En reportant d'une année l'Euro, l'UEFA a voulu préserver ses deux poules aux oeufs d'or (avec la Ligue des champions) tout en offrant du temps aux championnats nationaux. Cette décision ne résout néanmoins de loin pas tout et les difficultés sont encore nombreuses.
Le plus gros problème demeure celui du calendrier. Parce qu'il s'agit de se coordonner désormais avec la FIFA, qui avait bloqué l'été 2021 pour sa nouvelle Coupe du monde des clubs qu'elle espère lucrative, mais aussi à l'interne. Car juin 2021 devait être le mois du Final Four de la Ligue des Nations, de deux journées des éliminatoires du Mondial 2022 et de l'Euro M21, alors que l'Euro féminin est prévu pour juillet de la même année. Trois compétitions qui seront déplacées, confirment les autorités du football.
Le président de l'UEFA, Aleksander Ceferin, a tenu à remercier son homologue de la FIFA, Gianni Infantino, «qui a assuré qu'il ferait tout ce qui est nécessaire pour établir un nouveau calendrier». Le Valaisan s'est également fendu d'un communiqué, dans lequel il s'engage à demander la mise en oeuvre de plusieurs mesures: l'acceptation formelle du report de l'Euro mais aussi de la Copa America en 2021, le replacement «plus tard en 2021, en 2022 ou en 2023» de la Coupe du monde des clubs, ainsi que l'élaboration collective d'un nouveau calendrier avec une annonce «si possible avant la fin avril».
L'écueil du 30 juin
Reste qu'il existe un écueil juridique de taille (voire infranchissable): la durée des contrats liant les joueurs à leurs employeurs. Dans la plupart des cas, la date est le 30 juin, soit la fin symbolique de la saison. Mais elle peut également être plus précoce, certains clubs ayant des ententes jusqu'à fin mai. Il est donc impératif que tous les championnats et Coupes d'Europe soient terminés au plus tard au 30 juin, tout en intégrant dans ce programme marathon, début juin, les barrages qualificatifs de l'Euro 2020 devenu 2021. Il est question, dans l'accord trouvé ce mardi, de peut-être ponctuellement organiser des matches de Ligues des champions et d'Europa League le week-end et des matches des championnats nationaux en semaine.
Une source proche du dossier a expliqué à Keystone-ATS que l'UEFA a présenté aux ligues européennes une ébauche de calendrier, dont la version la plus optimiste évoque une reprise fin avril. Ce qui n'est tout bonnement pas envisageable dans certains pays, dont la Suisse, qui a prononcé des mesures pour lutter contre la pandémie de Covid-19 allant pour certaines, justement, jusqu'à fin avril.
Or, à chaque report d'une semaine, des compétitions seraient en danger (d'abord logiquement les coupes nationales), ou du moins les formats des compétitions devraient être adaptés. Les prévisions de propagation du coronavirus étant tout sauf optimistes – le pic de l'épidémie n'ayant encore été atteint dans aucun des pays touchés -, on comprend vite qu'il y aura encore beaucoup de casse.
Certainement est-ce cela qu'a voulu dire Aleksander Ceferin. «Il y avait un réel esprit de collaboration (dans les discussions de mardi), tout le monde ayant reconnu qu'il fallait faire des sacrifices. L'UEFA a mené ce combat en tête en consentant au plus gros des sacrifices, car déplacer l'Euro est un prix immense à payer.»
Vers une gabegie monumentale
Si le calendrier est le sujet le plus épineux, d'autres problématiques ne manqueront pas d'occuper l'UEFA, ses membres, les ligues et... les juristes. D'un point de vue logistique, le report de l'Euro implique que les installations du tournoi (stades, camps de base, hôtels) soient encore libres en 2021. Il s'agira aussi de s'assurer que les douze Etats qui devaient accueillir le tournoi, lesquels devront faire face à des situations économiques probablement très tendues, seront toujours enclins à co-organiser l'événement.
Des questions seront également à régler avec les diffuseurs de la compétition ainsi qu'avec les supporters. L'UEFA a assuré ces derniers que leurs billets pourraient être intégralement remboursés, mais comment gérer les annulations des voyages et des réservations de logement?
Le plus grand risque actuellement encouru par l'UEFA est toutefois la prolongation des mesures de confinement sur tout le continent. Auquel cas aucune compétition nationale ne pourrait aller à son terme. Ce qui sèmerait une gabegie monumentale dans le football mondial.