Promenade dans les bois Il y a un an, 110 hectares de forêts brûlaient à Bitsch

zd, ats

15.7.2024 - 19:24

Il y a un an, 110 hectares de forêts brûlaient sur les communes de Bitsch et de Riederalp (VS). Aujourd'hui, des pousses d'arbres apparaissent, mais il faudra une cinquantaine d'années pour qu'elles atteignent une taille humaine. Promenons-nous dans les bois avec Peter Aschilier responsable du triage forestier Forst Aletsch.

Keystone-SDA, zd, ats

Ils sont encore discrets les petits nouveaux, mais leur couleur vert tendre, qui tranche avec le gris-noir des troncs alentour, trahit leur présence. «Ici, nous avons de nombreuses pousses d'épicéas, là un bouleau, un saule ou encore un sureau», liste Peter Aschilier, touchant des doigts les différentes essences appelées à prendre la place de leurs congénères.

«Tout est déjà moins noir qu'il y a deux mois», constate-t-il en passant devant des cierges de Notre-Dame – une plante à la hampe florale jaune et aux feuilles douces – et des touffes d'orties. «La présence de l'herbe urticante est une bonne nouvelle. Friande d'azote, elle pousse dans des sols riches», glisse le garde-forestier.

«Travail long et pénible»

L'homme marche d'un pas assuré sur un sentier qui s'enfonce entre des troncs calcinés. «L'incendie s'est déclaré le 17 juillet 2023 à 17h00 et nous avons lutté pendant 19 jours d'affilée pour l'éteindre. Les deux ou trois premiers jours, ce sont les cimes qui brûlaient», raconte-t-il. Les secours travaillent d'abord avec des hélicoptères, avant de s'atteler à éteindre les foyers qui couvent dans le sol, parfois à une profondeur de 30 ou 40 centimètres; «un travail long et pénible».

Sur les 110 hectares qui ont brûlé, la moitié est «totalement morte», relève Peter Aschilier, qui s'occupe des forêts de la région d'Aletsch depuis plus d'une trentaine d'années. Il faut de 1 à 3 ans pour que le sol récupère du choc; la repousse n'est d'ailleurs pas possible partout pour l'instant.

Il se retourne et pointe du doigt une brisure sur une roche, «un micaschiste de 320 millions d'années». L'incendie n'a pas seulement eu un impact sur la végétation mais aussi sur les pierres: il y a des fissures partout où la chaleur a été très intense, y compris dans les parois rocheuses de la forêt. Tous les chemins de randonnée sont fermés depuis lors.

«Les racines tiennent le sol»

Dans la forêt, des arbres sont à terre. «Il n'y a plus de racines pour les tenir, car à certains endroits, la température au sol est montée jusqu'à 5000 ou 6000 degrés, relève Peter Achilier.

D'autres géants, immobiles et droits, semblent avoir survécu au feu. Il ne faut pas s'y tromper, ceux «dont l'écorce est entièrement brûlée sont morts», ajoute-t-il. Son équipe ne va pas les couper pour autant, la pratique étant de les garder debout pour plusieurs raisons.

Même mortes, les racines peuvent encore «tenir le sol» une quinzaine d'années. La présence de ces arbres freine aussi éboulements et avalanches, et leur ramage encore présent donne un peu d'ombres en été aux pousses et les protège d'une trop grosse couche neigeuse en hiver.

Des chênes pour le futur

Les arbres seront remplacés lentement par les nouveaux venus qui mettront cinquante ans à atteindre une taille humaine et cinquante de plus pour remplir leur rôle de protection. Si, et seulement si les animaux sauvages – chamois, chevreuils, cerfs, bouquetins – ne les broutent pas avant, explique le garde-forestier, préoccupé par le «rajeunissement difficile dans les forêts», notamment pour les feuillus.

Pour qu'une forêt retrouve un «bon équilibre», il est important aussi que diverses essences d'arbres poussent, soit un mélange avec des conifères, des feuillus et des sorbiers des oiseleurs qui nourrissent «65 espèces d'oiseaux différentes. Plus une forêt est hétérogène, plus elle est résiliente et sa biodiversité meilleure», ajoute-t-il.

Pour l'heure, il n'est pas prévu de planter activement de jeunes arbres, «les essences déjà présentes viendront d'elles-mêmes». Son équipe se chargera en revanche de planter à l'automne des glands de chêne rouvre dans les zones basses, soit en dessous de 1600 mètres. «Un investissement pour le climat à venir», explique Peter Aschilier, qui aimerait bien que ces chênes représentent, à terme, 5% de la forêt.