UEFA Champions LeagueCarlo Ancelotti le placide et Naples la volcanique
2.10.2018
Le mariage entre Ancelotti et le Napoli ne semblait pas évident mais en quelques mois, "Carletto" a imposé son style tranquille et ses idées à un club profondément marqué par trois années d'une gestion radicalement différente sous Maurizio Sarri.
Il y a quelques semaines, le mot "sarrisme" a fait son entrée dans le Dictionnaire Treccani, l'équivalent italien du Larousse ou du Petit Robert. L'événement donne une idée de la trace laissée en Italie par l'ancien coach de Naples aujourd'hui à Chelsea, adepte d'un jeu à terre ultra-précis, répété à l'extrême à l'entraînement, presque pré-écrit. Mais il n'y a pas d'"ancelottisme" qui, s'il existait, serait un pragmatisme gagnant, à l'image de celui de Didier Deschamps ou de Massimiliano Allegri.
Lassé de voir que la beauté ne faisait pas soulever de trophées, le président napolitain Aurelio De Laurentiis a donc misé sur Ancelotti, qui a gagné partout et va tenter de le faire aussi dans un club qui n'a décroché que deux Coupes d'Italie depuis 1990 et Maradona. La Ligue des Champions, où le club italien se frottera mercredi au finaliste sortant Liverpool, n'est évidemment pas l'objectif prioritaire. Mais après une défaite logique contre la Juventus samedi (3-1), ce nouveau choc permettra de juger de l'avancée du chantier entrepris par Ancelotti.
Vingt titulaires
Sur le terrain, l'évolution la plus visible est le passage d'un 4-3-3 extrêmement rigide avec Sarri à un 4-4-2 qui a ramené Lorenzo Insigne plus près du but. "Je suis convaincu qu'il sera plus efficace dans cette position", a expliqué Ancelotti, la suite lui donnant raison puisque le petit attaquant italien en est déjà à cinq buts en sept matches de championnat. L'ancien coach du Milan et du PSG a aussi fait exploser Zielinski, a relancé Maksimovic et Rog, qui ne jouaient jamais, et a déplacé Hamsik en milieu organisateur reculé.
Alors que De Laurentiis se désolait de voir des joueurs payés des millions collés au banc, il a surtout utilisé vingt titulaires différents, une situation impensable avec Sarri, qui avait onze joueurs de base et n'en changeait que de façon très exceptionnelle. "Encore une équipe différente, mais le résultat ne change pas. Désormais, le Napoli est à son image", écrivait ainsi la "Gazzetta" il y a une semaine après un net succès 3-0 contre Parme. Curieusement, c'est du côté de la Juventus, le grand rival des dernières saisons, qu'on a le mieux parlé récemment d'Ancelotti et de son impact.
"Trop gagné"
"Carlo a eu l'intelligence de ne pas détruire le travail de Sarri, mais il a apporté sa mentalité. On peut parler des heures, mais à la fin il reste le nom de celui qui a gagné. Ce matin, j'ai regardé le palmarès d'Ancelotti. A un moment, j'ai arrêté, parce qu'il a trop gagné", plaisantait ainsi Allegri avant Juve-Naples. "Quand on court le 100m, c'est assez facile de passer de 13 à 10 secondes. Mais c'est plus difficile de passer de 10'' à 9''99, c'est-à-dire de deuxième à vainqueur. Dans ce domaine, Carlo est un maître, un professeur", ajoutait l'entraîneur bianconero.
Quant à Leonardo Bonucci, il estime que si "le Napoli a perdu un style de jeu défini et identifié, il a acquis avec Ancelotti de la sérénité et de l'expérience". Car si Sarri était un immense tacticien, il était aussi un râleur, récriminant contre le calendrier, la presse, les arbitres, la Juventus et ses moyens démesurés. Il était "une présence anxiogène qui excitait la ville comme 100 cafés", écrit ainsi la "Gazzetta".
Ancelotti, lui, lève son sourcil gauche et désamorce. Naples est jugé "malade" après une défaite 3-0 contre la Sampdoria? "Un petit rhume, tout au plus", assure-t-il. Et quand il a été insulté samedi par le public turinois, il n'a pas plus haussé le ton. "Ca n'a pas d'importance, je me consolerai en regardant la Ligue des Champions 2003", celle remportée par son Milan face à la Juve.