Léman Express Genève rattrape le temps perdu

ATS

18.8.2019 - 10:04

Avant d'opter pour le tout à l'automobile, dans les années 50, Genève disposait d'un réseau de tramways extrêmement dense. On pouvait se rendre avec l'automotrice Be 4/4 67 aussi bien à Chancy, à l'extrême-ouest du canton, qu'en France voisine.
Avant d'opter pour le tout à l'automobile, dans les années 50, Genève disposait d'un réseau de tramways extrêmement dense. On pouvait se rendre avec l'automotrice Be 4/4 67 aussi bien à Chancy, à l'extrême-ouest du canton, qu'en France voisine.
Source: KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI

Comparé à d'autres villes suisses, Genève s'est longtemps montrée à la traîne en matière de développement des transports publics. Des décennies durant, la voiture a été privilégiée. Aujourd'hui, le canton comble son retard à coups d'investissements massifs.

La cité du bout du lac n'a pourtant pas toujours été la mauvaise élève de la classe, loin de là. Dans les années 1930, elle disposait même du réseau de tramways le plus dense au monde. Un tournant capital a été pris après la Deuxième Guerre mondiale. Les rails ont été arrachés pour laisser la place à l'automobile dans les rues.

Il s'agissait de copier le modèle américain du tout à la voiture, explique le conseiller aux Etats et ancien conseiller d'Etat genevois Robert Cramer. «L'esprit de Genève était d'être moderne». Ce choix de l'automobile s'est fait partout ailleurs, mais au bout du lac, il a été mis en oeuvre de façon extrêmement dogmatique.

A l'époque, seule la ligne de tram 12 avait échappé au massacre, grâce à un heureux concours de circonstances. Genève venait en effet d'acheter du matériel roulant, et il fallait bien l'amortir. La plus ancienne ligne de tram d'Europe, qui avait fait ses débuts sous forme hippomobile, a ainsi survécu un peu miraculeusement.

Une histoire de frontière

Genève a aussi pris du retard en matière de transports publics, car le canton n'avait jamais ressenti le besoin, jusqu'à récemment, d'avoir un vrai réseau RER, note M. Cramer. La géographie a ici joué un mauvais tour. L'idée d'un réseau ferroviaire régional s'est en effet heurtée à l'obstacle que constitue la frontière avec la France.

Une vision que partage en partie le député Guy Mettan. Pour l'ancien président de l'association de défense du transport ferroviaire Alprail, Genève s'est toujours vue «comme une cité Etat assiégée par la Savoie catholique». La ville de Calvin aime se projeter vers des horizons lointains, mais se méfie souvent de ses voisins.

Et quand une entente est enfin trouvée avec la France, c'est l'Histoire qui empêche d'avancer. En 1912, un accord avait été conclu pour la réalisation de la ligne ferroviaire entre Cornavin et Annemasse (CEVA), rappelle M. Mettan. La 1ère Guerre mondiale a mis fin à l'élan et le projet est tombé dans l'oubli pendant cent ans.

Aujourd'hui, Genève investit à tour de bras pour développer son offre de transports publics. Outre le Léman Express, de nouvelles lignes de trams transfrontalières vont s'ouvrir. Cet effort illustre la volonté récente de la métropole lémanique de se mettre à niveau d'autres agglomérations helvétiques, à marche forcée.

Et aussi de culture

Le service d'information pour les transports publics LITRA a publié un rapport qui montre la différence qui existe entre la Suisse romande et la Suisse alémanique en matière de mobilité. De l'autre côté de la Sarine, où l'offre est abondante, l'utilisation des transports publics est bien plus répandue.

Selon cette étude, la part modale des transports publics, en 2015, s'élevait à 17% à Genève et à 18% à Lausanne. Cette proportion atteignait 25% à Berne et à Bâle-Ville et 31% à Zurich. En d'autres termes, au bord de la Limmat, près d'un tiers de tous les déplacements, en 2015, s'effectuaient en transports publics.

Robert Cramer estime que le Léman Express ne doit constituer qu'une étape de la politique de développement des transports publics à Genève. Il ne faudra pas relâcher l'effort, ne serait-ce que pour des raisons purement écologiques, souligne-t-il. La société est en effet contrainte de devenir moins dépendante des énergies fossiles.

Pour le conseiller aux Etats, il est essentiel que la France voisine ne soit pas l'oubliée de l'équation, car il faudra s'occuper des centaines de milliers de personnes qui franchissent la frontière dans les deux sens. Le plus simple serait, selon lui, de remettre en service d'anciennes lignes ferroviaires aujourd'hui désaffectées.

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