Etats-UnisTrump tente de bloquer le livre de Bolton
ATS
19.6.2020 - 22:33
La justice américaine s'est penchée vendredi sur le livre au vitriol de l'ex-conseiller de la Maison Blanche John Bolton contre Donald Trump. Le président-candidat, déjà sous pression, veut empêcher la publication de cet ouvrage.
«Je ne vois pas vraiment ce que je peux faire avec tous ces livres déjà distribués à travers le pays», a prévenu le juge Royce Lamberth, du tribunal fédéral de Washington. «Le mal est déjà fait, me semble-t-il», a-t-il déploré. Il a mis sa décision en délibéré – elle pourrait intervenir dès vendredi.
Le gouvernement des Etats-Unis avait déposé cette requête de dernière minute pour bloquer la parution de «The Room Where It Happened» (La pièce où cela s'est passé). Cette chronique des 17 mois passés par l'auteur auprès de l'occupant du Bureau ovale comme conseiller à la sécurité nationale, en 2018-2019, doit sortir mardi.
Informations classifiées
L'avocat du gouvernement, David Morrell, a réaffirmé que le livre était truffé d'informations «classifiées». John Bolton était tenu de ne rien publier «sans autorisation écrite» mais «en échange d'argent, il a rompu cette promesse», a-t-il attaqué, soulignant qu'il avait coupé court au processus traditionnel de relecture par les juristes de la Maison Blanche.
Charles Cooper, l'avocat de l'ex-conseiller à l'épaisse moustache blanche, a lui reproché au gouvernement un «théâtre» qui n'a «rien de judiciaire».
Invoquant le premier amendement de la Constitution, qui consacre la liberté d'expression, il a assuré que son client a largement joué le jeu. Et déploré que des informations aient en fait été classifiées après un premier examen de son manuscrit par la Maison Blanche. Selon lui, M. Bolton «a rempli ses obligations contractuelles».
«Ce n'est pas vrai! Il n'a pas reçu d'autorisation écrite», a riposté le juge Lamberth, visiblement agacé par cette ligne de défense. «Je ne comprends vraiment pas pourquoi il a pris un tel risque.»
Président prêt à tout
Quoi qu'il en soit, sans attendre l'issue du bras de fer juridique, de larges extraits ont déjà filtré dans la presse ces derniers jours. Il s'en dégage le portrait d'un président mal avisé et prêt à tout pour se faire réélire en novembre prochain, quitte à demander un coup de pouce de la Chine, adversaire stratégique des Etats-Unis, et mettre donc en danger la sacro-sainte sécurité nationale.
John Bolton, qui a prévu plusieurs apparitions télévisées ce week-end, a déjà asséné sa conclusion jeudi: Donald Trump est selon lui «inapte» à présider la première puissance mondiale.
En face, le milliardaire républicain s'est déchaîné sur Twitter contre son ex-conseiller, qualifié d'«aigri qui voulait seulement déclencher une guerre» et a attendu d'être limogé en septembre pour critiquer son ex-patron qu'il défendait bec et ongles jusque-là.
En perte de vitesse
L'opposition démocrate est elle partagée entre la dénonciation de révélations tardives qui lui auraient été plus utiles lors de leur procédure de destitution du président – finalement acquitté en début d'année – et la volonté de donner un écho à ce portrait accablant.
La Maison Blanche aimerait que le tapage médiatique autour des mémoires de John Bolton s'arrête là, pour que les projecteurs se concentrent uniquement sur la relance de sa campagne prévue lors d'un grand meeting samedi à Tulsa, dans l'Oklahoma.
En perte de vitesse dans les sondages face à son adversaire démocrate Joe Biden, Donald Trump en a besoin pour tenter de tourner la page des crises à répétition qui ont secoué sa présidence ces derniers mois, de sa gestion controversée de la pandémie, à la croissance économique coupée en plein vol alors qu'il comptait en faire son principal atout, jusqu'à la vague de colère historique contre le racisme et les violences policières.
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