Les Chiliens tentaient de reprendre leurs activités lundi, après trois jours d'émeutes et de pillages qui ont fait onze morts. De longues files d'attente se sont formées pour tenter de s'approvisionner en essence et en denrées diverses, dans un climat toujours tendu.
Après trois jours d'émeutes et de pillages, le pays redoutait de nouvelles violences dans la pire explosion sociale depuis des décennies. Le pays est jugé «en guerre» par son président Sebastian Piñera.
Les étudiants ont appelé à de nouvelles manifestations pour lundi. Les quelque 7,6 millions d'habitants de la capitale chilienne ont vécu leur deuxième nuit consécutive sous couvre-feu après trois jours d'émeutes et de pillages qui ont fait onze morts.
Onze morts
«Nous avons eu trois morts avant-hier (samedi) et huit hier dimanche», a déclaré à des journalistes la gouverneure de Santiago, Karla Rubilar, révisant à la hausse un précédent bilan de sept morts. Au moins trois personnes ont également été grièvement blessées.
L'état d'urgence en vigueur depuis vendredi soir dans la capitale concerne dorénavant neuf autres des 16 régions du pays. Près de 10'000 policiers et soldats ont été déployés. C'est la première fois que des militaires patrouillent dans les rues depuis la fin de la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990).
Selon les autorités, 1462 personnes ont été arrêtées, dont 644 dans la capitale et 848 dans le reste du pays.
«Paix et calme»
«La ville est en paix et calme», a déclaré tôt lundi le général Javier Iturriaga, chargé vendredi de la sécurité publique par le président Pinera, après avoir survolé la capitale chilienne, dans une volonté marquée d'apaisement après les déclarations dimanche soir du chef de l'Etat.
«Nous sommes en guerre contre un ennemi puissant, implacable, qui ne respecte rien ni personne et qui est prêt à faire usage de la violence et de la délinquance sans aucune limite», avait déclaré M. Piñera. Quelques jours avant la crise, il qualifiait son pays d'«oasis» de stabilité en Amérique latine.
Les manifestations ont débuté vendredi pour protester contre une hausse -de 800 à 830 pesos (environ 1,10 franc)- des tickets de métro. Cette mesure a finalement été suspendue samedi par M. Piñera.
Colère face aux inégalités
Les émeutes se sont toutefois poursuivies, nourries par la colère face aux conditions socio-économiques et aux inégalités dans ce pays loué pour sa stabilité économique et politique, mais où l'accès à la santé et à l'éducation relèvent presque uniquement du secteur privé.
«On pouvait le voir venir. Le gouvernement n'a rien fait, ce n'est pas seulement le billet de métro qui a déclenché cette situation et qui a mené au vandalisme. Le gouvernement doit prendre des mesures énergiques pour améliorer les salaires, la santé et les retraites», a déclaré lundi Carlos Lucero, 30 ans, un vendeur de sandwiches dans le centre de la capitale.
Bus et stations de métro ont été particulièrement ciblés par les manifestations violentes, outre des dizaines de supermarchés, de véhicules et de stations-service saccagés ou incendiés. Le métro, par lequel transitent environ trois millions de passagers par jour, est fermé depuis vendredi après le saccage de 78 stations et des dégâts évalués à plus de 300 millions de dollars. Seule l'une des sept lignes a rouvert lundi.
Gilets jaunes
Des files d'attentes étaient aussi visibles aux arrêts de bus dont le réseau n'a repris que partiellement. De nombreux employés ont renoncé à se rendre à leur travail et les cours ont été suspendus dans la quasi totalité des écoles et universités de la capitale
Dans plusieurs quartiers de Santiago, des habitants s'étaient organisés pour éviter de nouveaux saccages. Avec l'autorisation des forces de l'ordre, ils ont monté une garde de nuit devant des magasins et effectué des rondes, armés de bâton et vêtus de gilets jaunes à l'image du récent mouvement social en France.
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