Décollage de la fusée SpaceX Falcon 9 et de la capsule Crew Dragon, le 30 mai 2020 au centre spatial Kennedy, en Floride
Décollage d'une fusée Soyouz MS-16 transportant les membres de la Station spatiale internationale (ISS), le 9 avril 2020 à Baïkonour
Le président américain Donald Trump au centre spatial Kennedy de la NASA, au Cap Canaveral, après le lancement de la fusée SpaceX emportant deux astronautes américains vers l'ISS, le 30 mai 2020
Le président russe Vladimir Poutine, le 28 mai 2020 à la résidence de Novo-Oragyovo, près de Moscou
SpaceX sonne la fin du monopole spatial russe
Décollage de la fusée SpaceX Falcon 9 et de la capsule Crew Dragon, le 30 mai 2020 au centre spatial Kennedy, en Floride
Décollage d'une fusée Soyouz MS-16 transportant les membres de la Station spatiale internationale (ISS), le 9 avril 2020 à Baïkonour
Le président américain Donald Trump au centre spatial Kennedy de la NASA, au Cap Canaveral, après le lancement de la fusée SpaceX emportant deux astronautes américains vers l'ISS, le 30 mai 2020
Le président russe Vladimir Poutine, le 28 mai 2020 à la résidence de Novo-Oragyovo, près de Moscou
C'est la fin d'un monopole: après le vol du groupe privé américain SpaceX, les Russes ne sont plus les seuls à envoyer des cosmonautes vers l'ISS, ce qui devrait pousser le programme spatial russe à se réinventer, estiment des experts.
Les deux astronautes de la Nasa transportés par la capsule de SpaceX sont entrés dimanche dans la station spatiale internationale (ISS), après un vol de 19 heures.
Cette mission est une première depuis l'arrêt, en 2011, des vols de navettes américaines vers l'ISS, qui a laissé aux fusées russes Soyouz, plus sûres et moins chères, l'exclusivité des vols habités.
Pendant neuf ans, les pensionnaires de l'ISS sont tous partis du cosmodrome russe de Baïkonour, après avoir suivi des entraînements en Russie et appris la langue de Pouchkine.
- «Le trampoline fonctionne»-
Bonne joueuse, l'agence spatiale russe Roskosmos a «salué» le décollage de la fusée de SpaceX, son directeur exécutif pour les vols habités, Sergueï Krikaliov, estimant que «le succès de cette mission va nous apporter de nouvelles opportunités».
«Le trampoline fonctionne», a plaisanté dimanche lors d'une conférence de presse le fondateur de SpaceX, Elon Musk, un message humoristique adressé au patron de Roskosmos.
Ce dernier, Dmitri Rogozine, avait affirmé en 2014, lors d'une période de tension, alors que Moscou menaçait d'interrompre la coopération spatiale avec Washington, que les spationautes américains pourraient bien avoir besoin d'un «trampoline» pour rejoindre l'ISS.
L'allusion a enflammé les réseaux sociaux russes, de nombreux «memes» internet et blagues ridiculisant Dmitri Rogozine étant publiées.
Le phénomène a même forcé son porte-parole à s'exprimer. «Nous ne comprenons pas vraiment l'hystérie déclenchée par le lancement réussi de la capsule Crew Dragon», a écrit sur Twitter Vladimir Oustimienko. «Ce qui aurait dû arriver il y a longtemps est arrivé».
M. Oustimienko a également annoncé que la Russie allait tester «deux nouvelles fusées» cette année et reprendre son programme lunaire «l'an prochain».
Le patron de Roskosmos avait affirmé la veille que la Russie prévoyait à l'automne un lancement test d'une fusée lourde Angara, censée remplacer les vieillissants lanceurs Proton, et qu'elle accélérait le développement de son missile balistique intercontinental Sarmat, présenté comme pouvant surmonter toute défense antimissile.
- Le coup est rude -
Le coup reste néanmoins rude. «Ces vols (opérés par la Russie) étaient une chance inespérée pour Moscou de continuer sa production de Soyouz et conserver un poids dans les négociations sur l'ISS», souligne Isabelle Sourbès-Verger, chercheuse française du Centre national de recherche scientifique (CNRS), spécialiste des politiques spatiales.
Roskosmos en a aussi profité financièrement, facturant à la NASA chaque place vers l'ISS environ 80 millions de dollars.
Si SpaceX transporte désormais les astronautes américains, «la perte annuelle pourrait dépasser les 200 millions de dollars, une somme significative pour Roskosmos et son budget d'environ deux milliards», calcule Andreï Ionine, expert à l'Académie spatiale Tsiolkovski de Moscou.
Alors qu'Elon Musk dit facturer 60 millions de dollars la place, Dmitri Rogozine de Roskosmos a annoncé qu'il s'efforçait de baisser ses prix de 30%.
«SpaceX économise en utilisant des moteurs bon marché et en produisant quasiment toutes ses pièces. En Russie, cela nécessiterait de changer le processus de production», commente Andreï Ionine, sceptique.
- «Réveil» -
Au-delà de ces questions, l'arrivée de SpaceX doit servir de «réveil» pour un secteur spatial russe «dans une situation bien pire que ce qu'admettent les dirigeants”, estime M. Ionine.
S'il y a 10 ans Moscou réalisait la majorité des lancements orbitaux, ce n'est plus le cas aujourd'hui, face aux fusées chinoises et de SpaceX.
«Quand on perdait le marché des lancements, Roskosmos disait que tout allait bien car nous étions les seuls à emmener des gens vers la station. Maintenant cette feuille de vigne est tombée», constate Andreï Ionine.
Le secteur est toujours fragilisé par la corruption, en témoignent les scandales autour de la construction du nouveau cosmodrome de Vostochny, en Extrême-Orient.
Par ailleurs, faute de moyens et de réelle volonté politique, il n'innove pas. Le programme russe se focalise sur le perfectionnement «de technologies soviétiques», rappelle Andreï Ionine.
Or la montée en puissance de sociétés privées comme SpaceX, qui ambitionne de conquérir Mars, promet un bond technologique difficile à rattraper.
Pour rester en lice, Andreï Ionine recommande la définition d'une stratégie par une instance indépendante des acteurs du secteur spatial russe.
«Le président américain (Donald) Trump a rétabli un organe, le National Space Council, pour fixer ces objectifs politiques. Il nous faudrait la même chose», affirme M. Ionine.
Des observateurs notent toutefois un manque de volonté du président russe Vladimir Poutine, visiblement plus concentré sur le développement des capacités militaires, notamment les missiles high-tech hypersoniques.
«Pour Poutine, la cosmonautique n’est pas une priorité pour démontrer la puissance de l'Etat», résume le journaliste spécialisé Vitali Egorov.
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