Ligue 1 "L'urgence désormais est économique"

ATS

29.4.2020

Face à l'injonction sanitaire d'arrêter la Ligue 1 et dans l'impossibilité de disputer le moindre match avant août, le football français se retrouve confronté à une période inédite de cinq mois sans revenus, une «urgence économique» de plus en plus pressante.

Le PSG d'Edinson Cavani ne devrait pas faire partie des clubs en danger.
Le PSG d'Edinson Cavani ne devrait pas faire partie des clubs en danger.
Keystone

Au pays des champions du monde, c'est le jour d'après: les annonces mardi du Premier ministre Edouard Philippe, interdisant au moins jusqu'au mois d'août la reprise des rencontres, ont prolongé le marasme actuel du secteur du ballon rond, suspendu depuis la mi-mars par la pandémie de coronavirus et désormais en proie à des problèmes existentiels.

«L'urgence désormais, elle n'est plus sportive, elle est économique. Il faut survivre», assène le président d'un club de Ligue 1. «On pensait que financièrement on serait dans une situation amenée à durer deux, trois mois, or on est plus sur une situation de cinq, six mois. Cela change les équations.»

En effet, tous les dirigeants interrogés ces dernières semaines ne se faisaient guère d'illusions quant au versement des dernières tranches de droits télévisés de la saison – actuellement gelées par beIN Sports et Canal+ – en cas de suspension définitive du championnat.

Si celle-ci vient à être entérinée dans les prochains jours par la semaine passée par la Ligue de football professionnel (LFP), comme c'est la tendance, les quelques dizaines de millions d'euros négociés auprès de Canal+ et beIN Sports correspondant aux matches déjà joués (37 M EUR pour Canal, environ 10 pour beIN selon L'Equipe) risquent donc d'être les derniers revenus des clubs avant une longue traversée du désert.

Cela représente plus de 240 millions de manque à gagner par rapport au contrat initial qui prévoyait une traite d'environ 150 millions d'euros début avril et une autre de 140 millions d'euros début juin, selon les chiffres avancés par le quotidien L'Equipe et confirmés à l'AFP de sources proches du dossier.

«Mise en danger»

«Il manque et manquera donc des recettes», résume auprès de l'AFP Jean-Pierre Rivère, président de Nice.

Certains, comme Brest, se veulent confiants: «On a quand même la chance d'avoir un club qui est plutôt dans une bonne santé financière», explique à l'AFP le directeur général Grégory Lorenzi.

Pour d'autres, la donne est beaucoup plus délicate: le PSG, en interne, a déjà estimé son manque à gagner à plus de 200 millions d'euros, et Marseille, malgré une place en Ligue des champions qui se dessine, devra rester dans les clous du fair-play financier qui le menace depuis plusieurs mois.

«Il est essentiel que chacun mette à plat sa situation financière et que nous réfléchissions collectivement avec pragmatisme pour trouver des réponses et éviter la mise en danger de clubs», martèle Jean-Pierre Rivère.

Les leviers sont multiples. En premier lieu, les salaires des joueurs. L'accord trouvé début avril par les clubs avec l'UNFP, le syndicat des joueurs, pour reporter certaines tranches de salaires, devra-t-il être intensifié ?

«Sans doute», répond Jean-Pierre Rivère. «Si les droits télé de la saison ne devaient pas être intégralement versés, il faudrait aller plus loin», glissait-on déjà en début de semaine à l'OM. Un dirigeant d'un autre club souffle pour sa part, prenant exemple sur l'AS Rome: «Quand on voit que certains joueurs dans les championnats voisins renoncent à quatre mois de salaire...»

«Secteur sinistré»

Les dirigeants interrogés après l'annonce du gouvernement espèrent d'ailleurs que l'Etat prolonge, voire renforce, ses aides actuelles (activité partielle, prêts garantis...). «Il faudra voir comment les aides vont suivre. Le sport professionnel est désormais un secteur sinistré», assène l'un d'eux.

«Je ne manquerai pas d'alerter les services publics là-dessus», a pour sa part promis Noël Le Graët, le président de la Fédération française (FFF), dans un entretien au Télégramme.

Enfin, quid d'un «plan Marshall» d'aide au football, évoqué plusieurs fois depuis le début de la crise notamment par le dirigeant lillois Gérard Lopez ?

L'idée, évoquée par RMC, d'emprunter 120 millions d'euros à un organisme de financement, une somme correspondant aux créances sur les transferts, fait son chemin. «Le procédé, c'est que certains clubs se mettent ensemble pour récupérer l'argent des transferts qu'ils se doivent entre eux. J'ai donné des contacts pour trouver les financeurs (...) C'est un projet qui pourrait se faire rapidement», explique à l'AFP M. Lopez.

Mais l'hypothèse d'un emprunt massif et collectif ne plaît pas à tout le monde: selon des sources proches du dossier, Noël Le Graët y avait mis son «feu rouge» lors d'un Bureau de la LFP ces dernières semaines...

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