Tribunal fédéral Une ex-partenaire enregistrée peut continuer à voir les enfants

aula, ats

16.4.2021 - 12:59

Le Tribunal fédéral s'est prononcé sur les relations avec les enfants après la dissolution d'un partenariat enregistré (archives).
Le Tribunal fédéral s'est prononcé sur les relations avec les enfants après la dissolution d'un partenariat enregistré (archives).
ATS

La justice doit examiner toutes les circonstances lorsqu'elle se prononce sur les relations avec les enfants après la dissolution d'un partenariat enregistré. L'existence d'un lien de parenté «social» est prioritaire, précise le Tribunal fédéral.

Keystone-SDA, aula, ats

En l'espèce, les deux femmes partenaires avaient eu un premier enfant en janvier 2016 dans le cadre d'une procréation assistée en Espagne. En octobre 2017, des jumeaux étaient nés selon le même procédé. Le père étant inconnu, seule la mère avait été inscrite en tant que telle à l'état civil. En septembre 2018, les compagnes se sont séparées et la dissolution du partenariat a été prononcée en décembre.

Sur demande de l'ex-partenaire de la mère, le Tribunal de protection de l'enfant et de l'adulte du canton de Genève (TPAE) lui a accordé un droit aux relations personnelles avec les trois enfants. Il a également réglé les modalités des visites.

Intérêt des enfants oublié

Cette décision a été annulée en juillet 2020 par la Cour de justice sur recours de la mère. En substance, elle a estimé que le TPAE s'était focalisé sur l'attachement de l'ex-compagne aux enfants et avait fait passer l'intérêt de cette dernière devant celui des enfants qui, selon la loi et la jurisprudence, doit primer.

Dans un arrêt de principe rendu à mi-mars, le Tribunal fédéral a admis le recours de l'ex-compagne et annulé à son tour le jugement cantonal. Il rappelle que le Code civil prévoit que, «dans des circonstances exceptionnelles», le droit aux relations personnelles peut être accordé à des tiers. Et ces circonstances concernent notamment «la relation particulièrement étroite que ces tiers ont nouée avec l'enfant»,

Le cercle des tiers est plus large que la parenté et peut s'étendre au-delà de celle-ci lorsque l'enfant a tissé un lien de parenté dite «sociale» avec d'autres personnes, précise la 2e Cour de droit civil dans un communiqué diffusé vendredi. D'ailleurs, la loi sur le partenariat enregistré (LPart) réserve un droit aux relations personnelles à l'ex-partenaire en cas de fin du partenariat.

«Parent d'intention»

Dans tous les cas cependant, c'est l'intérêt de l'enfant qui demeure prioritaire. Selon la doctrine, lorsque le requérant n'est pas seulement le partenaire enregistré du parent mais qu'il a joué un rôle de «parent d'intention» – autrement dit, lorsque l'enfant a été conçu dans le cadre d'un projet parental commun et qu'il a grandi au sein du couple – le maintien des relations personnelles est en principe dans l'intérêt de l'enfant.

Dans une telle situation, le tiers représente une «véritable figure d'attachement», indique le Tribunal fédéral. Les autres critères, telle l'existence d'un conflit entre les ex-partenaires, doivent être relégués au second plan.

En l'occurrence, la Cour de justice genevoise ne s'est pas prononcée sur l'existence de circonstances exceptionnelles. En outre, elle «s'est méprise», écrit Mon Repos, en estimant que le projet commun d'avoir des enfants et la participation au choix des prénoms et aux soins concernaient uniquement la recourante et n'étaient pas pertinents pour l'appréciation du bien des enfants.

L'instance précédente ne pouvait se dispenser d'évaluer ces circonstances avant de se prononcer sur les relations personnelles. Dans la mesure où les enfants disposent du seul lien de filiation avec leur mère, de telles relations revêtent une importance particulière, souligne le tribunal.

Ce dernier ajoute que l'hypothèse de la justice genevoise, qui juge «hautement vraisemblable» que les enfants ne se souviennent pas de la recourante, ne permet pas d'exclure qu'il soit dans leur intérêt de renouer avec elle. Il conclut que la Cour de justice «a abusé de son pouvoir d'appréciation, écartant des critères essentiels pour la décision à rendre et se fondant en outre sur des éléments sans pertinence». (arrêt 5A_755/2020 du 16 mars 2021)