Les dirigeants algériens ont apporté leur soutien à une jeune joueuse, Inès Ibbou, qui a critiqué le no 3 mondial Dominic Thiem. L'Autrichien a refusé de participer à un fonds de soutien destiné aux joueurs mis en difficulté par la pandémie de nouveau coronavirus.
«Cher Dominic (...), tu sais, dans un pays comme le mien, ce n'est pas facile pour une femme d'être athlète de haut niveau», a tancé Inès Ibbou dans une vidéo adressée à Thiem et diffusée ce week-end sur les réseaux sociaux. La jeune sportive, dont la famille est d'origine modeste, y souligne les difficultés à évoluer dans un «pays sans tournoi pro», sans «un seul entraîneur dans le circuit international», sans «sponsor» ou autre soutien financier.
«Savais-tu qu'en Algérie, les tournois juniors ITF sont très, très rares et qu'il n'y a pas le moindre tournoi pro ITF, ATP ou WTA? Qu'il n'y a pas un seul entraîneur sur le circuit international? Qu'il n'y a pas le moindre court indoor? Je ne sais pas comment c'était pour toi, mais pour nous, là-bas, s'il pleut pendant une semaine, on bosse notre revers... à la salle de sport. Et je ne parle même pas de la qualité des installations ou des courts... On ne savait même pas sur quelle surface on jouait. C'est du gazon? C'est de la terre battue? 'L'Afrique', comme ils disent (...).»
«Cher Dominic, contrairement à toi, beaucoup partagent ma réalité. Juste un rappel: ce n'est pas grâce à ton argent qu'on a survécu jusqu'à présent, et personne ne t'a rien demandé. L'initiative est venue de joueurs généreux qui ont immédiatement fait preuve de compassion, avec classe. Des joueurs désireux de répandre de la solidarité et de trouver des solutions pour changer les choses. Des champions en toutes circonstances. Dominic, cette crise inattendue nous plonge dans une période délicate et révèle la véritable nature des gens. Aider les joueurs, c'est aider le tennis à survivre. Ce jeu est noble.»
«La signification du sport, c'est de distinguer les plus talentueux, les plus tenaces, les plus travailleurs, les plus courageux. À moins que tu ne veuilles jouer seul sur le court? Dominic, je te l'ai dit, on ne t'a rien demandé. À part un peu de respect pour nos sacrifices. Des joueurs comme toi me font m'accrocher à mon rêve. S'il te plaît, ne gâche pas ça», a ainsi conclu Inès Ibbou. La lettre ouverte complète est à découvrir dans la vidéo ci-dessus.
La réaction du président algérien
Dès dimanche, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a réagi en assurant sur Twitter que «l'Algérie ne peut se permettre de perdre un talent sportif comme Inès Ibbou». Et le ministre algérien des Sports, Sid Ali Khaldi, a appelé au téléphone la joueuse confinée en Tunisie pour lui affirmer «toute la volonté de l'Etat à l'accompagner», a-t-il dit sur Facebook.
Inès Ibbou est entrée sur le circuit WTA à l'âge de 14 ans seulement, malgré le déficit d'infrastructures et de formateurs dont souffre ce sport en Algérie. Ex-23e mondiale chez les juniors, la jeune Algérienne est aujourd'hui reléguée à la 620e place mondiale.
Le «Player Relief Fund», le fonds de soutien évoqué par Ibbou dans sa vidéo, a pour vocation d'aider les joueurs fragilisés par l'arrêt des compétitions provoqué par la pandémie de Covid-19. Ce fonds a été adoubé par le no 1 mondial Novak Djokovic en tant que président du Conseil des joueurs de l'ATP, dont font aussi partie Roger Federer et Rafael Nadal.
Thiem: «Beaucoup ne sont pas très professionnels»
Djokovic a appelé les joueurs du top 100 en simple et ceux du top 20 en double à contribuer à ce fonds, selon leur classement: de 30'000 dollars pour le top 5 à 5000 dollars pour les joueurs entre la 51e et la 100e place.
«Aucun de ces joueurs mal classés ne lutte pour survivre. Toute l'année, j'en vois beaucoup qui ne donnent pas tout au tennis. Beaucoup ne sont pas très professionnels. Je ne vois pas pourquoi je devrais leur donner de l'argent. Je préfère donner de l'argent aux personnes ou aux organisations qui en ont vraiment besoin», avait rétorqué fin avril Dominic Thiem dans un entretien au journal autrichien Kronen Zeitung.