Des règles strictes Pourquoi le DDPS ne vend pas ses vieux bunkers à des particuliers?

tafi

17.10.2020

Le DDPS veut faire des économies en vendant des installations militaires désaffectées – mais les particuliers ne peuvent que rarement réaliser leur rêve d’avoir leur propre bunker. (Image symbole)
Le DDPS veut faire des économies en vendant des installations militaires désaffectées – mais les particuliers ne peuvent que rarement réaliser leur rêve d’avoir leur propre bunker. (Image symbole)
KEYSTONE/Arno Balzarini

L’armée veut se débarrasser de ses bunkers désaffectés. Les lance-mines de forteresse autrefois secrets sont également à vendre. Mais ces occasions s’offrent rarement aux particuliers amateurs de bunkers.

Martin aime faire du jogging et boire du vin, raconte le centre de compétence immobilière du DDPS dans une vidéo postée sur YouTube. Lorsqu’il court dans les bois, il passe souvent devant un bunker militaire désaffecté – un bunker qu’il souhaite acheter pour y stocker son vin. Mais les choses ne sont pas aussi simples, malgré la volonté du Département fédéral de la défense (DDPS) de se débarrasser de ses installations inutilisées – ce qu’il fait justement.

Au cours des 30 dernières années, le DDPS a vendu environ 2000 bunkers, selon des recherches effectuées par le «Neue Zürcher Zeitung». Rien qu’en 2019, 180 bâtiments de défense auraient changé de propriétaire.

Ces installations sont notamment prisées des entreprises qui y construisent des centres de stockage de données. Le DDPS prévoirait également de construire deux installations dans d’anciens bunkers pour accroître «la sécurité des données et des applications».

Des acquisitions privées presque impossibles

Toutefois, l’occasion d’acheter ces anciennes installations militaires se présente rarement aux particuliers. Cela s’explique par la réglementation en matière de zones à bâtir. «Vu leur utilisation antérieure, la majeure partie des anciens immeubles militaires ne se trouvent pas dans une zone d’habitation, artisanale ou industrielle (zone à bâtir)», détaille armasuisse.

Cette affectation ou l’obtention d’une autorisation exceptionnelle en vertu de la loi sur l’aménagement du territoire (art. 24 LAT) sont cependant obligatoires pour une utilisation subséquente civile.

Bien que la Suisse soit pratiquement truffée de bunkers et autres installations souterraines, les anciens bunkers ne peuvent éventuellement être achetés que par les municipalités, les cantons ou les associations d’histoire militaire dans la plupart des cas.

La même réglementation s’applique aux lance-mines de forteresse autrefois secrets. Pour environ un milliard de francs suisses, l’armée en a construit 112 exemplaires entre les années 1970 et 2003 dans des bunkers secrets, érigeant ainsi «un véritable barrage de feu sur une grande partie des frontières suisses», comme l’a écrit par le passé la «NZZ».

Un morceau de l’histoire de l’armée suisse

Mais comme le Conseil national et le Conseil des États ont décidé en 2018 de mettre hors service le système de canons, la Confédération souhaite désormais se débarrasser des installations. Rien que dans le canton de Zurich, dix forteresses désaffectées étaient en vente cet été, rapporte le «Tages-Anzeiger».

Mais ces installations ne peuvent pas non plus être transformées en caves à vin par Martin, le joggeur de la vidéo d’armasuisse. Elles sont proposées aux cantons, aux communes ou éventuellement aux associations qui s’intéressent aux forteresses – à «un prix modéré», comme l’assure au «Tages-Anzeiger» le porte-parole d’armasuisse, Kaj-Gunnar Sievert.

Il existe un intérêt certain, indique le journal: la commune zurichoise de Buch am Irchel souhaiterait par exemple acquérir une des installations. Une association d’histoire militaire disposant du savoir-faire qui s’impose pourrait assurer l’entretien nécessaire pour rendre accessible au public un morceau de l’histoire de l’armée suisse: «C’est bien plus qu’un simple canon, c’est une petite forteresse», explique le maire de Buch am Irchel, Hansruedi Mosch.

Un entretien coûteux

La Confédération trouve certainement son intérêt dans l’idée de se débarrasser de ses installations militaires désaffectées. Leur entretien ou leur démantèlement sont coûteux. Le coût pour une installation désaffectée de grande taille représente «un montant à six chiffres», a indiqué armasuisse à la «Neue Zürcher Zeitung». Pour les petites installations, le prix se situerait entre quelques centaines de francs et 10 000 francs.

Avec 1500 bâtiments de défense qui doivent être mis hors service dans les prochaines années, même les factures moindres représentent une somme considérable. Et comme environ 95% de ces sites se trouvent en dehors des zones à bâtir, il sera difficile de leur trouver un acheteur. Ou d’avoir le droit d’en trouver un.

Toujours est-il que pour Martin, le joggeur amateur de vin, il reste le portail immobilier d’armasuisse. Peut-être trouvera-t-il sa cave à vin construite par le DDPS parmi les 20 biens faisant l’objet d’annonces publiques chaque année. Mais pour l’instant, ses chances de succès sont faibles: sur le site web, fin juillet 2020, on ne trouvait qu’un seul bien – un ancien entrepôt disposant d’un raccordement ferroviaire.

Retour à la page d'accueil