Le basketball suisse ne roule pas sur l'or, et la pandémie de coronavirus y laissera d'autant plus de traces.
«Les clubs devraient boucler sans trop de dommages l'exercice 2019/2020. Mais il ne faudrait pas que ça dure», lâche Erik Lehmann, directeur Elite, Compétition et Technique de Swiss Basketball.
«La Confédération, les cantons, les communes, tout le monde s'est activé pour aider nos clubs», se réjouit l'ex-coach à succès des équipes dames de Sierre et Hélios. «Le problème, c'est la suite. Les clubs ont zéro visibilité. Ils perdront des revenus publicitaires. Mais en perdront-ils 20, 30, 40, 50%?», s'interroge-t-il.
«Personne ne peut le dire. Il y aura moins d'argent pour le basket. Et moins que pas beaucoup, ça fait très peu. Les clubs ne sont pas tous aussi solides que Fribourg ou Genève. Mais je reste optimiste», lâche-t-il, assurant que la récente décision de Swiss Central de quitter la LNA n'avait rien à voir avec la crise du coronavirus.
«Cela faisait trois ou quatre ans que Swiss Central manquait d'argent», souligne le Français, joint au téléphone par Keystone-ATS. «L'équipe dames de Riva va aussi passer de la LNA à la LNB, à cause de problèmes d'effectif. Les clubs qui étaient en difficultés avant la crise le seront toujours», rappelle-t-il.
Entre 8 et 10 équipes en LNA messieurs
Erik Lehmann craint tout de même que Swiss Central ne soit pas la seule équipe à ne plus pouvoir évoluer dans l'élite masculine lors de l'exercice 2020/2021: «Il n'y aura pas douze équipes en lice la saison prochaine. J'estime qu'il y en aura entre huit et dix», explique-t-il, soulignant qu'aucun club de LNB masculine ne souhaite rejoindre l'élite.
«Certains clubs n'auront pas leur licence en première instance», affirme l'ancien joueur de ProA, précisant que la Commission des licences était en train de plancher sur l'exercice 2020/2021. «Elle a tous les dossiers en mains. Presque tous les clubs ont demandé l'aide de la Confédération. Nous avons tout fait pour transmettre les meilleurs dossiers possibles à Swiss Olympic.»
Le casse-tête du calendrier
Erik Lehmann, qui n'a pas peur de qualifier son travail actuel de «merdique», est loin de pouvoir planifier sereinement la saison à venir. «On pense commencer en octobre, comme d'habitude. On en saura plus le 27 mai», lorsque le Conseil fédéral se prononcera sur l'interdiction des rassemblements de plus de cinq personnes.
«Mais ce ne sera possible que s'il n'y a pas de deuxième vague», coupe-t-il. Autre problématique en cas de reprise en octobre, la venue des nombreux renforts américains. «Seront-ils en mesure de quitter les Etats-Unis pour la Suisse dès le mois de septembre afin de préparer au mieux la saison?», se demande Erik Lehmann.
L'élaboration d'un calendrier constituera de toute manière un chantier majeur. «Fribourg Olympic et Elfic Fribourg veulent jouer la Coupe d'Europe, mais on n'a aucune info de la FIBA concernant des dates. Nos deux équipes nationales ont par ailleurs des matches qualificatifs pour l'Euro prévus cet automne», rappelle-t-il.
«Et il y a aussi le 3x3. La FIBA n'arrive pas à fixer des dates ou un lieu pour organiser le Tournoi de qualification olympique», auquel l'équipe de Suisse dames prendra part. «On risque de devoir interrompre la saison, comme on l'aurait fait en mars» si ce TQO avait pu se dérouler comme prévu en Inde.
Swiss Basketball envisage évidemment d'autres scénarios pour la reprise de ses compétitions-phares. «Si l'on doit débuter le 1er janvier, on jouera tous les mercredis. Mais il faudra absolument pouvoir jouer la saison prochaine», lâche Erik Lehmann, qui n'ose imaginer les conséquences d'une nouvelle saison tronquée.
Un mal pour un bien?
Une chose est certaine: l'argent se faisant plus rare, la masse salariale des clubs va forcément diminuer, et les salaires – déjà peu élevés en Suisse – des joueurs et joueuses également. «Reste à connaître la stratégie des clubs: soit tu prends moins de joueurs sous contrat, soit tu prends plus de jeunes», observe Erik Lehmann.
Doit-on craindre pour l'avenir du basketball suisse à court terme? «Non. Tout d'abord, on ne parle pas de sommes énormes. Ensuite, nous possédons une solide base de bons joueurs suisses. Ce serait peut-être un mal pour un bien de devoir miser plus sur les jeunes. On saura rebondir», conclut-il.