Harcèlement sexuel Christophe Ruggia mis en examen

ATS

16.1.2020 - 21:47

Accusé d'«attouchements» sur l'actrice Adèle Haenel lorsqu'elle était adolescente, le réalisateur Christophe Ruggia a été mis en examen jeudi pour agressions sexuelles par un juge d'instruction parisien. Le cinéaste de 55 ans conteste les accusations.

Peu connu du grand public, Christophe Ruggia est mis en examen pour «agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité sur la victime», a-t-on appris auprès du parquet de Paris.

Il a été placé sous contrôle judiciaire le temps que les investigations se poursuivent, dans le cadre d'une information judiciaire ouverte jeudi matin. Il lui est notamment interdit de rencontrer l'actrice de 31 ans, a précisé une source proche du dossier.

M. Ruggia avait été interpellé mardi matin avant d'être interrogé à Nanterre par les enquêteurs de l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP). Une confrontation avec la comédienne a également eu lieu mercredi, durant laquelle chacun a campé sur ses positions, a indiqué une autre source proche du dossier.

Attouchements et baisers forcés

L'affaire a démarré à l'automne. Adèle Haenel, récompensée par deux César en 2014 et 2015, a alors accusé le cinéaste auprès de Mediapart.

Elle a dénoncé dans le journal en ligne «l'emprise» qu'il aurait exercée sur elle pendant la préparation et le tournage du film «Les Diables» (2002), puis un «harcèlement sexuel permanent», des «attouchements» répétés et des «baisers forcés dans le cou», qui auraient eu lieu chez lui et lors de plusieurs festivals internationaux. Le tout alors qu'elle était âgée de 12 à 15 ans.

Ces accusations ont provoqué un séisme dans le milieu du cinéma français, jusque-là resté assez imperméable au mouvement #MeToo. Quelques jours plus tard, de nouvelles accusations de viol portées par une photographe française contre le célèbre réalisateur franco-polonais Roman Polanski ébranlaient de nouveau le milieu du 7e art.

«Statut de victime»

Adèle Haenel avait dans un premier temps refusé de saisir la justice, se justifiant d'une formule lapidaire et critique sur une institution qui «condamne si peu»: «La justice nous ignore, on ignore la justice». Elle avait finalement porté plainte quelques jours après l'ouverture d'une enquête préliminaire par le parquet.

Entendue par les enquêteurs le 26 novembre et le 2 décembre, elle avait alors expliqué dans un communiqué avoir décidé de «s'engage(r) activement dans cette procédure, considérant qu'il est de sa responsabilité de justiciable comme de personnalité publique d'y prendre part, au regard de la gravité des faits dénoncés et des conséquences pour chacun».

L'actrice avait ajouté que «les dénégations publiques» de Christophe Ruggia l'avaient «déterminée à obtenir judiciairement la reconnaissance de son statut de victime».

«Jouer les pygmalions»

Christophe Ruggia s'est défendu à plusieurs reprises dans les médias. Il a assuré par exemple avoir «commis l'erreur de jouer les pygmalions avec les malentendus et les entraves qu'une telle posture suscite». Dans Marianne, le cinéaste, engagé ces dernières années en faveur des réfugiés et des sans-papiers, a aussi affirmé en décembre qu'Adèle Haenel lui était hostile, car il lui avait refusé un film.

«Après ce premier film ('Les Diables', ndlr), où Adèle était éblouissante, je lui avais promis d'écrire à nouveau pour elle. J'ai donc rédigé un scénario avec un rôle pour elle et un pour Vincent Rottiers (autre comédien des 'Diables'), mais mon producteur ne voulait pas en entendre parler», a raconté le réalisateur.

«Elle misait tout sur mon futur film. Le lendemain, je recevais une lettre d'une violence inouïe où elle racontait qu'elle stoppait le cinéma parce que je l'avais trahie et manipulée», a-t-il poursuivi.

Christophe Ruggia a été suspendu de façon temporaire par la Société des réalisateurs de films (SRF), une des principales organisations de cinéastes forte de 300 adhérents, le temps de l'enquête.

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