L'AELE, dont fait partie la Suisse, et le marché commun de quatre pays d'Amérique du Sud Mercosur ont conclu vendredi un accord de libre-échange. Le Département fédéral de l'économie (DEFR) espère convaincre le Parlement pour une ratification en 2021.
«Cet accord constitue un jalon important pour notre économie», a déclaré samedi après-midi le chef du DEFR Guy Parmelin devant la presse à Zurich, alors qu'il revenait des championnats internationaux des métiers (WorldSkills) à Kazan. Il ouvre un marché de 260 millions de personnes et évite aux exportateurs suisses d'être discriminés, alors que l'UE vient de conclure cet été son propre accord de libre-échange avec le Mercosur, a-t-il poursuivi.
L'accord couvre un vaste champ d'application avec les quatre pays sud-américains que sont le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay. Outre un accès facilité au marché, il améliorera la sécurité juridique pour le commerce des produits industriels, des produits agricoles et des services.
Il comprend également des dispositions sur les investissements, les marchés publics, la protection de la propriété intellectuelle ou la réduction des obstacles non tarifaires au commerce. «La Suisse s'est surtout engagée dans le secteur agricole et la propriété intellectuelle», a précisé le Vaudois.
Guy Parmelin se veut rassurant
Pour l'agriculture, une thématique qui polarise passablement au vu des méthodes de production controversées au Brésil et en Argentine, les deux poids-lourds du continent, Guy Parmelin a d'emblée voulu rassurer: «Cet accord ne signifie pas qu'on ouvrira à-tout-va les frontière». Les prescriptions et contrôles pour les denrées alimentaires ne seront pas affaiblis, a-t-il ajouté.
Reste que la Suisse accordera pour la première fois des contingents bilatéraux en dehors de ses engagements OMC. Selon le DEFR, ces concessions ont été négociées de manière à être supportables pour l'agriculture suisse. Elles ne remettent pas en question les objectifs de la politique agricole de la Suisse.
L'accord contient par ailleurs des dispositions en matière de développement durable. Ce chapitre prévoit en particulier une filière agroalimentaire durable et contient des dispositions relatives à la protection du climat et à l'utilisation durable des ressources forestières.
Interrogé sur les incendies qui ravagent la forêt amazonienne, le conseiller fédéral a indiqué que la Suisse prenait très au sérieux ce problème. Cette question doit être discutée, selon lui, dans les cénacles internationaux. La France et l'Irlande ont elles menacé de ne pas ratifier l'accord UE-Mercosur si rien n'était fait pour maîtriser les incendies.
Economies de 180 mio par an
La Suisse exporte actuellement des marchandises pour un montant d'environ 3,6 milliards de francs par an vers les pays du Mercosur. A moyen terme, plus de 96% de ces exportations bénéficieront de concessions tarifaires et environ 95% profiteront de la franchise douanière, selon le DEFR. L'accord permettra des économies qui pourront dépasser 180 millions de francs par an.
Avant de devenir réalité, l’accord fera l’objet d’un contrôle juridique ces prochains mois. Il devrait pouvoir être signé à la fin de cette année ou début 2020. Il reviendra ensuite au Parlement de se prononcer. Le DEFR compte sur une ratification en 2021.
Berne négociait avec les Etats du Mercosur dans le cadre de l'Association européenne de libre-échange (AELE) depuis juin 2017. Outre la Suisse, l'AELE compte la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein.
Paysans réservés
Si l'accord doit permettre à l'industrie des machines et au secteur des services helvétiques d'exporter plus facilement, les milieux agricoles sont soucieux.
Les contingents d'importation accordés dans le cas de la viande bovine vont beaucoup plus loin que ceux concédés par l'UE aux pays du Mercosur. En l'état, l'Union suisse des paysans ne sait pas si elle pourra soutenir les concessions négociées, a-t-elle fait savoir samedi.
Economiesuisse salue en revanche cette nouvelle étape. Pour l'économie suisse, très investie dans l'innovation, il est particulièrement important que l'accord tienne suffisamment compte de la protection de la propriété intellectuelle.
Ce traité commercial intervient un peu plus d'un mois après la conclusion d'un autre accord de libre-échange entre le bloc sud-américain et l'Union européenne. L'accord, un des plus vastes jamais conclu par Bruxelles avec plus de 770 millions de consommateurs et 18'000 milliards d'euros de PIB, doit lui aussi encore être ratifié par les membres.
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