Un podium déjà réglé, des étapes vallonnées et des Français survoltés ? Loin au général, les chasseurs d'étapes du peloton, dont de nombreux tricolores, abordent la troisième semaine avec gourmandise, tout en croisant les doigts pour obtenir des bons de sortie qui ont fait défaut dans les Pyrénées.
Le tableau était parfait en ce dimanche 14 juillet: des cols à n'en plus finir, un décor somptueux sous un soleil radieux, et une arrivée au sommet pour conclure la journée. Sauf que les deux patrons du peloton ont décidé de se livrer une nouvelle bataille, signant par la même l'acte de décès de toute tentative d'échappée.
«Nous aujourd'hui on aurait bien laissé l'échappée parce que ce n'était pas notre intérêt d'aller la chercher», s'est défendu Mauro Gianetti, le manager de la formation UAE de Tadej Pogacar, rejetant presque la faute sur les Visma de Jonas Vingegaard.
«C'est un peu frustrant et décourageant. Il y a plein d'étapes où j'ai bataillé pour prendre l'échappée, et après tu vois UAE qui met un gros tempo... C'est dur mentalement», a regretté le coureur de la formation TotalEnergies Jordan Jégat.
Certains se montrent même résignés face au niveau imposé par les deux armadas. «C'était soit je donnais tout pour prendre l'échappée, soit il n'y avait aucun intérêt à s'accrocher pour souffrir derrière», a par exemple estimé Romain Bardet.
«On trinque»
Un coup UAE dans le Pla d'Adet samedi, un coup Visma sur les routes ariégeoises dimanche. Et au milieu de ce combat de titans, des coureurs qui n'ont même pas de miettes à se partager. «C'est vraiment une guerre psychologique entre les deux équipes et nous, les attaquants, on trinque un peu au milieu de tout ça, c'est frustrant», a expliqué Guillaume Martin dimanche soir.
Mais la situation devrait changer pour la troisième et dernière semaine de ce Tour: les écarts sont immenses entre les trois premiers et la bagarre pour le général devrait connaître quelques temps calmes. «Les échappées vont avoir un peu plus de liberté», prophétise Tom Steels, le directeur sportif de la Soudal-Quick Step de Remco Evenepoel, troisième.
Et elles auront un terrain de jeu à leur convenance, avec un parcours exigeant et sélectif lors d'une fin de Tour inédite qui amènera le peloton jusqu'à Nice dimanche.
Si les sprinteurs devraient profiter de l'étape allant de Gruissan à Nîmes mardi pour tenter d'aller s'offrir une dernière victoire d'étape dans ce Tour, les quatre étapes suivantes offrent des opportunités pour les baroudeurs et les grimpeurs largués au général. Les premiers tenteront leur chance mercredi en direction de Superdévoluy, puis jeudi entre Gap et Barcelonette avec un parcours casse-pattes et 3’100 m de dénivelé positif.
Bouée de sauvetage
De quoi confirmer le bon Tour des représentants français venus en chasseurs d'étapes cette année. Une stratégie jusqu'ici payante puisque les deux premiers bouquets ont été décrochés par Romain Bardet et Kévin Vauquelin en Italie, avant qu'Anthony Turgis ne surprenne tout le monde lors de l'étape des chemins blancs autour de Troyes.
Les grimpeurs auront eux les yeux rivés sur les journées de vendredi et samedi et les arrivées à Isola 2000 et au col de la Couillole. Et après deux semaines de course, la chasse aux étapes ressemble également à une bouée de sauvetage pour des formations ayant jusque là traversé la Grande boucle de façon anonyme.
C'est notamment le cas de la Groupama-FDJ, souvent à l'avant mais jamais récompensée, ou de l'équipe Décathlon-AG2R, habituée à lever les bras cette saison mais muette depuis le départ de Florence. Les hommes de Vincent Lavenu sont concentrés sur la course aux places d'honneur pour leur leader Felix Gall (11e) mais des coureurs comme le champion de France Paul Lapeira pourraient avoir leur carte à jouer dans les échappées.
En priant pour que les trains des deux locomotives du Tour ne se décident pas à leur rendre la vie impossible.