisons, mais pas de bilan des tirs.

Sur X, l'armée israélienne a partagé une vidéo qu'elle a présentée comme une vue aérienne de la situation.

«Payé de notre sang»

«Nous étions dans la rue al-Rachid, et soudain des chars nous ont pris d'assaut. Il y avait des colis remplis d'aide. Les gens, à cause du manque de nourriture et de farine ont foncé pour les récupérer. C'était le chaos, il y avait des foules de gens, mais les forces d'occupation continuaient à nous tirer dessus, il y a eu tant de martyrs et de victimes», a déclaré à l'AFP un témoin refusant de révéler son identité.

«Je suis l'un des blessés, j'étais dans la rue al-Rachid. Nous étions debout pour obtenir de la nourriture pour nos enfants (...). Mais nous avons payé cette aide de notre sang», a indiqué un autre témoin.

Des cadavres ont été transportés à l'aide d'une charrette tirée par un âne le long de la route longeant la côte de la bande de Gaza, selon un collaborateur de l'AFP sur place. Dans un communiqué conjoint les factions palestiniennes ont dénoncé un «crime odieux sur des civils sans défense».

Plus de 2 millions de personnes menacées de famine

Ces dernières semaines, les organisations humanitaires ont tiré la sonnette d'alarme sur la situation humanitaire à Gaza. L'ONU estime que 2,2 millions de personnes, soit l'immense majorité de la population, sont menacées de famine. Dans le nord, les destructions, les combats et les pillages rendent presque impossible l'acheminement de l'aide humanitaire.

Selon l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), un peu plus de 2300 camions d'aide sont entrés dans la bande de Gaza au mois de février, soit une moyenne de quelque 82 camions par jour. En comparaison, ce chiffre était estimé à 500 camions par jour avant le début de la guerre.