Sierre et Valais-Chablais disputeront le 5e match décisif de la finale de MSL (3e division) samedi à Graben. Un final en apothéose qui déchaîne les passions en Valais.
On se croirait presque revenus dans les années 80. Les nostalgiques appelleront ça le hockey vrai, d'autres n'y verront que le paroxysme d'une rivalité cantonale cristallisée par un dernier match événement qui désignera le champion de Suisse de troisième division. 45 kilomètres de distance pour une «finalissima» au pays du fendant et de la raclette. Octodure face à la Cité du Soleil devant 4500 spectateurs, pour une rencontre à guichets fermés.
Les années 80, c'était l'époque où l'on se lançait des piques au bistrot et pas sur les réseaux sociaux. Passés par des relégations administratives, des fusions et des changements de nom, Sierre et Valais-Chablais ont en quelque sorte relancé la mode des grands derbies d'antan. Peut-être parce que les affrontements aux étages supérieurs se sont aseptisés avec les nouvelles patinoires et les normes de sécurité accrues. Un Fribourg-Berne, un Lausanne-Genève ou un Berne-Langnau font recette, mais la ferveur semble moins électrique que par le passé. Seul un Ambri-Lugano paraît pouvoir concurrencer le degré de passion qui entoure cette série valaisanne.
Du feu à la moindre étincelle
«C'est une passion indescriptible, note le coach de Valais-Chablais, Laurent Perroton. J'ai vécu pas mal de choses dans ma carrière, mais là, c'est vraiment chaud.» Tellement chaud que tant du côté de Martigny que de Sierre, on essaie de calmer les ardeurs. Parce que l'on sait bien que le moindre souffle d'air sur les braises peut redonner vie à de sacrées flammes. Parce que la plus petite des polémiques déclenche une réaction en chaîne difficilement contrôlable.
L'électricité du vestiaire martignerain à Sierre a ainsi été coupée quelques minutes avant le début de l'acte I. Et lors du match IV, les officiels ont eu le malheur d'apposer le nom de Sierre sur la Coupe alors que le match n'était pas terminé. Mené 2-0, Valais-Chablais a retourné la situation pour l'emporter 6-3 et forcer la tenue de ce 5e acte. Pour Laurent Perroton, pas question d'utiliser les polémiques pour motiver ses joueurs: «Il ne faut pas trop d'esprit de vengeance, mais au contraire savoir canaliser son énergie. Il faut jouer au hockey.»
Le Sierre de Dany Gélinas a dominé le championnat et ses deux premiers tours de play-off. Vainqueur 8-0 à Martigny en fin de saison régulière, le HCS se retrouve dans un match-couperet face à une formation qui a dû batailler cinq matches contre Wiki-Münsingen, cinq contre Huttwil et donc cinq en finale. Autant dire que la pression pèse davantage sur les épaules sierroises. Laurent Perroton a en outre vu son équipe progresser tactiquement au fil des tours. «On vient de loin, résume-t-il. On n'a pas de pression. J'espère que les gars vont prendre du plaisir et montrer de la fierté.»
Le titre et la promotion en Swiss League
Si les passions sont autant exacerbées, c'est aussi parce qu'au-delà du titre de champion de MSL, il y a une promotion en Swiss League à la clef. Mais pour avoir le droit de monter, il faut remplir un critère sportif et un critère administratif. Et contrairement aux Martignerains, Sierre possède un accord de promotion. Ce qui signifie que le club pourrait accéder à l'étage supérieur même en cas de défaite samedi. Un scénario qui ne plaît pas au président sierrois Alain Bonnet: «Parce qu'en tant qu'ancien joueur, je suis un fervent défenseur de l'aspect sportif.»
L'histoire pourrait s'arrêter là. Sauf que Valais-Chablais a décidé de faire recours devant le Tribunal arbitral du sport contre la décision des instances dirigeantes du hockey suisse à propos de la solidité de son dossier. Cela veut dire qu'en cas de victoire des Bas-Valaisans samedi, la machine judiciaire se mettrait en branle. «Honnêtement, ce ne serait pas bon pour le hockey valaisan, estime Alain Bonnet. Cela peut mettre en péril l'avenir des deux clubs. On sait que les contrats de sponsoring et ceux des nouveaux joueurs se signent maintenant. Avec une telle procédure, on va devoir attendre plusieurs semaines voire plusieurs mois. C'est préoccupant.»
Bien aidé par Genève-Servette qui lui a prêté plusieurs de ses jeunes éléments, Sierre sait qu'une ascension en Swiss League permettrait de conserver ce lien privilégié. «L'horizon serait plus clair, conclut Alain Bonnet. Mais le but c'est de garder ce partenariat. Si nous venions à rester en MSL, il ne serait pas de même dimension, bien évidemment.»