Etats-Unis Trump a bien demandé d'enquêter sur Biden

ATS

25.9.2019 - 23:50

«Pas de pression, rien du tout»: Donald Trump a contesté mercredi toute irrégularité après la publication du contenu d'un échange dans lequel il demande à son homologue ukrainien d'enquêter sur son rival Joe Biden. Les démocrates jugent la conversation «accablante».

La transcription de cet échange, sur la base de notes, jette une lumière crue sur la relation asymétrique entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky, un novice en politique élu en avril à la tête d'un pays très dépendant de l'aide américaine. Elle met aussi en difficulté le 45e président américain, désormais menacé par une procédure de destitution explosive.

Visiblement fatigué, presque abattu, il a tenté de poser en président actif sur tous les fronts diplomatiques, pendant que ses adversaires démocrates, animés par un désir de revanche, s'acharnaient selon lui dans des «chasses aux sorcières» sans fin.

«Une destitution pour ça ? C'est une blague!«, a-t-il lancé lors d'une conférence de presse dans un hôtel new-yorkais, proche du siège des Nations unies. «Les démocrates ont fait ça durant le semaine des Nations unies, c'était tout planifié...«, a-t-il avancé.

«Beaucoup de gens veulent savoir»

Après avoir souligné que son pays «a été très très bon à l'égard de l'Ukraine» sans que cela ait été «forcément réciproque», Donald Trump évoque Joe Biden, parmi les favoris de la course à l'investiture démocrate pour la présidentielle de 2020, et les affaires en Ukraine de son fils Hunter. «Beaucoup de gens veulent en savoir plus sur le sujet, donc cela serait formidable si vous pouviez vous pencher dessus», dit-il à Volodymyr Zelensky.

Donald Trump propose à son homologue ukrainien de travailler en coopération avec son avocat Rudy Giuliani, «un homme très respecté» et avec le ministre américain de la Justice Bill Barr. Il précise que tous deux vont se mettre en contact avec lui prochainement.

Dans son échange, Donald Trump ne brandit pas de menace concrète et ne propose pas directement de contrepartie. Mais il invite le président ukrainien à la Maison Blanche aussitôt après avoir écouté sa réponse sur Joe Biden.

Mercredi, Donald Trump a assuré que cet échange était parfaitement «anodin» et qu'il n'avait exercé «aucune pression» sur M. Zelensky. «Ce fut un bon échange téléphonique, normal», a abondé M. Zelensky lors de sa première rencontre avec M. Trump, à New York. «Personne n'a fait pression sur moi», a-t-il encore assuré, tout en soulignant ne pas vouloir «être impliqué dans les élections aux Etats-Unis».

«Chef mafieux»

Mais les démocrates ont jugé que la transcription reflétait «sans ambiguïté un abus choquant et accablant de la fonction présidentielle pour un gain politique personnel».

«C'est comme cela qu'un chef mafieux parle: 'Qu'avez-vous fait pour nous? Nous en avons tellement fait pour vous, mais cela n'est pas très réciproque. J'ai un service à vous demander'«, a relevé l'un de leurs dirigeants, le représentant Adam Schiff.

A quelque 400 jours du scrutin, les démocrates ont lancé mardi la première étape de la mise en accusation du président, une procédure qui a peu de chances d'aboutir à sa destitution, mais jette une ombre sur sa campagne de réélection. Ils le soupçonnent d'avoir gelé une aide de près de 400 millions de dollars destinée à Kiev pour forcer le président ukrainien à l'aider. Dans l'échange téléphonique, Donald Trump ne mentionne pas cette aide.

Auditionner le lanceur d'alerte

De leur côté, les élus démocrates de la Chambre des représentants tentaient d'organiser l'audition d'un lanceur d'alerte, membre des services de renseignement, à l'origine du scandale. Ils doivent également entendre jeudi le directeur du renseignement national, Joseph Maguire, qui avait refusé de leur transmettre le signalement rédigé par cet agent.

Leur but ? Réunir le maximum d'informations pour étayer leur dossier de mise en accusation («impeachment») avant de passer au vote. Compte tenu de la majorité démocrate à la Chambre, Donald Trump risque bien d'être mis en accusation, ce qui n'est arrivé qu'à deux de ses prédécesseurs. Le Sénat, où les républicains sont majoritaires, devra ensuite instruire le «procès» du président et rendre son verdict à une majorité des deux-tiers.

Donald Trump a assuré mercredi qu'il soutenait «pleinement la transparence» sur le «soi-disant lanceur d'alerte». Il a néanmoins immédiatement contre-attaqué en indiquant qu'il insistait aussi pour qu'il y ait «transparence sur Joe Biden et son fils Hunter», concernant «les millions de dollars qui ont été rapidement et facilement sortis d'Ukraine et de Chine lorsqu'il était vice-président».

Convaincre 20 sénateurs républicains

Pour que le milliardaire soit destitué, les démocrates devraient convaincre 20 sénateurs républicains, ce qui paraît improbable. L'un d'eux, le modéré Mitt Romney, a jugé mercredi que l'échange entre MM. Trump et Zelensky était «profondément préoccupant».

La bataille qui s'engage sera farouche et les deux camps jouent gros. Les débats vont sans doute galvaniser la base militante des deux partis, mais rien ne permet de prédire leur impact sur les électeurs indépendants, soulignent les analystes.

La cheffe des démocrates au Congrès Nancy Pelosi a longtemps repoussé les appels de l'aile gauche du parti à s'engager dans cette voie, par crainte que la bataille politique n'occulte les grands sujets de la campagne, comme l'économie et la santé. Mais «non, on ne peut pas demander de l'aide à un gouvernement étranger pour gagner une élection, ce n'est pas bien», a-t-elle tweeté mercredi.

Se montrer trop pugnace pourrait se retourner contre les démocrates. Donald Trump a estimé mardi que la procédure le visant aurait un effet «positif» sur sa campagne.

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