Au lendemain du titre conquis par Rafael Nadal au Masters 1000 de Rome, Marc Rosset dresse le bilan intermédiaire de cette saison sur terre battue. A moins d'une semaine du début de Roland-Garros, le Genevois dévoile aussi ses favoris pour les Internationaux de France. Interview.
Marc Rosset, à six petits jours du début de Roland-Garros, comment jugez-vous le niveau de Stan Wawrinka sur terre battue?
"Je trouve qu'il joue très très bien. J'ai d'ailleurs vu ses matches à Madrid et à Rome. Face à Nishikori, il a fait un super match. Il a joué de manière très solide et a lâché des revers ‘long de ligne’. C'était typiquement du Stan lorsqu'il était au top, il y a 2-3 ans. Ensuite, contre Nadal en night-session, c'était un match bizarre où il n'était pas vraiment dans le coup. Finalement, en Italie, il gagne le 1er set face à Goffin avant de connaître étrangement un jour sans. L'essentiel pour lui était de revenir et de retrouver la compétition. Le fait que Stan soit désormais à nouveau parmi les 32 meilleurs joueurs mondiaux lui offre un statut de tête de série dans les tournois du Grand Chelem. Ce n'était, par exemple, pas le cas en Australie. C'est très important afin d'éviter un premier tour compliqué, de marquer des points ATP et de revenir au classement. A Roland-Garros, il va ainsi éviter des adversaires difficiles lors des deux premiers tours... Et lorsque Stan commence à gagner 3 ou 4 rencontres dans les tournois du Grand Chelem, il devient dangereux pour tout le monde."
Un autre Suisse sera présent à Paris, il s'agit évidemment de Roger Federer. Comment analysez-vous son retour sur terre?
"Je le trouve excellent. On parle quand même d'un type qui n'a pas joué depuis deux ans sur terre battue. Il revient et claque deux quarts de finale en Masters 1000. Beaucoup de joueurs seraient contents d'obtenir de tels résultats. C'est clair qu'en comparaison à ses standards, ces performances sont anecdotiques. Mais cela prouve encore son pouvoir d'adaptation phénoménal aux différentes surfaces. Je pense qu'il est prêt pour Roland-Garros. S'il peut gagner les Internationaux de France? C'est compliqué avec des joueurs comme Nadal, Djokovic ou Thiem. Ils sont peut-être supérieurs sur terre battue à l'heure actuelle. Mais la difficulté de l'ocre est qu'elle est vivante. Il est possible de jouer même s'il pleuvine. Dans ces conditions, la terre battue devient lourde, ce qui ne convient pas à Nadal car son lift ne rebondit pas. La surface est donc différente selon les conditions météos. C'est pour cela que l'ocre est piégeuse. S'il devait faire beau à Paris et que les conditions devenaient rapides, alors ce serait bénéfique à Federer."
Le forfait du Bâlois à Rome vous inquiète-t-il?
"Non, il a simplement dû ressentir une petite gène. C'est d'ailleurs en étant fatigué que le risque de blessure est le plus élevé. Roger planifie sa programmation pour être le plus compétitif possible, mais aussi pour jouer le plus longtemps possible. C'est pourquoi, s'il y avait eu le moindre risque, j'aurais été le premier à le sortir du terrain par la peau des fesses (rires)! Mais, s'il s'aligne sur terre battue cette saison, c'est surtout pour éviter une longue coupure. L'année dernière à Wimbledon, après trois mois de pause, Federer avait manqué un peu de compétition et de rythme face aux meilleurs. Il ne s'aligne donc pas forcément sur terre battue pour remporter tous les tournois, mais pour être confronté à des joueurs comme Thiem. Cela permet à Federer d'améliorer son niveau, de jouer Roland-Garros et d'arriver prêt à Wimbledon."
Plus globalement, cette saison sur terre battue a vu Fognini, Djokovic et Nadal triompher à Monte-Carlo, Madrid et Rome ainsi que Thiem gagner à Barcelone. Est-ce une bonne chose d'avoir une telle diversité de lauréats?
"Je trouve ça cool, même si Nadal garde l'étiquette de favori pour Roland-Garros. Il a gagné tellement de fois à Paris et vient de triompher à Rome avec la manière... Les autres années, Rafa gagnait pratiquement tout et écrasait tous ses adversaires. Cette saison, il est arrivé un peu en retard dans sa préparation sur terre battue à cause de sa blessure. Il est toutefois monté en puissance au fil des semaines. Les Internationaux de France s'ouvrent ainsi avec plusieurs vainqueurs de tournoi, avec un Tsitsipas qui a fait de gros résultats... C'est donc plus sympa de débuter un Grand Chelem de cette manière plutôt qu'avec un gars qui a mis des branlées à tout le monde. Ca parait donc plus ouvert, même si Nadal sera dur à battre."
Si Nadal est votre favori, quels rôles peuvent jouer nos deux Suisses?
"Federer, avec son classement et son niveau de jeu, peut arriver en deuxième semaine. J'aimerais aussi bien voir Wawrinka passer plusieurs tours. Tout dépend évidemment aussi du tableau, mais il a prouvé à Madrid qu'il ne doit pas avoir peur de ce genre de confrontations. Encore moins sur terre battue et en cinq sets."
