Timothy Fayulu ne sait pas encore. Le jeune gardien de Sion jouera-t-il contre Lugano dimanche (16h00), après avoir très bien terminé l'année 2020 ? Fabio Grosso entretient encore le suspense.
Le choix se veut cornélien. Fabio Grosso ne s'est pas facilité la tâche en mettant au repos forcé Kevin Fickentscher, son numéro un habituel, pour les quatre derniers matchs avant Noël. Timothy Fayulu, 21 ans, a joué, mais a surtout performé contre Lucerne, Servette, Vaduz et Zurich. Il se dit "prêt à être dans le 11 dimanche", histoire de poursuivre sur sa lancée.
Cinq points pris, mais surtout quatre buts encaissés alors que les statistiques avancées suggèrent qu'il aurait pu en subir trois de plus. Sur les onze matchs qui ont précédé, Fickentscher présente un bilan autrement moins glorieux. Cela n'étonne pas Sébastien Bichard, son ancien entraîneur en M21 du FC Sion: "A chaque fois que Tim (Fayulu) a joué, il a été bon", considère celui qui l'a également lancé en Super League (en mai 2019 lors d'un Grasshopper-Sion), lorsqu'il entraînait le club valaisan en duo avec Christian Zermatten.
Sion, sa "dernière chance"
Pourtant, Fayulu vient de loin. "A 17 ans, j'allais arrêter le foot pour me consacrer à un apprentissage de boulanger, se revoit le Genevois. Sion, c'était ma dernière chance d'être professionnel." Il l'a saisie. Car le parcours de l'international congolais est cabossé. "J'ai été forgé par tout ce que j'ai pu connaître dans ma vie qui n'a pas toujours été rose", note-t-il. Allusion par exemple à ses rendez-vous manqués avec l'élite au cours de sa formation, en raison d'un comportement pas toujours exemplaire. Quand Sion est venu le chercher, en janvier 2018, il jouait à l'Olympique de Genève, en 2e Ligue. Un football amateur duquel il a dû s'extirper.
Et apprendre à être un footballeur de métier. "Au début, ça a été très dur: le fait de s'entraîner tous les jours, d'avoir des séances spécifiques. Il fallait se faire à ce cadre professionnel. Et puis, j'ai grandi, j'ai compris certaines choses en habitant seul très tôt. Je suis aujourd'hui un adulte et quelqu'un de responsable." Il a fallu aussi parfois le tancer, pour obtenir de lui une certaine exigence.
"J'ai dû le provoquer un peu, détaille Bichard. Il était impatient, avait du mal à accepter la concurrence et son comportement pouvait ne pas être adéquat. Il se voyait très bon, ce qui ne me dérangeait pas, mais il fallait qu'il lie la parole aux actes. Alors je lui ai parlé comme on le fait dans le monde professionnel, en lui lançant presque un ultimatum. Cela a permis d'établir un lien de confiance avec lui, basé sur le travail." Alors, un jour, Bichard a fait jouer Fayulu, lors d'une rencontre de Promotion League à YF Juventus, lui promettant de ne plus le sortir s'il était bon. Dénouement de l'histoire ? "Quand on fait appel à lui, il répond toujours", lance le technicien.
"Il a besoin de reconnaissance"
Car Timothy Fayulu a de vraies qualités: notamment un sens du réflexe et une excellente gestion des face-à-face. Ses défauts ? Pour l'instant, il les masque. "Et je ne veux pas les évoquer publiquement: je garde ça pour moi", élude-t-il. "Je vois en lui un énorme potentiel, c'est pour moi un des meilleurs gardiens de sa tranche d'âge, s'engage Bichard. Mais tout dépendra de l'environnement qu'il aura autour de lui, de la confiance qu'on lui donnera. Il paraît très sûr de lui, mais il a une grande sensibilité, un besoin de reconnaissance."
A Sion, aujourd'hui, il l'a. Et il la rend bien, dégageant une sacrée personnalité dans ses buts: "Je suis comme ça dans la vie de tous les jours, acquiesce-t-il. J'aime me montrer, parler à mes gars, leur dégager de la confiance. Je joue chaque match comme si c'était le dernier, en voulant en sortir sans regret." Il n'a pas pu en avoir sur ses quatre apparitions de la saison. Fabio Grosso non plus. Mais l'Italien osera-t-il renverser totalement la hiérarchie et installer Fayulu comme son véritable numéro un?