Le gardien, le capitaine et la «star» : Yann Sommer, Granit Xhaka et Xherdan Shaqiri ont joué collectif devant la presse samedi, avant le huitième de finale de l'Euro face à la France.
Les trois Bâlois n'ont esquivé aucun sujet. La déroute de Rome face à l'Italie et les polémiques suscitées par les bolides, le coiffeur et les tatouages ont bien sûr été évoquées. Mais Yann Sommer, Granit Xhaka et Xherdan Shaqiri, 255 sélections à eux trois, ont surtout tenu à rappeler leur profond attachement à l'équipe de Suisse.
La Suisse nourrit le rêve depuis 1954 de rejouer un quart de finale dans un grand tournoi. Et ce lundi, elle affronte la France, Championne du monde en titre, l'équipe de tous les superlatifs... «C'est pourquoi je brûle de disputer cette rencontre. Il s'agira de l'une des plus grandes de nos carrières», lâche Yann Sommer.
Mais le grandissime favori de ce huitième de finale ne demeure-t-il pas la France ?
Shaqiri : «La vérité qui figure sur le papier n'est pas toujours celle du terrain. Dans une rencontre à élimination directe, tout est vraiment possible. Pour la gagner, nous devrons être dans un grand jour et les Français dans un mauvais. Il convient aussi d'avoir de la chance. Je me dis aussi que le Portugal est devenu Champion d'Europe il y a cinq ans après avoir dû se contenter de la troisième place de son groupe.»
Xhaka : «Il faut admettre que le favori de ce huitième de finale est bien la France. Elle est Championne du monde, non ? Mais ce n'est pas une raison pour nous rabaisser. Comme je suis d'une nature optimiste, je dirai 55-45 pour la France.»
A vos yeux, la France est-elle toujours, après le premier tour, l'équipe à battre dans cet Euro ?
Sommer : «Il y a plusieurs équipes qui sont très intéressantes et qui ne figurent pas parmi les grands favoris du tournoi. Je pense en premier lieu aux Pays-Bas. A nous aussi. Des équipes que l'on n'attendait peut-être pas vont brouiller les cartes de cet Euro.»
Granit Xhaka, les observateurs affirment que la France n'a pas encore pleinement convaincu à l'exception de Paul Pogba et de Ngolo Kanté qui seront vos adversaires directs lundi...
Xhaka : «Pogba est un joueur qui peut décider de l'issue d'un match à tout moment. Quant à Kanté, on dirait qu'il a huit poumons. C'est fou le nombre de ballons qu'il peut récupérer. Les deux sont des rouages essentiels de l'équipe. Mais nous ne devons pas nous cacher devant les Français.»
Ne pas se cacher d'accord, mais s'adapter peut-être à l'adversaire. La Suisse doit-elle changer sa manière de jouer pour exister vraiment dans ce huitième de finale ?
Sommer : «Changer complètement notre style de jeu serait une erreur. Mais nous devrons veiller à réagir comme il le faut face à leurs individualités. Les Français peuvent aller très vite devant. Ils sont très forts dans le jeu de rupture. La clé pour nous sera de garder une concentration extrême lors de nos phases de possession. Il ne faudra pas perdre bêtement le ballon et leur laisser des espaces.»
Xhaka : «Les grandes équipes n'aiment pas courir après le ballon. Je pense que la Suisse est une équipe aujourd'hui à l'aise dans la possession. La Suisse n'est pas une équipe qui ne fait que défendre et balancer de longs ballons vers l'avant. Ce n'est pas notre style. Il ne faut surtout pas le renier lundi.»
Vice-Champion du monde en 2006 avec la France, Willy Sagnol prétend que la Suisse est une équipe de seconde zone. Que cela vous inspire-t-il ?
Shaqiri : «C'est son opinion. Mais la France a peiné contre la Hongrie. Et avec des avis aussi tranchés, on peut croire que les Français se voient déjà en quart de finale. Cela peut être une chance pour nous...»
Sommer : «De tels propos ne nous dérangent pas. Nous savons quelles sont nos forces. Il sera crucial de jouer lundi avec les mêmes valeurs qui étaient les nôtres contre la Turquie. Des valeurs que nous avions oubliées contre l'Italie: la solidarité et le courage. Il faudra aussi savoir bien communiquer entre nous et posséder le bon «body language». Il faudra croire en nous, croire que nous sommes capables de rester dans le tournoi après ce huitième de finale.»
Vous avez retrouvé vos valeurs pour le match contre la Turquie. Avant cela, vous vous étiez un peu égarés en chemin. Les différentes polémiques, les bolides, le coiffeur et le tatouage, ont-elles pesé sur la vie du groupe ?
Shaqiri : «On a voulu faire croire que nous faisons une sorte de show ! On écrit sur nos voitures depuis des années. Mais cette thématique est si futile. Elle nous laisse de marbre. Seulement, il est clair que cela peut revenir sur la table après une contre-performance.»
Xhaka : «Je suis devenu, il y a peu, père pour la deuxième fois. J'ai voulu faire un tatouage juste avant le tournoi pour célébrer cette naissance. Avec le recul, je reconnais avoir commis une erreur. Mais j'ai observé toutes les règles sanitaires lors de ce rendez-vous avec le tatoueur. Encore une fois, cette affaire n'a eu aucune influence sur mes performances.»
Trouvez-vous toutes ces critiques totalement injustes ?
Xhaka : «On a le sentiment que des gens prennent un malin plaisir à déstabiliser l'équipe. Nous voulons seulement être jugés sur nos performances sur le terrain.»
Sommer : «Il y a eu bien des discussions autour de l'équipe ces dernières années. Cette fois, nous avons eu ce match contre l'Italie qui fut vraiment médiocre. Alors tout est revenu sur la table de manière exagérée. Dans de tels moments, on mélange vraiment tout. Mais nous y sommes habitués. Cela fait partie du business. Et comme Shaq l'a dit, ces polémiques n'ont eu aucune influence sur la vie du groupe. Il n'y a pas un joueur qui va dire à un autre que sa voiture coûte très cher ou qu'il n'aurait pas dû aller chez le tatoueur. Chacun mène sa vie comme il l'entend.»
Etes-vous surpris d'être à nouveau confrontés à la problématique de l'identification ?
Sommer : «On oublie un peu vite que Granit compte 97 sélections et Shaq 94. Ils ne sont plus très loin du record de 118 sélections de Heinz Hermann...»
Shaqiri : «A nous trois, nous devons compter largement plus de 200 sélections. On ne doit plus perdre son temps avec cette problématique de l'identification. Il faut juste se pencher sur les statistiques. Pour comprendre très vite que nous avons toujours tout donné pour cette équipe et pour la Suisse.»