WeltklasseLea Sprunger: "Le record est dans un coin de ma tête"
ATS
29.8.2018
Le Weltklasse devrait à nouveau offrir un grand spectacle jeudi soir aux spectateurs du Letzigrund. Les Suisses Lea Sprunger (400 m haies), Mujinga Kambundji (100 m) et Alex Wilson (200 m) seront très attendus sur la piste zurichoise.
Pour l'une des premières fois de sa riche histoire, le Letzigrund va vibrer jeudi soir (RTS2 19h45) au rythme des athlètes helvétiques pour la première partie de la finale de la Diamond League.
La toute fraîche championne d'Europe du 400 m haies Lea Sprunger, Mujinga Kambundji sur 100 m, Alex Wilson sur 200 m et le relais féminin 4x100 m seront les véritables stars du meeting.
Weltklasse ou Schweizerischeklasse? En dépit d'une présence internationale comme toujours de qualité, ce sont bien les Suisses qui auront pour mission de faire sauter l'applaudimètre et de combler de bonheur les 25'000 spectateurs zurichois. Sans véritable locomotive internationale et au vu des récentes performances des athlètes suisses à Berlin, l'impact des coureurs locaux se veut plus fort que jamais.
A commencer bien sûr par Lea Sprunger, rayonnante depuis son titre européen sur 400 m haies. Pour son ultime défi de la saison, la Nyonnaise n'aura pas la tâche facile avec quatre adversaires descendues sous les 54'' cette année. Mais la Vaudoise ne s'en fait pas, elle qui a remporté sa dernière course à Birmingham, en Diamond League, devant la plupart des filles au départ jeudi soir. Placée au couloir 4, elle devra normalement se méfier des deux Américaines qui l'entourent, Dalilah Muhammad et Shamier Little.
Lea Sprunger réaliste
Le pic de forme de Berlin et les diverses sollicitations ont forcément coûté de l'énergie à la hurdleuse, mais elle ne veut pas y penser. "Je sais que le public va être bruyant lorsque le speaker va me présenter, prédit-elle. Il faut que j'utilise cette énergie positive parce que je n'ai vraiment rien à perdre. Mais je suis réaliste et je sais que plusieurs filles sont plus rapides que moi." Détentrice des records de Suisse du 200 m et du 400 m, Lea Sprunger a conquis l'or européen sur le 400 m haies sans avoir battu la meilleure marque détenue par la Vaudoise Anita Protti en 54''25. Ce record, Lea Sprunger ne veut pas y penser. On pourrait presque sentir une pointe d'agacement à son évocation. "Le record est dans un coin de ma tête, concède-t-elle. Seulement on est en fin de saison. Mais j'espère bien l'avoir une fois."
Pour son coach Laurent Meuwly, les conditions météorologiques annoncées sur Zurich jeudi soir n'invitent pas à l'optimisme en ce qui concerne les chronos: "Il y aura de beaux duels, mais il va faire dans les 18 degrés. Quand on a vécu les chaleurs de Berlin au-dessus des 30, ça change drastiquement la donne."
Kambundji veut sa revanche
Outre la Nyonnaise, Mujinga Kambundji se sait, elle, aussi très attendue sur la ligne droite. Et comme pour Lea Sprunger, la concurrence sera de taille avec Marie-Josée Ta Lou et Dina Asher-Smith, les deux meilleures performeuses de l'année en 10''85, ainsi que la Néerlandaise Dafne Schippers. La femme la plus rapide du pays en 10''95 se retrouvera donc au milieu du gratin, dont elle commence à faire partie. Elle voudra à coup sûr effacer de sa bouche le goût de chocolat qu'elle traîne depuis Berlin avec ses trois quatrièmes places.
Sans véritable vedette charismatique, cette édition 2018 du Weltklasse sera l'occasion de voir à l'oeuvre le prodige norvégien Jakob Ingebrigtsen, tout récent champion d'Europe sur 1500 et 5000 m à 17 ans. Seulement la concurrence sur le fond et le demi-fond en meeting est renforcée par la présence des Kényans. Le Viking devra se mesurer à Timothy Cheruiyot et Elijah Manangoi, descendus sous les 3'30 cette saison.
Et sur le 200 m messieurs, Alex Wilson étrennera sa médaille de bronze berlinoise face au champion d'Europe turc Ramil Guliyev et surtout face à la merveille du sprint américain, le très véloce Noah Lyles qui a déjà couru en 19''65 cette saison à Monaco.
La concurrence de Bruxelles
Si le Weltklasse offrira donc un très joli plateau suisse, le manque de stars internationales charismatiques n'aide pas franchement les organisateurs. "Victime" de la refonte de la Diamond League avec des finales disputées jeudi soir au Letzigrund et à Bruxelles vendredi, le meeting zurichois a un brin perdu de sa superbe.
Jeudi soir sur les coups de 20h lorsque les caméras des télévisions entameront leur retransmission, les 25'000 places du Letzigrund seront toutes occupées. Les organisateurs ont annoncé voici plusieurs jours que le meeting se déroulerait à guichets fermés. Et les performances des athlètes suisses ont logiquement eu un effet très positif sur la vente des billets. Mais on est tout même loin des éditions où le nom d'Usain Bolt en juin faisait qu'il n'y avait plus un billet disponible en juillet.
"Le changement de système avec deux finales de Diamond League est pour beaucoup dans cette situation, explique le coach de Lea Sprunger, Laurent Meuwly. Avant, Zurich s'arrangeait pour inviter les meilleurs athlètes. Il y avait aussi moins de restriction dans les disciplines. Là vous avez la moitié des finales à Zurich et l'autre à Bruxelles." Du coup, pas évident de mettre sur pied un grand concours ou une grande course si la finale de la Diamond League et le gros prize-money se décide le lendemain en Belgique.
Les retraites d'Usain Bolt et de Mo Farah, associées au fait que la nouvelle génération mette un peu de temps à arriver au niveau de charisme des anciennes stars, font qu'un meeting peut difficilement centrer sa communication autour d'un Karsten Warholm, par exemple, malgré la classe et le bagout du Norvégien spécialiste du 400 m et du 400 m haies. "Ce sont les duels et les histoires qui sont intéressants aujourd'hui, poursuit Laurent Meuwly. Warholm face à Samba ou les lanceurs de javelot allemands, parce qu'ils sont proches les uns des autres. On n'a moins d'athlètes qui dominent leur discipline."
Et pour terminer, la lutte antidopage a permis de niveler les valeurs et de voir des nations comme la Suisse titiller les meilleurs sur le plan mondial. "Il y a davantage de surprises et ce ne sont pas toujours les mêmes qui gagnent, se réjouit le Fribourgeois. C'est beaucoup plus sain. Avant on avait des athlètes qui couraient le 100 m en 9''90 en avril et en 9''90 en septembre. En tant qu'entraîneur, je n'arrive pas à maintenir un athlète sur son niveau de performance pendant cinq mois. Les gens aiment voir des records, mais l'athlétisme change et il faut prendre l'habitude de le regarder avec un autre oeil."
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