Mujinga Kambundji et Ajla Del Ponte peuvent écrire l'histoire samedi à Tokyo. La finale du 100 m est envisageable pour toutes les deux, ce qui serait une double première pour le sprint suisse.
Jamais, depuis les JO de l'ère moderne en mondovision de 1968 à Mexico, un sprinter ou une sprinteuse suisse n'a atteint une finale olympique. En voir deux d'un coup accéder à une finale serait sensationnel, mais pas exclu après les résultats de vendredi en séries.
Non seulement Kambundji et Del Ponte ont couru aussi vite que jamais vendredi (10''95 et 10''91). Elles ont en plus donné l'impression et déclaré qu'elles en avaient encore sous le pied.
«Mais attention, les autres athlètes aussi ont de la réserve, en particulier l'Anglaise Dina Asher-Smith», tempère Laurent Meuwly, coach de Del Ponte. Et cette dernière a bénéficié d'un vent particulièrement favorable dans sa série (4e chrono du plateau en 10''91, record de Suisse).
Les demi-finales ont lieu samedi à 12h15, heure suisse, et la finale dans la foulée, à 14h50. Les deux premières de chaque demi-finale iront directement en finale, plus les deux meilleurs temps.
Demie corsée pour Del Ponte
Dans sa demie, la plus relevée des trois, Ajla Del Ponte peut viser la 2e ou la 3e place. La première, sauf accident, est promise à la double championne olympique, la Jamaïcaine Elaine Thompson Herah (record à 10''71).
Sur le papier, plusieurs de ses adversaires directes sont meilleures. Mais certaines sont plutôt en phase descendante, à l'image de la Nigériane Blessing Okagbare (32 ans), tandis que la Tessinoise «explose» depuis deux saisons.
Sous la conduite de Laurent Meuwly, avec qui elle s'entraîne aux Pays-Bas, la Tessinoise crève l'écran. Son titre européen en salle au sortir de l'hiver a posé des jalons importants.
Plus expérimentée, experte dans l'art d'arriver à un pic de forme pour les grands rendez-vous, Mujinga Kambundji apparaît plus que jamais comme une finaliste en puissance (10''95 sans forcer en séries). Il y a deux ans aux Mondiaux de Doha, elle avait ouvert la voie en décrochant le bronze sur 200 m. Jamais avant elle, un sprinter ou une sprinteuse suisse n'était monté sur un podium mondial ou olympique.
De là à ce qu'elle récidive à Tokyo, il y a un grand pas. Le niveau général du sprint féminin impressionne.
Du jamais-vu en séries
Jamais des séries de 100 m n'avaient été courues aussi vite, avec six femmes sous 10''97. Des chronos qui peuvent s'expliquer à la fois par le revêtement ultrarapide du Stade olympique de Tokyo et par les nouvelles chaussures à pointes avec mousse et carbone incorporés, qui font fureur depuis quelques mois.
L'Ivoirienne Marie-Josée Ta Lou a même signé un record d'Afrique en séries en 10''78 avec un vent défavorable. La Jamaïcaine Shelly-Ann Fraser Pryce, en quête d'un troisième sacre sur la reine des distances et qui courra dans la demie de Kambundji, reste cependant favorite, juste devant sa compatriote Elaine Thompson-Herah.
Les deux Jamaïcaines et l'Ivoirienne semblent se détacher. Il est assez rare qu'une sprinteuse européenne accède à une finale majeure, et rarissime qu'une d'entre elles décroche un podium. La dernière, aux JO, avait été la Biélorusse Yuliya Nesterenko, championne olympique en 2004.