L'ex-président péruvien Alan Garcia s'est suicidé mercredi à Lima juste avant son arrestation dans le cadre du scandale de corruption Odebrecht, dernier rebondissement dramatique de ce dossier tentaculaire éclaboussant la classe politique latino-américaine.
«Alan Garcia est décédé», a déclaré Omar Quesada, secrétaire général du parti de l'ex-dirigeant. L'actuel chef de l'Etat péruvien Martin Vizcarra s'est dit sur Twitter «consterné par le décès de l'ex-président Alan Garcia. Je transmets mes condoléances à sa famille et à ses proches», a-t-il écrit.
M. Garcia, qui était âgé de 69 ans et qui avait dirigé le pays andin de 1985 à 1990 puis de 2006 à 2011, s'est tiré une balle dans la tête alors que la police venait d'arriver à 6h30 locales à son domicile de Lima pour l'arrêter.
Expliquant qu'il allait appeler son avocat, «il est entré dans sa chambre et a fermé la porte. Quelques minutes après, un coup de feu a été entendu et la police l'a retrouvé assis avec une blessure à la tête», a expliqué le ministre de l'Intérieur Carlos Moran lors d'une conférence de presse.
L'ancien président a alors été transféré vers l'hôpital Casimiro Ulloa dans le quartier huppé de Miraflores où il est décédé malgré les efforts des médecins.
La police venait l'arrêter pour le placer en détention provisoire à la demande de la justice dans une affaire de blanchiment d'argent présumé liée au scandale Odebrecht.
Pots-de-vin
Ce géant brésilien du bâtiment a distribué pendant plus d'une décennie un total de 788 millions de dollars dans une dizaine de pays à travers la région pour remporter des contrats, selon le ministère américain de la Justice (DoJ). L'entreprise a reconnu avoir versé 29 millions de dollars de pots-de-vin au Pérou entre 2005 et 2014.
Mardi, M. Garcia avait déclaré que cette fois il ne se cacherait pas et ne demanderait pas d'asile, en référence à sa tentative ratée du mois de décembre. Fin 2018, il avait demandé l'asile à l'Uruguay en restant 16 jours dans l'ambassade de ce pays à Lima. Montevideo avait rejeté sa demande après examen de son dossier.
Le parquet péruvien soupçonne M. Garcia et 21 autres personnes d'avoir fait en sorte que l'entreprise néerlandaise ATM Terminals remporte en 2011 une concession portuaire, alors qu'il était président.
Ces dernières semaines, l'ancien dirigeant s'était défendu en affirmant «qu'il n'existait aucune dénonciation, preuve ou transfert (d'argent) qui (le) lierait à un quelconque fait répréhensible et encore moins avec l'entreprise Odebrecht où à un de ses chantiers».
Né en 1949 à Lima, dans une famille de la classe moyenne et de militants de l'APRA (parti social-démocrate), Alan Garcia devient en 1978 le plus jeune député élu à l'Assemblée Constituante, puis le plus jeune président du Pérou, à 36 ans en 1985. Il est réélu en 2006.
Ce colosse de 1,93 mètre a longtemps bénéficié de l'aura du persécuté politique, acquise lorsque, recherché par la police du président Alberto Fujimori en 1992, il s'était enfui par les toits de sa maison pour gagner l'ambassade de Colombie.
Installé en France
Réfugié un temps à Bogota, il s'installe ensuite en France, où il effectue une partie de ses études, complétées à Madrid par un doctorat en droit afin de devenir avocat.
Parlant parfaitement français, Alan Garcia se lie à Paris avec la famille du président François Mitterrand et reçoit durant son exil le soutien du Parti socialiste français.
Alejandro Toledo (2001-2006), Alan Garcia, Ollanta Humala (2011-2016) et Pedro Pablo Kuczynski: les quatre derniers chefs de l'Etat péruvien sont dans le collimateur de la justice pour cette même affaire Odebrecht, de même que la chef de file de l'opposition Keiko Fujimori, qui a été placée en détention provisoire le 31 octobre.
Mercredi dernier, c'est l'ex-président Pedro Pablo Kuczynski (2016-2018) qui a été placé en détention provisoire pour dix jours.
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