Exportations d'armesExportations d'armes: changement de règles
ATS
26.9.2018 - 11:59
Le Conseil fédéral risque bien de devoir renoncer à ses prérogatives en matière d'exportation d'armes. Le National a adopté mercredi par 97 voix contre 82 et 11 abstentions une motion PBD qui veut que le Parlement fixe les règles. L'objet passe au Conseil des Etats.
La décision du National s'inscrit dans le cadre de la polémique sur l'assouplissement des exportations d'armes. En juin, le Conseil fédéral a annoncé vouloir permettre des ventes d'armes vers des pays en conflit interne s'il n'y a aucune raison de penser que ce matériel sera utilisé dans ce conflit. Ces velléités ont provoqué un tollé.
"Le débat d'aujourd'hui est simple: il s'agit de savoir si la majorité de ce Parlement s'engage pour une Suisse humanitaire, pour une Suisse bâtisseuse de paix, pour une Suisse promotrice des droits humains, ou au contraire si ce conseil est dominé par les tenants du 'tout aux affaires'", a déclaré Carlo Sommaruga (PS/GE) en ouverture. Pour le PS, le PBD, le PDC le PVL et les Verts, la modification d'ordonnance envisagée par le gouvernement est inadmissible.
Promesse bafouée
Le Conseil fédéral n'a pas respecté le pacte conclu en 2009 avec le peuple lors de la campagne contre l'initiative sur l'exportation de matériel de guerre, estime Lisa Mazzone (Verts/GE). Il s'était alors engagé à ne pas assouplir les critères d'exportation de ce matériel. "Depuis, les scandales se succèdent et au lieu de serrer la vis, le Conseil fédéral fait le contraire."
L"a Suisse assume souvent un rôle de médiateur. Pourquoi compromettre ce rôle?", a renchéri Ida Glanzmann (PDC/LU) qui s'inquiète pour la neutralité de la Suisse. Le Conseil fédéral a invoqué le risque de la désindustrialisation dans le secteur de la défense, mais quelle entreprise responsable, quel Etat responsable cherche une solution en exportant des armes vers des pays en situation de guerre civile, a lancé Martin Landolt (PBD/GL).
Trop émotionnel
Pour le PLR et l'UDC, le débat est totalement émotionnel. "Les contrôles resteront draconiens", a souligné Raymond Clottu (UDC/NE). La modification d'ordonnance prévue est très modeste, a précisé Walter Müller (PLR/SG) qui a rappelé que les principes fondamentaux auxquels la Suisse adhère seront toujours respectés
Le transfert de matériel de guerre ne sera autorisé que s'il ne contrevient pas au droit international et s'il n'est pas contraire aux principes de la politique étrangère de la Suisse et à ses obligations internationales. Chaque demande continuera d'être examinée au cas par cas. En outre, n'est nouvellement concerné que du matériel de défense et non des armes offensives.
Pour plusieurs orateurs de droite, un changement de règle dans la fixation des critères d'autorisation aura des conséquences importantes pour beaucoup de PME. Car cela concernera aussi les biens à double usage, a fait valoir Jean-François Rime (UDC/FR). Là, beaucoup d'emplois sont en jeu, selon le chef du Département fédéral de l'économie.
Défense de la souveraineté
Mais Johann Schneider-Ammann a surtout plaidé pour la défense de la souveraineté suisse. "La sécurité ne pourra être garantie que si on dispose d'une base industrielle disponible à tout moment", a dit le Bernois, qui s'est toutefois montré sensible aux 30 à 40 lettres de citoyens inquiets.
Quant à la motion du PBD, le ministre l'a jugée inutile. Ce texte veut que tous les critères pour autoriser les exportations des armes soient intégrés dans la loi sur le matériel de guerre, et non plus dans une ordonnance. Cela permettrait au Parlement de débattre du contenu des dispositions et de les soumettre au référendum si nécessaire. "Une légitimation démocratique nécessaire", estime Beat Flach (PVL/AG).
Actuellement, seul le Conseil fédéral a la haute main sur les prescriptions de l’ordonnance relatives aux conditions d’exportations d’armes. Il y a des mécanismes de contrôle en main du Parlement, a rappelé en vain Johann Schneider-Ammann.
Le Conseil fédéral s'est d'ores et déjà engagé à attendre le vote du Parlement sur la motion avant de trancher. "Je vais charger mon successeur de clore le dossier", a-t-il déclaré à contre-coeur.
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