Coupe de Suisse Magnin: "C'est le virus de Lucien"

ATS

25.4.2019 - 06:05

A la peine en Super League, Ludovic Magnin et le FC Zurich ont l'occasion de sauver leur saison avec la Coupe de Suisse. Avant la demi-finale de jeudi contre Bâle, Ludovic Magnin lève le voile.

Ce soir, l'heure de vérité pour Ludovic Magnin.
Ce soir, l'heure de vérité pour Ludovic Magnin.
Source: KEYSTONE/MELANIE DUCHENE

Après un an et quelques mois, il fallait savoir, comprendre. Comment «Ludo», le boute-en-train aux joues toujours rougies de la bande à Köbi Kuhn était-il devenu «Coach Magnin» une décennie plus tard?

Comment le bon vivant d'Echallens s'était-il (re)constitué pour devenir l'entraîneur du FC Zurich, vainqueur de la Coupe de Suisse dès sa première tentative avec un parcours européen émérite dans l'enchaînement?

Alors Ludovic Magnin, quarantenaire depuis samedi, a accepté de décrypter l'entraîneur qu'il est. «Je ne me suis jamais pris la tête sur l'image que je renvoie. J'essaye d'évoluer tous les jours, mais on ne change pas l'homme, annonce-t-il. Je n'allais pas être quelqu'un d'autre au bord du terrain.»

Sciemment ou non, Magnin s'excuse déjà de ses coups de gueule sur les arbitres, de son agitation qui rappelle le grognard qu'il pouvait parfois être joueur. Les traits de caractère ne disparaissent pas. Mais ils n'entravent pas l'apparition d'une génétique de l'entraîneur.

«Notre job, c'est gérer des êtres humains»

L'ADN du coach du FCZ se déploie sur plusieurs dimensions. L'approche humaine, déjà, est un élément-clé. «Notre job, c'est de gérer des êtres humains, rien d'autre», lance Magnin. Facile à dire. «Il faut savoir jouer avec son équipe, détaille-t-il. Il n'y a pas une règle, car tout le monde n'est pas pareil. Par exemple, si un joueur est en retard, il faut tenir compte du contexte, on ne peut pas traiter tous les joueurs de la même manière.»

Le respect en découle. «Dès le moment où tu dois faire quelque chose de spécial pour imposer ton autorité, cela devient difficile. Le plus important est de faire ce que tu dis. Je ne dois surtout pas perdre la face, ni mon vestiaire.»

Ludovic Magnin revendique son expérience. «Dès mon plus jeune âge, grâce à mon père, j'ai grandi dans des vestiaires, même si c'était du foot des talus. Ressentir l'être humain, c'est quelque chose qui est inné. Alors je fais tout ça au feeling.» Non sans prôner le dialogue. La porte du bureau du coach demeure ouverte, les cadres sont consultés, la relation avec les leaders est primordiale.

«Ludo» ne le cache pas, il s'inspire beaucoup de ce qu'il a connu en tant que joueur. Inévitablement, le nom de «Lucien» (réd: Favre, bien sûr) est rapidement mentionné. «Ce qui est certain, c'est que là où j'ai eu des succès, il y avait des entraîneurs exceptionnels sur le plan humain. Ensuite, ils étaient suffisamment intelligents pour s'entourer d'un staff qui compense leurs faiblesses.»

C'est ce qu'il a fait en s'entourant d'un homme d'expérience comme René van Eck (ex-Lucerne, Thoune ou Carl Zeiss Jena), qui «a un gros caractère, un charisme et qui donne une intensité aux entraînements par son coaching».

Travailler plus pour suprendre plus

Mais la «Méthode Ludo» ne s'arrête pas là. Elle repose avant tout sur une «idée de foot», comme il le dit. «Aucun entraîneur n'a une idée juste, mais elle doit être précise. Moi, je veux avoir le ballon, cela me paraît impensable de le laisser. Et surtout, je veux surprendre l'adversaire. Il va savoir comment on joue, mais il ne saura pas comment on occupera les différentes zones. D'où l'idée de pouvoir utiliser plusieurs systèmes.»

Cette flexibilité, Magnin la revendique: «En tant que joueur, cela m'a toujours énervé de jouer à chaque fois de la même manière, que ce soit à la maison contre Cottbus ou sur le terrain du Bayern. Je n'ai jamais compris ça.»

Et puis, il y a une éthique du travail. Si Magnin revient volontiers sur son enfance à Echallens, sur les échelons gravis petit à petit, c'est aussi parce qu'il sait que tout ne vient pas tout seul.

«Le joueur doit savoir que, dans la vie, il faut travailler pour avoir du succès, plaide-t-il. Il me paraît fondamental que mon équipe doive faire plus que l'adversaire. C'est pour ça que mes séances sont particulièrement longues.» Une approche qui n'est pas sans rappeler une autre. C'est le «virus de Lucien», sourit Magnin.

«Des émotions dix fois plus grandes»

Avec l'abondance de matches (Super League, Europa League, Coupe), l'entraîneur a eu moins de temps pour travailler cette saison. Est-ce pour ça que les temps sont difficiles au Letzigrund, où le FCZ est de moins en moins convaincu de se maintenir sans problèmes ? Pas impossible. Alors la Coupe de Suisse peut offrir un bol d'air en cette fin de saison. Le FCZ reste le tenant du titre et s'imagine bien faire le doublé.

«J'ai toujours trouvé que, en Coupe, l'émotion est plus grande qu'en championnat, où tu sens venir le succès, estime le coach. Une finale de coupe, c'est du 50-50: c'est celui qui en veut le plus, qui émotionnellement se gère le mieux qui la gagne. Les émotions sont dix fois plus grandes.»

Alors nul doute que Magnin espère revivre ça une deuxième fois le 19 mai prochain à Berne. Il faudra passer l'écueil bâlois d'abord. Et puis tenir en poste jusqu'à la fin de saison. Rien n'est juré pour l'instant, compte-tenu des résultats actuels.

Mais «Ludo» le savait. Il le disait il y a un mois: «Au FCZ, il y a plus de pression qu'ailleurs.» Et il sait très bien qu'il vit en permanence sur un siège éjectable: «Je me verrais rester des années au club. Mais c'est impossible. Alors, je vis au jour le jour.» Et tant mieux si un lendemain lui permet de soulever un nouveau trophée, avec un sourire surgissant de ses joues rougies.

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