Murat Yakin «Nous étions deux athlètes, entourés de bides à bière»

blue Sport

13.6.2023

Avant les prochains matches de qualification pour l'Euro en Andorre et contre la Roumanie à Lucerne, le sélectionneur de l’équipe de Suisse Murat Yakin s'est entretenu avec blue Sport.

Murat Yakin s’est confié à blue Sport avant les prochaines échéances de la Nati.
Murat Yakin s’est confié à blue Sport avant les prochaines échéances de la Nati.
Keystone

blue Sport

13.6.2023

Murat Yakin, faisons un petit oui/non. La Suisse est une nation de football.

«Oui, c'est vrai.»

La Nati est meilleure lorsqu'elle ne doit pas elle-même faire le jeu.

«Non.»

L'équipe nationale suisse sera toujours mieux représentée par sa défense, comme en atteste le fameux verrou suisse, que par son attaque.

«Non (mais il hésite longtemps).»

Avoir le bon capitaine peut parfois faire la différence dans un match.

«Non.»

La Suisse a énormément de bons gardiens. Cela peut devenir pesant pour un sélectionneur.

«Non. Je préfère ça que l'inverse.»

D’ailleurs comment se fait-il que la Suisse compte autant de bons portiers ? Est-ce une question de mentalité ?

«On le doit essentiellement à notre entraîneur des gardiens, Patrick Foletti, Fox comme on l’appelle, qui s'occupe également de la formation des entraîneurs de gardiens en Suisse. C’est une légende. Il détecte les talents, les accompagne dès leur plus jeune âge et les forme non seulement sur le plan technique, mais aussi personnel. Il a un œil que je n'ai pas. Il peut dire si un joueur à les qualités pour devenir un grand gardien de but.»

Yann Sommer en est l’exemple parfait.

«Oui, Yann est effectivement un grand gardien, un homme éminemment sympathique et un modèle pour les jeunes. Mais nous avions déjà de très bons gardiens avant Yann. A commencer par Erich Burgener, qui n'a malheureusement jamais pu faire ses preuves lors d'un grand tournoi. Et il faut aussi dire qu’il n'avait pas le bon lieu d'origine.»

Qu’entendez-vous ?

«Il est valaisan ! Pendant longtemps, je ne savais même pas que les gardiens valaisans existaient (rires). Je plaisante bien sûr.»

La plus suisse des questions suisses : avez-vous fait votre service militaire ?

«Etant donné que je souffrais d’"asthme à l’effort", le docteur Villiger, le pneumologue de la clinique d'altitude de Davos, m’avait fait un certificat indiquant qu’avec mes poumons, je ne pouvais pas faire mon service militaire. A 22 ans, je me rends donc au recrutement. Dans ma rangée, nous sommes deux athlètes, un joueur de tennis et moi, entourés de bides à bière. Au moment où l’on s’avance, on nous lance : "Vous deux qui voulez être déclarés inaptes, regardez-vous". Nous étions là en caleçon, à ne pas savoir quoi répondre. Nous avons été incorporés, grenadiers ou je ne sais plus quoi. Quand je suis reparti, franc fou, au moment où j’ai allumé ma voiture, la chanson qui passait à la radio était «In the Army Now» de Status Quo. Quelle ironie. Deux mois plus tard, j'ai reçu une offre du VfB Stuttgart. J’ai alors envoyé un courrier annonçant que je ne pouvais pas faire mon école de recrue.»

Veuillez maintenant compléter les phrases suivantes. Si la Suisse était au bord de la mer, ce serait...

«... kitsch (rires).»

Ayant moi-même été joueur professionnel, je peux comprendre qu'un joueur puisse...

«... traverser une phase difficile et qu'il souhaite le soutien de l'entraîneur de l'équipe nationale.»

Le football féminin est...

«... magnifique.»

Mon club préféré est...

«... je n'en ai pas.»

Mon joueur préféré est…

«… tout joueur capable de travailler en équipe, qui a l'humilité nécessaire, qui donne tout pour l'équipe.»

Vous devez quand même avoir un nom en tête ?

«Concernant l’équipe nationale, je ne peux pas vous répondre (rires). Cependant, j’ai toujours aimé regarder Messi. Pas uniquement pour le voir jouer lui, mais aussi parce que je voulais voir comment les autres agissaient en sa présence. Si j'avais un tel joueur à ma disposition, je me demanderais : comment dois-je organiser les joueurs autour de lui ?»

Le numéro 15 (qu’il portait à Bâle) est...

«... mon anniversaire. Mais je pourrais aussi dire le numéro que personne ne voulait.»

Les joueurs de la Nati ont-ils des souhaits particuliers concernant leur numéro ?

«Oui, bien sûr.»

Leurs vœux sont-ils toujours exaucés ?

«Pas toujours, cela dépend de leur position dans la hiérarchie.»

Pour moi, le plus beau stade est...

«...ce n'est pas vraiment le plus beau, mais le stade que j’ai trouvé le plus impressionnant en termes d’ambiance a été celui du Celtic Glasgow. Et celui du Besiktas aussi.»

Quelle est l'importance des supporters pour un footballeur professionnel aujourd’hui ? Ne joue-t-il pas pour eux finalement ?

«Ça ne devrait pas être le cas. Un joueur devrait jouer de la même manière que le stade soit plein ou vide. Mais forcément qu’il y a plus d’adrénaline lorsque tu joues devant des supporters, ce qui signifie que tu es beaucoup plus tendu et que fais par conséquent plus d’erreurs. Mais ton engagement est aussi plus élevé.»

Vous jouez contre la Roumanie à Lucerne le 19 juin. Les billets sont partis comme des petits pains et le match se jouera à guichets fermés, cela doit vous réjouir.

«Oui, c'est merveilleux. Et bientôt, nous pourrons également jouer à Berne puisque dès 2025 le gazon naturel sera de retour au Wankdorf.»

La différence entre le gazon synthétique et le gazon naturel est-elle si importante ?

«A ce niveau, oui.»