N'avoir encore jamais disputé un seul quart de finale dans un tournoi du Grand Chelem n'interdit pas de nourrir les plus grandes ambitions. Daniil Medvedev rêve, en effet, de barrer la route au «Big Three» cette quinzaine à New York.
L'absence d'un véritable vécu dans les grands tournois et cette statistique presque implacable qui souligne que Novak Djokovic, Rafael Nadal et Roger Federer ont enlevé 55 des 64 derniers tournois du Grand Chelem avec une série en cours de 11 succès de rang n'effraient pas le Russe.
Désormais no 5 mondial après un été merveilleux qui l'a vu s'imposer à Cincinnati et disputer les finales de Washington et de Montréal, le Russe de 23 ans mesure toutefois pleinement l'étendue de sa tâche qui l'attend avec, théoriquement, un quart de finale contre Novak Djokovic, une demi-finale devant Roger Federer et une finale face à Rafael Nadal... «Je ne pense pas à aller en finale pour l'instant, avoue-t-il dans les colonnes de «L'Equipe». Atteindre les quarts de finale serait déjà une étape supplémentaire.»
Il l'a entamée lundi par une victoire 6-4 6-1 6-2 contre l'Indien Prajnesh Gunneswaran (ATP 88). Pour un joueur qui, malgré ses succès récents, ne peux pas promettre qu'il ne «pétera plus les plombs d'un coup sur un match», cette entame a été rassurante. Daniil Medvedev a su donc enchaîner neuf jours après son succès devant Novak Djokovic en finale du Masters 1000 de Cincinnati sans trembler vraiment.
«Cela m'a pris beaucoup de temps»
«Je peux battre presque tout le monde quand je joue bien, souligne le Russe qui s'était imposé une première fois cette année face à Novak Djokovic à Monte-Carlo. Il est vraiment important de ressentir une telle confiance. Elle est venue de l'expérience accumulée au fil des tournois. Cela m'a pris beaucoup de temps pour en arriver là.» A ses yeux, son succès l'automne dernier face à Kei Nishikori en finale du tournoi de Tokyo a agi comme un déclic. «Là, je me suis dit que je pouvais être fort», glisse-t-il.
Remarquable contreur, celui qui peut devenir le troisième Russe après Yevgeny Kafelnikov et Marat Safin à inscrire son nom au palmarès d'un tournoi du Grand Chelem a choisi il y a cinq ans un – doux – exil sous le soleil de la Côte d'Azur. «Ce n'était plus possible de progresser vraiment en Russie», lâche-t-il. Il s'entraîne, ainsi, à Antibes sous la férule de deux entraîneurs – Jean-René Lisnard et Gilles Cervara – qui ont très vite compris qu'ils avaient devant eux un diamant brut à polir. «Il ne fait pas une faute. Il joue vite. Il se déplace extrêmement bien et sa couverture du terrain est excellente, souligne Jean-Réné Lisnard qui fut 84e mondial en janvier 2003. Et surtout, il s'accroche comme un rat !»
«Je sais que je suis parfois un peu fou»
«Mon but est de faire réfléchir mon adversaire Qu'il ne sache plus quoi faire», ajoute Daniil Medvedev. Le plus grand danger pour ce jeune homme de 23 ans qui maîtrise désormais parfaitement le français ne vient peut-être pas du «Big Three» mais de cette âme slave qui peut parfois vous faire sortir du droit chemin. Ainsi en mai dernier, il devait s'incliner d'entrée de jeu à Madrid, à Rome et à Roland-Garros.
«Je sais que je suis parfois un peu fou», reconnaît Daniil Medvedev. Pour le consoler, on peut certifier que Marat Safin, victorieux de l'US Open en 2000 après une démonstration extraordinaire en finale face à Pete Sampras, l'était bien plus que lui. En tennis, la folie peut parfois être une alliée.