Présidentielle argentineUn ministre et l'antisystème Milei devant
ATS
23.10.2023 - 02:54
Le ministre de l'économie Sergio Massa et l'économiste ultralibéral «antisystème» Javier Milei sont arrivés en tête dimanche du premier tour de l'élection présidentielle argentine, selon des résultats officiels partiels. Ils disputeront le second tour le 19 novembre.
Keystone-SDA
23.10.2023, 02:54
23.10.2023, 07:18
ATS
Sergio Massa, 51 ans, candidat du bloc gouvernemental (centre-gauche) a surmonté le handicap d'une économie en souffrance et d'une inflation record de 138%, pour arriver en tête avec 36,6% des voix, selon les résultats partiels de l'autorité électorale après 97% des votes décomptés. Il devance Javier Milei, 53 ans, qui obtient 30% et qui confirme sa percée depuis son irruption sur la scène politique il y a deux ans.
La candidate de l'alliance d'opposition (centre-droit) Patricia Bullrich, une ex-ministre de la sécurité et protégée de l'ancien président libéral Mauricio Macri (2015-2019), est distancée, avec 23,8% des voix.
Les sondages, qui par le passé avaient sous-estimé l'ascension de Javier Milei, l'avaient placé ces dernières semaines en tête des intentions de vote devant Sergio Massa.
Climat d'incertitude
Les Argentins ont voté dans un climat d'incertitude et d'inquiétude, comme rarement depuis le retour de la démocratie il y a 40 ans, sur fond d'endettement chronique et d'inflation désormais parmi les plus élevées au monde.-
Autour des bureaux de vote, les mots de «ras-le-bol», «anxiété», «pas de formule magique», revenaient chez les électeurs approchés par l'AFP, traduisant une atmosphère partagée entre désir de changement et peur d'un «saut dans le vide».
«On a besoin d'un changement. Ce pays est un désastre, vraiment. Entre la pauvreté et l'inflation, les gens ne vont pas bien», se désolait Gabriela Paperini, 57, ans, près d'un bureau de vote du quartier de Palermo.
«Nous sommes préparés à faire le meilleur gouvernement de l'histoire», a lancé au moment de voter M. Milei, un polémiste surgi en 2021 des plateaux TV. Il a suivi depuis un fil rouge «dégagiste» contre la «caste parasite», selon lui les péronistes (centre-gauche) et libéraux qui alternent au pouvoir depuis vingt ans. «Qu'ils s'en aillent tous. Qu'il n'en reste plus un!»
Sa colère, ses formules mordantes, son style électrique, ont parlé à un public souvent jeune et sans grande perspective. Mais ses propositions, comme «tronçonner» l'Etat et le service public, «dollariser» l'économie – pour laisser le billet vert remplacer le peso – ont aussi semé doute, voire inquiétude.
A son quartier général de campagne dimanche soir, une déception était manifeste, après l'espoir suscité par les sondages depuis deux mois. «Mais je suis sûr que l'on va retourner cela. Beaucoup de voix qui n'ont pas porté sur lui, lui reviendront au second tour», déclarait Nahuel Pasquale, 27 ans, en référence à des électeurs de Bullrich.
Sergio Massa, un centriste d'ADN qui s'était déjà présenté à la présidentielle en 2015, contre ses alliés péronistes d'aujourd'hui, a pris soin en campagne de se distancier de l'exécutif – ni le président Alberto Fernández ni l'ex-cheffe de l'Etat Cristina Kirchner ne sont apparus.
Il a tenté de convaincre que «le pire de la crise» est passé, grâce à un prochain bond des exportations et la fin d'une sécheresse historique en 2022-2023, la pire en 100 ans, qui a privé l'Argentine, géant agro-exportateur, de 20 milliards de dollars de recettes.
Il a surtout ces derniers mois multiplié les largesses budgétaires: réduction du nombre d'imposables, subventions, exemptions de TVA, pour amortir le choc de l'inflation. «Irresponsabilité électoraliste», ont hurlé ses adversaires, alors que l'Argentine peine à rembourser au FMI un prêt de 44 milliards.
Mais, pour l'heure, ce n'était qu'étreintes et chants dimanche soir dans son quartier général. «On savait qu'on allait créer la surprise. Les gens sont beaucoup plus intelligents qu'on le croit quand il s'agit de défendre la patrie», déclarait à l'AFP Angelo Laredo, un comptable venu avec son épouse. «Si ce n'est pas pour aujourd'hui, ce sera pour novembre. Massa sera président».
Pour autant, lundi, les Argentins auront les yeux rivés sur le peso, qui en deux ans s'est effondré de 99 à 365 pour un dollar au taux officiel et près de 1000 pesos au taux parallèle de la rue.
«Lundi, l'Argentine continue [...] Il faut transmettre de la tranquillité», a voulu rassurer dimanche Sergio Massa.